Trafics et contrebandes, prélèvements sur les populations, financements extérieurs, rançons… Voilà comment le terrorisme était jusque-là financé dans le monde, notamment au Sahel. Mais, ces dernières années, les sources les plus lucratives pour une organisation comme Jamāʿat nuṣrat al-islām wal-muslimīn (JNIM) ou en français Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (GSIM) est le kidnapping et le vol de bétail.
Dans la région centrale de Mopti, l’une des plus durement touchées par l’insécurité marquée par des conflits intercommunautaires, quelque 130 000 têtes de bétail ont été ainsi volées en 2021, soit à peu près le même nombre qu’entre 2018 et 2020 combinés. C’est ce qui indique en tout cas le rapport publié en avril dernier par l’initiative mondiale connue sous le nom de GI-TOC (GlobalInitiative ou Initiative mondiale contre la criminalité transnationale organisée). «Si les groupes disposent de plusieurs sources de financement, notamment le trafic de drogue, les prises d’otages et l’extraction d’or, les analystes estiment que le pillage de bétail est l’une des méthodes les plus privilégiées, particulièrement au Mali qui est le 2e exportateur de bétail de la région après le Nigeria. Les djihadistes pillent le bétail et s’appuient ensuite sur un réseau pour le vendre et utiliser l’argent pour acheter des armes et des véhicules», a indiqué ce rapport. «Contrairement à d’autres marchés criminels, comme la cocaïne ou les enlèvements, le vol de bétail s’est avéré être une source de revenus résistante et stable pour les groupes armés parce que le Mali est un producteur et un exportateur régional clé de bétail», a déclaré Mme Flore Berger, analyste du Sahel à GI-TOC. «Il est probable que le vol de bétail continue à fournir des sources de revenus parce que les pays de la région continueront à acheter du bétail au Mali», a-t-elle ajouté. Selon elle, les villageois affirment que les djihadistes font preuve de stratégie dans leurs vols en repérant les points d’eau où ils savent que le bétail viendra s’abreuver.
«Ils s’installent à côté des puits pendant plusieurs jours et chaque fois que les animaux assoiffés viennent chercher de l’eau, les terroristes les prennent», a par exemple avancé Mahamad Ag Moustapha, maire de la commune d’Inekar (Ménaka). En avril 2023, ce père de neuf enfants a perdu plus de 84 000 dollars (plus de 51 588 742 F CFA) de bétail lors de l’attaque de sa ville par les djihadistes.
Il vit désormais dans un site de déplacés à Ménaka. «Il n’y a pas d’animaux dans un rayon de 300 km autour de la ville de Ménaka. … Les terroristes tentent d’affaiblir la population sur le plan économique afin qu’elle ne finance pas la résistance», at-il déclaré. Bien qu’il soit difficile de déterminer combien d’argent les djihadistes gagnent en volant du bétail, les analystes estiment qu’ils s’emparent de bêtes valant des dizaines de millions de dollars par an. Les bénéfices nets tirés du vol de bétail dans un district de la région de Mopti, selon le rapport du «Global Initiative» (GI-TOC), s’élèvent à environ 730 000 dollars en un an, soit environ 448 330 741 F CFA. Une vraie manne financière facilement acquise et utilisée pour déstabiliser la bande sahélo-saharienne, principalement le Mali !
Alphaly
Source: Nouvelle République