La répression des récentes manifestations viendrait du sommet de l’Etat. Le président de la République, Ibrahim Boubacar Keita, a saisi l’occasion d’une rencontre à Koulouba pour justifier la mesure du retour de l’autorité de l’Etat. Déjà, elle suscite des débats au sein des partis politiques de l’opposition.
Une nouvelle ère de dictature ? Le Parti pour la renaissance nationale (Parena) s’interroge sur la réaction du gouvernement aux récentes manifestations des femmes de l’Huicoma de Koulikoro, la marche des jeunes «On a tout compris» et des «Amazones» devant l’Assemblée nationale du Mali. Condamnant cette «honteuse répression», le Parena dénonce la violation des principes intangibles de la démocratie.
Selon le Parena, la police a dispersé, à coup de gaz lacrymogène, des manifestantes aux mains nues devant l’Assemblée nationale. «Certaines d’entre elles ont été blessées. Des femmes enceintes ont été brutalisées au cours de cette opération que rien ne justifiait. Avant les Amazones, les forces de l’ordre avaient gazé successivement les épouses des travailleurs compressés d’HUICOMA (le 4 janvier) et les manifestants de ‘On a tout compris’ (le 10 janvier). De même le meeting de lancement de la Plateforme du changement prévu au stade du 26 mars a été annulé suite à de pressions exercées par le gouvernement», indique un communiqué du Parena.
Le Parena dénonce cette «dérive autocratique et autoritaire» du régime d’IBK et de son gouvernement. «Le président IBK et son nouveau gouvernement font planer de sérieuses menaces sur les libertés démocratiques fondamentales, notamment sur le droit de manifestation pacifique et la liberté d’expression. C’est intolérable et inacceptable. Le président et son gouvernement sont seuls responsables du climat de violence qu’ils sont en train d’instaurer…»
Pour le Parena, dans son adresse à la nation, à l’occasion du nouvel an, le chef de l’État a proféré des «invectives et des menaces» à l’endroit des opposants qu’il a qualifiés «d’imposteurs». Aussi, la semaine dernière, lors de la cérémonie de présentation de vœux, le président n’a pas hésité à menacer de sanctions ceux qui critiquent son régime et la mauvaise gouvernance qu’il a instaurée depuis 2013. «Le Mali est-il tombé sous une nouvelle dictature ?» s’interroge le Parena, invitant toutes les forces démocratiques à se dresser contre les violations répétées des libertés protégées par la constitution de 1992 et contre les menaces qui pèsent sur notre démocratie.
Cette position est du reste partagée par l’Union pour la République et la démocratie (Urd). Le principal parti de l’opposition a relevé avec inquiétude la recrudescence de la répression par les autorités des manifestations pacifiques d’organisations de la société civile.
«L’URD condamne avec la dernière rigueur ces pratiques barbares d’un autre âge et exige qu’elles cessent immédiatement. Aussi, les restrictions imposées au mouvement plateforme du changement, empêché par les autorités de tenir son meeting le 20 janvier 2018 au stade du 26 mars de Bamako. L’URD interpelle le Président de la République garant de la Constitution et son gouvernement sur ces dérives intolérables et leur rappelle que les libertés démocratiques chèrement conquises au prix du sang des martyrs au Mali sont de nature constitutionnelle et ne sauraient être remises en cause par qui que ce soit, et exige que les autorités se ressaisissent pour ne pas imposer à notre pays de nouvelles crises dont il se passerait bien en cette période trouble d’insécurité et de précarité».
Le parti de Soumi Champion dit resté vigilant et exigeant quant au respect de la liberté d’expression et de manifestation de toutes les Maliennes et de tous les Maliens.
Comme une réponse du berger à la bergère, la réaction d’IBK ne s’est pas fait attendre. Le président de la République, Ibrahim Boubacar Keita, a saisi l’occasion d’une rencontre à Koulouba pour justifier la mesure du retour de l’autorité de l’Etat. À écouter IBK, la mesure de répression des récentes manifestations viendrait du sommet de l’Etat. «Le vieux s’est réveillé», disait-il.
Zan Diarra
Source: Soleil Hebdo