Avec le processus de sortie de crise qui est pour le moment sur la bonne voie, le président de la République Ibrahim Boubacar Kéita doit clairement exprimer sa volonté de consolider l’État de droit, d’améliorer l’environnement des affaires, de lutter efficacement contre l’impunité et la corruption et de construire une institution judiciaire forte et impartiale, pour un Mali émergent à l’horizon 2020.
Avec bientôt les réformes que le ministère de la Justice veut mettre sur pied, elles vont permettre certes de moderniser notre justice, mais également pour la rendre plus sure pour le monde des affaires, et surtout permettre aux citoyens de faire reconnaitre leurs droits. Les réformes qui vont être engagées vont changer le visage de la justice malienne. Mais qu’à cela ne tienne, il faudra se pencher sur le cas du secteur de la sécurité. Car malgré la signature de l’Accord de paix et de réconciliation nationale d’Alger, il faut reconnaître que le pays reste encore en proie à une violence dans son septentrion et une insécurité grandissante. Les populations civiles, notamment celles du district de Bamako et du Nord, sont victimes d’une violation des droits humains. L’évasion des prisonniers au Camp I de la Gendarmerie dans la nuit du vendredi 9 au samedi 10 octobre en est une parfaite illustration. La présence d’ex-rebelles et de djihadistes incontrôlés et la prolifération anarchique des armes légères et de petit calibre (Alpc), suivie de leur circulation illégale, ont contribué à amplifier une atmosphère déjà morose qui régnait dans tout le pays après le coup d’Etat du 22 mars 2012. La destruction des commissariats de police et des postes de gendarmerie pendant l’occupation des régions nord du pays ont été à l’origine d’une situation de vide sécuritaire dont les conséquences se font sentir sur les populations, notamment celles vivant dans le septentrion. Aujourd’hui, il ne se passe pas un seul jour sans que des cas de braquage de motos, de vols de voitures soient signalés. En un mot, de graves violations et atteintes aux droits humains sont commises dans le pays depuis la fin de l’opération Serval. Malgré, les discours d’apaisement des nouvelles autorités, la tension perdure dans certaines régions. La combinaison de tous ces éléments crée un climat de peur qui constitue un véritable obstacle au retour à la normalité. Au regard de cette situation pour le moins alarmante, le rétablissement d’un Etat de droit et d’un environnement sécuritaire sur toute l’étendue du territoire apparaissent comme des défis pour le régime actuel. Raison pour laquelle, il faudra songer à engager la réflexion sur la réforme du secteur de la sécurité au Mali. En cette période de reconstruction post-crise, la mise en place d’un système de sécurité visant à protéger les biens et les personnes sur toute l’étendue du territoire national doit être élevée au rang des priorités nationales. Le rétablissement de la sécurité et de l’Etat de droit se veulent être le premier chantier par lequel commence la reconstruction du pays. Il faut d’ailleurs rappeler que la sécurité qui est un droit pour chaque citoyen, apparaît comme la principale fonction régalienne de l’Etat dans toute société démocratiquement organisée. Elle apparaît par ailleurs comme un préalable à tout développement humain et matériel et un véritable baromètre dans le respect des droits humains. Dans son rapport intitulé «Dans une liberté plus grande: vers le développement, la sécurité et les droits de l’homme pour tous», Kofi Annan, ancien Secrétaire général des Nations unies, le rappelait à juste titre : « Nous ne jouirons pas du développement sans sécurité, nous ne jouirons pas de la sécurité sans développement, et nous n’aurons ni l’un ni l’autre sans le respect pour les droits de l’homme. A moins que nous n’assurions la promotion de ces trois causes, aucune d’elles ne réussira ». Même si nous sommes d’accord avec l’ancien locataire de la maison de verre de New-York pour dire que ces trois causes sont intimement liées, il n’en demeure pas moins que la sécurité constitue le socle des deux autres. Pour atteindre ses objectifs, le nouveau régime doit par ailleurs doter ses forces de maintien de l’ordre de ressources matérielles à la hauteur des missions qui leur sont assignées. La restauration de la sécurité et de l’Etat de droit au Mali passent nécessairement par la lutte contre la prolifération et la circulation illicite des Alpc. L’Etat malien doit donc allouer les moyens nécessaires à la Commission nationale de lutte contre les Alpc, afin qu’elle puisse faire exécuter les différents programmes d’urgence qu’elle a mis sur pied. Outre les questions sécuritaires, s’il y a un autre défi majeur auquel le gouvernement est confronté, c’est bien celui de la mise en place d’une nouvelle armée, telle que le stipule l’accord d’Alger.Paul N’GUESSAN
source : Le Prétoire