En réplique au Rapport trimestriel du Secrétaire général des Nations Unies sur la situation au Mali, couvrant la période du 03 juin au 19 septembre 2022, le Ministre des Affaire étrangères et de la Coopération internationale, Abdoulaye Diop, apporté les observations du Gouvernement ainsi que les attentes du Mali dans le cadre de sa coopération avec la MINUSMA en vue d’une meilleure articulation des actions communes sur le théâtre des opérations.
Ledit examen a eu lieu le mardi 18 octobre dernier au Conseil de Sécurité de l’ONU est un exercice ordinaire en application des dispositions de la résolution 2640 (2022) portant renouvellement du mandat de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la Stabilisation au Mali (MINUSMA).
En effet, si les observations détaillées du Gouvernement ont été communiquées aux membres du Conseil de sécurité dans un Mémorandum, le Chef de la diplomatie malienne a mis le curseur sur des progrès importants réalisés au plan politique pendant la période sous examen, pour un retour apaisé et sécurisé à l’ordre constitutionnel. Il s’agit entre autre de « l’adoption d’un chronogramme pour les réformes politiques et électorales, y compris le calendrier des élections, dans le cadre de la nouvelle Loi électorale », qui, à ses dires, prévoit notamment la création et la mise en place de l’Autorité indépendante de gestion des élections (AIGE).
A cela s’ajoutent le projet de l’augmentation du nombre de sièges du Conseil national de Transition pour plus d’inclusivité et de consensus, l’avant-projet de la nouvelle Constitution malienne. Ces mesures, selon le ministre Diop, s’inscrivent dans le cadre d’un vaste chantier de réformes en cours d’exécution et indispensables à la refondation de l’Etat.
Actions en faveur de l’APR
Parlant de la mise en œuvre de l’Accord pour la paix et la réconciliation issu du processus d’Alger, le ministre des Affaires étrangères et de la Coopération internationale a souligné que le Gouvernement reste totalement engagé dans sa mise en œuvre diligente et intelligente, pour la stabilité durable du Mali. Les actions en ce sens ont consisté en la tenue de la réunion de haut niveau décisionnel au mois d’août dernier, suivie de la 6ème réunion de haut niveau du Comité de Suivi, le 02 septembre 2022, et la 46ème session du CSA du 11 octobre 2022 qui a permis aux parties maliennes de renouveler leurs engagements pour une paix durable.
Les actions en faveur la paix portent sur le processus de Désarmement, Démobilisation et Réintégration, notamment l’intégration de 26.000 ex-combattants d’ici à 2024 », la tenue de la première édition de la Semaine de la réconciliation nationale.
Actions contre l’insécurité ?
Répondant aux préoccupations relative à la situation sécuritaire, le ministre Diop n’est pas allé par quatre chemin, « le rapport sous examen aurait gagné en objectivité s’il informait davantage sur les efforts et les progrès réalisés par le Gouvernement, dans le cadre de la sécurisation du territoire national et de la protection des populations civiles ». En effet, depuis le mois de décembre 2021, précise le ministre Diop, les FAMa ont lancé des grandes opérations militaires qui ont permis de détruire plusieurs sanctuaires terroristes, d’opérer des saisies importantes d’armes et de matériels de guerre, de libérer plusieurs localités et de favoriser le retour de personnes déplacées. « Cette montée en puissance des forces de défense et de sécurité est une réalité tangible appréciée des populations », a martelé SE Diop. Qui a rassuré que le Gouvernement reste déterminé à prévenir et à contrer les attaques indiscriminées ou les représailles contre les populations.
En outre, a poursuivi le Chef de la diplomatie malienne, le Gouvernement de transition s’est doté d’une stratégie intégrée pour le Centre qui comprend, en plus des aspects purement sécuritaires, des approches politiques et de développement économique, social et culturel. « Les autorités ont pleinement conscience de ce que la seule réponse sécuritaire ne suffira pas à ramener la paix et la stabilité dans notre pays et qu’il est indispensable de créer un environnement socioéconomique à même de fournir des opportunités et perspectives aux populations, particulièrement dans leurs franges vulnérables aux influences néfastes des groupes terroristes », a-t-il précisé.
Le ministre malien des Affaires étrangères a aussi indiqué que le Gouvernement œuvre pleinement dans la même veine à la restauration de l’autorité de l’Etat et à la fourniture des services sociaux de base aux populations dans les zones encore affectées par l’insécurité. « Pour ce qui concerne la présence de représentants de l’Etat, les mesures ont été prises pour que les cadres récemment nommés rejoignent leur poste, après leur formation, qui comprend des modules sur les élections, le mandat de la MINUSMA et les services sociaux de base. A ce titre, les initiatives publiques se multiplient pour offrir l’éducation au plus grand nombre d’enfants dans les zones affectées par le conflit », a-t-il rassuré.
Quid de la plainte contre la France ?
Le ministre Abdoulaye Diop est resté surpris de voir que dans le cadre du récit factuel, le rapport du Secrétaire général ait passé sous silence la saisine du Conseil de sécurité par le Mali le 15 août 2022, pour ce qui concerne les tentatives de déstabilisation et les violations répétées de l’espace aérien par les forces françaises. « Ces actes d’agression d’une extrême gravité, qui constituent une violation de la Charte des Nations Unies et du Droit International, ne doivent pas rester sans suite », a insisté le ministre malien qui a réitéré la demande d’une réunion spécifique du Conseil de sécurité, pour « présenter les preuves concrètes des actes de duplicité, d’espionnage et de déstabilisation de la France à l’encontre du Mali, y compris le partage de renseignements et le largage de matériels militaires au profit des organisations criminelles, qui sont à l’origine de l’insécurité et des violences contre nos populations civiles qui attendent du Conseil de sécurité qu’il assume sa responsabilité principale du maintien de la paix et de la sécurité internationales ».
Au regard de ces causes de l’insécurité, de la déstabilisation et de l’expansion du terrorisme dans le Sahel, le Mali dénonce par conséquent la guerre par procuration qui lui est imposée tout comme les manœuvres et entraves à la tenue de la réunion spécifique. « Le Gouvernement du Mali se réserve le droit de recourir à la légitime défense, conformément à l’article 51 de la Charte des Nations Unies et à la lettre n°444/MAECI en date du 15 août 2022 du Gouvernement du Mali au Conseil de sécurité, si la France continue à porter atteinte à la souveraineté du Mali, à son intégrité territoriale et à sa sécurité nationale », a menacé le Chef de la diplomatie malienne.
Ferme devant l’instrumentalisation
En ce qui concerne les droits de l’homme, le rapport indique la baisse des cas d’atteinte aux droits humains sur la période couverte. Certes. Mais le ministre a estimé que, contrairement à des allégations sans fondement et entretenues à dessein, les opérations militaires des Forces de défense et de sécurité du Mali sont conduites dans le strict respect des droits de l’homme et du droit international humanitaire.
Aussi, conformément à sa politique de tolérance zéro, le ministre Diop a fait savoir qu’à travers la justice militaire, le Gouvernement a jugé plusieurs cas d’infractions relevant de la compétence des tribunaux militaires et de nombreuses procédures judiciaires ont été ouvertes dans ce sens dont certaines sont en cours d’instruction préparatoire, au niveau du Tribunal militaire. Ces actions se renforcent par les enquêtes ouvertes pour la recherche de la vérité, ainsi que la relecture en cours du Code pénal, du Code de procédure pénale et du Code de justice militaire. « La justice a ses propres exigences, lesquelles commandent que les allégations contenues dans le présent rapport soient étayées par des preuves objectives ou, tout au moins, qu’elles soient fondées en leur principe », a souhaité le ministre qui regrette que ceci n’est pas toujours établi dans le rapport.
Par ailleurs, le Chef de la diplomatie malienne a redit avec force que le Gouvernement du Mali reste fermement opposé à l’instrumentalisation et à la politisation de la question des droits de l’homme à des fins de déstabilisation, d’intimidation et de chantage.
Conditions de partenariat
Le ministre a signifié au Conseil que le peuple malien a pris son destin en main, soutient pleinement le Gouvernement dans les réformes politiques et institutionnelles, dans les efforts et les actions en cours pour la sécurisation du territoire national, la protection des personnes et leurs biens et la fourniture des services sociaux de base.
« Pour conforter ce soutien inconditionnel, le Gouvernement s’attèle à l’organisation d’élections générales, transparentes et crédibles qui marqueront la fin de la période transitoire en mars 2024, suivi du transfert pacifique du pouvoir aux nouvelles autorités élues.
Toutefois, le ministre est revenu sur les principes qui guident l’action publique au Mali, auxquels tout partenaire du Mali doit se soumettre, à savoir le respect de la souveraineté du Mali, des choix stratégiques et de partenaires opérés par le Mali, et la prise en compte des intérêts vitaux du peuple malien dans les décisions prises.
Cyril Adohoun
Source: L’Observatoire