Dès la nomination du Pr Samba Sow au poste de ministre de la Santé en remplacement du Dr Marie Madeleine Togo, nous avons été parmi les moins enthousiastes. En effet, sans vouloir être rabat-joie, nous avions quand même manifesté notre scepticisme dans la mesure où ce Département si stratégique dans l’architecture gouvernementale méritait mieux, au vu des multiples crises qui ont traversé le secteur de la Santé dont la grève qui a coûté la vie à plusieurs centaines de personnes. Eh bien, l’histoire nous donne raison aujourd’hui car le ministre Samba Sow non seulement a échoué, mais est en train de semer le chaos dans son ministère par des décisions irresponsables et parfois illégales. Alors que c’est lui qui devrait en ce moment être défenestré pour insuffisance de résultats, s’il faut faire payer tous les Dg des hôpitaux à sa place car le poisson pourrit d’abord par la tête.
Notre scepticisme était justifié parce que nous avons eu à suivre le Pr Samba Sow dans sa gestion de la structure à lui précédemment confiée, le Centre national d’Appui à la lutte contre la Maladie (Cnam de Djicoroni-para), où le personnel était entré en défiance suite à l’affaire Ebola pour laquelle ledit personnel a été floué à propos d’indemnités spéciales. Après les énormes sacrifices consentis en s’occupant de personnes suspectées d’Ebola pendant plusieurs semaines, dans le cadre d’un cantonnement.
Un courage et un patriotisme qui ont été certes reconnus du bout des doigts, les fleurs et les lauriers n’étant que pour leur chef, le Pr Samba Sow. C dernier a su tirer la couverture vers lui seul. En effet, depuis lors, la réussite de cette opération est portée en bandoulière par le Pr Sow entré dans une campagne d’autopromotion, disons d’autoglorification sans précédent, jusqu’à l’étranger.
Les indemnités spéciales qu’il avait promises au personnel, jurant que c’est en accord avec les autorités du pays en reconnaissance des sacrifices, n’ont été que du vent. Au point que le syndicat-maison, à plusieurs reprises, a manifesté sa colère pour réclamer ces sous, derrière lesquels il a fallu courir…
Pendant ce temps, le Pr Samba Sow se vantait partout d’avoir pu venir à bout d’Ebola, pour avoir sauvé des personnes infectées par le virus. Le tôgô gnini trouvait ainsi un nouveau créneau pour se vendre à l’international, oubliant que tout juste à côté de nous, au Sénégal précisément, des médecins ont eu à prouver leur expertise en matière d’Ebola. En Guinée, des praticiens guinées qui étaient au cœur du foyer de l’épidémie, sont restés moins activistes et plus discrets, honorant ainsi et de fort belle manière le serment d’Hippocrate.
C’est cet homme à l’ego démesuré que le président IBK a choisi de responsabiliser à la tête du Département de la Santé. L’adage a bien raison, qui dit que le caractère c’est comme la paire de chaussures que l’on porte. En effet, on a beau l’enlever en entrant quelque part, mais on finit toujours par la retrouver en sortant.
On ne peut en dire autrement du Pr Samba Sow qui, dès les premières heures de sa nomination comme ministre de la Santé et de l’Hygiène publique, a rassemblé tous les Docteurs responsables de structures sous ses ordres au sein de son ministère, pour leur signifier de ne plus le considérer comme un collègue car il n’est plus leur égal. Par conséquent, de tirer conséquence de cette situation dans leurs relations et de savoir s’adresser désormais à son secrétaire général qu’ils peuvent appeler comme ils veulent.
Même si dans le fond, être ministre lui donne droit à un certain respect de la part de ses collègues de la santé placés sous ses ordres, il a lourdement fauté par la manière : les pointer du doigt comme pour les menacer en leur parlant ainsi sur un ton à la fois indécent, arrogant et discourtois, relève de la provocation. Dès lors, c’est un climat de guéguerre entre lui et les médecins placés sous ses ordres, notamment les directeurs d’établissements comme les hôpitaux et la Pharmacie populaire du Mali, ainsi que d’autres chefs de services.
Atmosphère de défiance causée par le Ministre
Le gouvernement doit donc comprendre l’atmosphère de défiance qui règne entre le ministre de la Santé et les professionnels de la santé placés sous ses ordres et ayant ainsi tourné à des relations de collaboration exécrables. C’est parce que dès sa nomination comme ministre de la Santé, le Pr Samba Sow, qui croyait ainsi être arrivé sur le toit du monde, n’a jamais su adopter le bon comportement pour gérer des cadres nommés à leur poste bien avant son entrée dans le gouvernement. En plus, ces cadres se prévalent de plus de mérite que lui pour avoir été choisis après une sélection rigoureuse, mais non suite à un casting à l’aveugle, comme pour lui. C’est en toute logique qu’il passe son temps à chercher la tête de ses désormais ex collègues (comme il l’a dit lui-même) notamment à travers des intrigues et en mettant en place un système de surveillance pour guetter leurs moindres faits et gestes, par le truchement de mouchards en activité dans l’environnement de ces directeurs d’hôpitaux et autres chefs de service,http://bamada.net qui n’en peuvent plus de se sentir ainsi épiés et poursuivis au quotidien. C’est en cela qu’il faut comprendre sa furie à vouloir changer tous les directeurs des hôpitaux de Bamako et Kati, donnant ainsi l’impression que jusque-là rien n’a marché. Ce qui, naturellement, pèsera lourd, très lourd sur l’appréciation du bilan du président IBK car ce n’est pas sans rappeler un autre cas : celui du président ATT qui avait un beau matin enlevé de leur poste tous les directeurs administratifs et financiers (Daf). Une grave erreur qui sonnait comme un aveu solennel de la mauvaise gestion des finances publiques de notre pays. De supputations en élucubrations, on connaît la suite.
Le Pr Samba Sow, sans le voir, est en train, par maladresse, de lancer un message à l’opposition qui saura saisir la balle au rebond car de deux choses l’une : soit rien ne va dans les structures sanitaires au point qu’on en arrive-là ou que l’on veuille récupérer ces postes avant la campagne électorale pour y loger des béni-oui-oui qui pourront contribuer à hauteur de souhait. Là également, c’est une preuve d’un manque de sérieux dans la gestion de la santé publique. Les partenaires du Mali, comme les citoyens, sont en état d’alerte pour veiller sur la suite.
Mercredi dernier, il a été procédé à la nomination de nouveaux directeurs généraux pour les hôpitaux du Mali, de Kati et du Cnam de Djicoroni-para, à la demande du Pr Samba Sow. Ce qui vient s’ajouter aux décisions précipitées qu’il a prises pour relever les directeurs des hôpitaux du Point G et de Gabriel Touré, ainsi que leurs adjoints. Du règlement de comptes ! C’est l’aboutissement d’un processus mis en place et enrobé dans un argumentaire politicien bas de gamme. C’est grave que la gestion publique à un certain niveau puisse s’accommoder de telles fioritures ! D’ailleurs même très grave de jouer de cette manière avec le système de santé construit au fil des ans, de l’indépendance à nos jours.
Pour prouver que le désir d’enlever ces cadres de leurs postes prévalait sur tout, le ministre s’est empressé de nommer des directeurs généraux adjoints aux hôpitaux du Point G et de Gabriel Touré. Il a de toute façon mis sa menace à exécution en se débarrassant d’anciens collègues indésirables pour se précipiter de nommer des militaires comme directeurs généraux adjoints.
Des nominations annulées pour illégalité
Mais là où le bât blesse, c’est que ces militaires, encore sous la responsabilité du ministère de la Défense, devaient au préalable bénéficier d’une mesure de détachement avant de pouvoir être nommés à ces postes-là. Mais puisqu’aveuglé par son plan machiavélique de vouloir tout mettre sous coupe réglée, le ministre Samba Sow n’a pas respecté cette précaution d’usage pour nommer ces militaires. D’ailleurs connaissait-il cette disposition ? En tout cas, il s’est fait ridiculiser puisque la justice est tombée raide comme un couperet, annulant les nominations des militaires aux postes de directeurs adjoints et les autres aussi ont initié des procédures pour appeler Dame justice à se prononcer. Quelle honte pour un ministre de la République !
C’est dans cet élan de chasse à l’homme que le Pr Samba Sow est en train de tout faire pour enlever de leur poste tous les indésirables de son système. C’est en ce sens qu’il faut comprendre pourquoi une pseudo crise à la Pharmacie populaire du Mali (Ppm) pour avoir l’occasion de faire partir le Docteur Sanogo de son poste de président-directeur général de la Ppm. Selon nos investigations, les mouvements d’humeur du personnel entré en défiance contre le Pdg de la Ppm sont encouragés car “le ministère est avec nous” laisse-t-on entendre du côté du personnel de l’établissement. De toute façon, l’attitude du ministre dans ce faux conflit entre le personnel de la Ppm et son Pdg n’est pas sans reproche car au lieu d’appeler le Pdg jusque dans son bureau pour débattre avec lui de la question, le Ministre a préféré se déplacer jusqu’à la Ppm, sous le regard attentif du personnel qui jubilait déjà pour sa victoire, faisant comprendre que le Ministre est venu dire à leur chef de faire machine arrière, en ce qui concerne des cadres véreux relevés de leurs fonctions. Comment et par quel moyen le personnel savait-il à l’avance ce qui allait se passer pour se masser ce jour-là à l’entrée de la Ppm afin d’y guetter l’arrivée du ministre Samba Sow ?
Des manœuvres contre le Pdg de la Ppm
En plus, pourquoi le ministre Samba Sow cherche-t-il à tordre le bras au Pdg de la Ppm en lui demandant d’annuler les mesures contre ces cadres agitateurs, en sachant pourtant que les concernés, pris sur des faits de malversations ou détournements, sont même en train de répondre de leurs actes devant le Pôle économique du tribunal de la commune III de Bamako ? L’attitude normale du Ministre était de chercher à couvrir le Pdg placé sous ses ordres dans pareil cas, au lieu de faire la navette entre le Premier ministre et le président de la République, pour évoquer une situation politique nationale qui ne se prête pas à une radicalisation de la position du Pdg, pour l’enfoncer et avoir sa tête.
Pourtant lui, le Ministre, n’a pas hésité pour relever des cadres et chefs de famille de leurs fonctions, pour 10 fois moins que cela. De quelle logique est-il alors animé !
Tout se passait comme si, de leurs côtés, les directeurs généraux et les directeurs adjoints relevés de leurs fonctions, eu aussi, n’ont ni parents ni soutiens en mesure de manifester leur mécontentement contre le pouvoir en place, ne serait-ce qu’en usant de leurs voix électorales le jour-j. C’est donc des arguments de bas étage que l’on est en train d’utiliser pour requinquer des cadres de la Ppm dont la place est beaucoup plus dans une cellule de prison que dans un bureau pour poser des actes de gestion financière. En plus, il y en a qui ont osé introduire des médicaments de la rue dans les stocks. Ce qui est très grave et nécessite des poursuites judiciaires !
Le ministre se défausse sur les directeurs des hôpitaux Gabriel Touré et Point-G
Pour l’hôpital Gabriel Touré qui traine depuis plus d’un an sans scanner et voit les conditions de travail se délabrer tous les jours, au point de devenir un mouroir ; pour le Point G en train de perdre sa notoriété de centre hospitalier de référence sous régionale grâce à plusieurs spécialités pointues qui y sont pratiquées, le Professeur Samba Sow ne pourrait absoudre sa responsabilité de ministre de tutelle qui ne saurait se résumer à se défausser sur les directeurs généraux et leurs adjoints. En effet, il a été nommé pour régler les problèmes du secteur de la santé, surtout que ces mêmes problèmes ont eu raison de son prédécesseur. C’est dire qu’il a fait du ôte-toi-que-je-m ‘y-mette, sans rien apporter de plus.
Que dire aussi du Centre de santé de santé de référence (Cesref) de Lafiabougou dont les travaux de réhabilitation et de mise à niveau s’éternisent, allant au-delà de la patience des populations !
Que dire des médicaments dangereux comme ceux à base de tramadol (de la drogue) vendus à vil prix au su et au vu de tout le monde, avec des grossistes qui ont pignon sur rue ?
Que dire encore de la généralisation de la chicha gérée par une mafia qui aménage des fumoirs dans tous les coins de Bamako, sans que le ministre de la Santé ne pipe mot, malgré les alertes de l’Organisation mondiale de la santé en ce qui concerne la chicha dont l’usage est une grande question de santé publique, au même titre que la cigarette !
L’hôpital de Kati et l’hôpital du Mali aussi
Que dire des hôpitaux de Kati, de l’Hôpital du Mali dont il a relevé les directeurs pour nommer leurs remplaçants précipitamment lors du Conseil des ministres de mercredi dernier ! Tout ceci est le signe d’un véritable malaise dans le secteur de la santé. Arrêtons-nous-en là car le tableau est déjà sombre pour devoir inquiéter et les autorités et les populations. Mais apparemment, le ministre de la Santé est plutôt à l’aise dans sa chasse à l’homme pour satisfaire son ego plutôt que de s’attaquer aux vrais problèmes de santé publique du pays.
Il appartient maintenant aux autorités de ne pas se fier aux actions volontaristes pour faire mousser la lessive, question de cacher dans le fond les véritables problèmes de la santé publique au Mali auxquels un ministre sérieux devrait s’attaquer, au lieu de perdre son temps à des intrigues pour avoir la peau de cadres de la santé valeureux, parce que choisis après appel à la concurrence. Alors que lui-même, le Ministre, a tout simplement été parachuté.
L’expérience nous apprend qu’à l’approche de grandes échéances électorales comme la Présidentielle, on a l’habitude de flouer le président sortant, surtout s’il est candidat à sa propre succession, en lui faisant comprendre qu’il faut récupérer tous les postes stratégiques et les confier à des personnes dignes de confiance…politique. Mais en réalité, on a eu à découvrir que c’est un coup de bluff de la part de ministres sans scrupules pour faire main-basse sur les quelques ressources existantes avant la fin du mandat. Nous n’osons pas penser qu’il en est ainsi pour le secteur de la santé publique où l’outrecuidance et la mégalomanie ne doivent pousser à faire une exploitation politicienne de ces postes, alors que les Maliens pensent beaucoup plus à se soigner et seraient tentés de voter pour celui qui leur amènerait les meilleurs gestionnaires. A suivre !
La Rédaction
Source: Aujourd’hui-Mali