A la faveur des Assises nationales sur le Nord, on a tendu notre micro à un des acteurs qui a toujours souhaité la tenue de ce forum depuis le début de la crise malienne. Dans un entretien exclusif, le Prof Younouss Hamèye Dicko, président du RDS (Rassemblement pour la Démocratie et la Solidarité) et ressortissant du Gourma, nous livre ses sentiments par rapport à la tenue de ces Assises.
Le Pouce : Peut-on savoir les motifs de votre présence à ces assises ?
Younouss Hamèye Dicko : Je suis venu pour apporter ma contribution en tant que ressortissant du Nord. Je pense qu’il y a énormément de problèmes à régler avant de parvenir à la réconciliation nationale. Parmi ces problèmes, il y a celui de l’impunité. Les gens ne savent pas que dans les zones concernées, l’impunité n’a jamais existé. Celui qui commet des crimes, doit les assumer lui-même ou l’un des membres de sa famille. C’est pourquoi dans ces zones nous connaissions très jeu de crimes. Avant, on ne connaissait pas tuer, voler, violer… Aujourd’hui, ceux qui tuent ou violent, reviennent fièrement et avec arrogance se retrouver au sein de la même société qu’ils ont humiliée. Pour parvenir à une forme de réconciliation nationale, il est indispensable que les mouvements armés s’excusent auprès de la population. Mais, il faut aussi que l’Etat s’excuse auprès des populations. Il faut qu’il reconnaisse que c’est lui qui a abandonné les populations à ces gens qui ont terrorisé la population. L’Etat est le premier responsable. C’est pourquoi l’Etat doit présenter ses excuses à la Nation malienne pour avoir abandonné ses fils afin qu’ils tombent dans les mains des criminels, des narcotrafiquants, des trafiquants d’otages. Depuis les Accords d’Alger, l’Etat a fuit ses responsabilités dans la gestion de la paix au Nord. Aussi, les populations doivent s’excuser les unes par rapport aux autres. Parce qu’il y a des choses dans le Sud et dans le Nord entre les populations. Celles-ci ont aussi l’obligation de s’excuser indépendamment des mouvements armés.
Le Pouce : Etes-vous d’avis que la tenue de ces Assises soit prématurée ?
Younouss Hamèye Dicko : Je ne crois pas que c’est prématuré, mais je sais que c’est assez improvisé. Je pense que dans la situation actuelle où nous nous trouvons, il faut faire quelque chose. Il faut appeler les gens pour qu’ils se parlent. Il ne faut pas limiter les interventions des gens. Il faut que ce qui est transcrit sur le papier, soit amené à la base pour une seconde phase, afin de vérifier si ces éléments sont conformes aux réalités des populations. Et c’est tout cela qui sera mis ensemble pour trouver le véritable texte ; autrement dit, la véritable Déclaration de la réconciliation nationale. Ce n’est pas trop tard de retourner à la base. L’opinion internationale nous regarde. Il faut qu’on retourne à la base pour voir comment pleurent et vivent ces populations victimes de la crise sécuritaire. Là, on saura réellement tout le mal qu’on leur a fait.
Entretien réalisé par Tiémoko TRAORE