Bien qu’elle a deux mois, à partir de la date de transmission des résultats provisoires par l’autorité compétente, pour proclamer les résultats définitifs de l’élection référendaire, la Cour Constitutionnelle devrait faire l’effort de mettre fin au suspense en proclamant au plutôt les résultats et surtout permettre de passer à l’étape suivante celle des autres élections, à quelques sept mois de la fin de la transition. La longue attente fait planer le doute sur la sincérité, la transparence du scrutin et donne lieu à toutes sortes de supputations, d’interprétations et de rumeurs.
Les neuf sages de la Cour Constitutionnelle ont la lourde et historique responsabilité de proclamer des résultats après avoir épluché toutes les requêtes en annulation formulées par l’appel du 20 février. Elle pourrait confirmer les résultats provisoires proclamés par l’Autorité Indépendante de gestion des Elections, AIGE, comme elle peut infirmer en rejetant ces résultats. La Cour Constitutionnelle du Mali pourrait-elle écrire une nouvelle page de l’histoire de la démocratie en invalidant les résultats ? En confirmant, malgré tous les écueils soulevés par l’opposition ne prêtera-t-elle pas le flanc aux critiques de ses détracteurs ? Quelles pourraient être les conséquences d’une annulation ?
Loin de nous l’idée de remettre en cause la moralité, l’impartialité et la neutralité des neuf membres de la Cour Constitution, mais c’est au regard des immenses défis à relever et dans un temps relativement court que tout malien soucieux d’une fin heureuse de la transition doit s’impatienter voire s’inquiéter de la longue attente. La lenteur constatée dans la proclamation des résultats définitifs du referendum du 18 juin laisse présager un véritable doute sur le respect du chronogramme souverainement établi par les autorités de la transition dont le clou devrait être la tenue de la présidentielle d’ici à mars 2024. A sept mois de l’assaut final, qui est la présidentielle, la Cour Constitutionnelle ne doit pas se rendre coupable de complicité tacite dans le report de certains scrutins faute de temps. Pour rappel dans le chronogramme initial proposé à la CEDEAO, après le referendum, les élections communales et législatives devraient être tenues avant la présidentielle. Aujourd’hui, tout bon analyste arriverait à la conclusion qu’il est techniquement impossible de respecter ce chronogramme. Donc même si d’autres facteurs pourraient être la cause du retard, la Cour Constitutionnelle doit jouer sa partition pour proclamer dans les meilleurs délais les résultats définitifs, car c’est cette étape qui déterminera le reste du processus.
La Cour Constitutionnelle du Mali pourrait-elle écrire une nouvelle page de l’histoire de la démocratie en invalidant les résultats sur la base des plaintes de l’appel du 20 février?
Les chances d’un tel scénario semblent minimes, quand on sait que la justice sous nos tropiques est totalement inféodée aux principes dirigeants. La race de juge désintéressé comme Kéba M’Baye du Sénégal a tendance à disparaitre, donc la requête de l’opposition a moins de chance de prospérer. Sinon il suffit de bien examiner les demandes en annulation surtout le fait qu’il n’y ait pas eu de vote sur toute l’étendue du territoire et qu’il y ait eu la violation des lois avant, pendant et après les opérations référendaires, un juge courageux invaliderait le scrutin et mettra du coup le compteur à zéro.
En confirmant les résultats de l’AIGE, malgré tous les écueils soulevés par l’opposition la Cour Constitutionnelle ne prêtera-t-elle pas le flanc aux critiques de ses détracteurs ?
La justice malienne de façon générale n’a pas bonne presse au sein de l’opinion, la Cour Constitutionnelle, encore pire. Pour rappel elle a été taxée à tort ou à raison d’être la cause immédiate du soulèvement contre le régime d’IBK ; après s’être octroyée une prérogative qu’aucune loi ne lui a donné, celle de falsifier les résultats à sa guise en choisissant qui elle voulait comme député. C’est la proclamation des résultats définitifs des élections législatives de 2020 par la Cour Constitutionnelle qui a mis le feu aux poudres. La suite est connue. Aujourd’hui en confirmant les résultats après examen des requêtes de l’opposition elle confirmerait du coup les préjugés qu’ont ses détracteurs vis à vis de cette importante institution
En somme, la Cour Constitution garant de la Constitutionnalité de nos lois et actes ne doit plus attendre la fin du délai que la loi lui donne pour proclamer les résultats définitifs compte tenu des autres échéances électorales toutes aussi cruciales que le referendum.
Youssouf Sissoko
L’Alternance