De la vision, de l’intégrité, du courage et surtout l’audace d’affronter des prédateurs souvent rassemblés autour du festin sous le manteau de partenaires techniques et financiers (PTF) ! Autant de qualités qu’un homme d’Etat doit avoir en Afrique. Des valeurs que doit incarner l’homme sur lequel le choix des Maliens doit porter en 2018 pour sortir du cycle infernal de la mauvaise gouvernance, de la corruption, de la gabegie, de l’injustice sociale… de la pauvreté. A partir de 2018, il faudrait au Mali un président comme John Pombe Joseph Magufuli, l’actuel président de la Tanzanie.
“Pour que le Mali se relève réellement et tourne la page de cette crise, il faut quelqu’un qui dès le premier jour agisse à la Magufuli” ! Telle est la conviction de nombreux chroniqueurs politiques et intellectuels en réaction à l’une de nos publications de la semaine dernière. Il s’agit de l’article intitulé, “Gouvernance de crise : Si Abdoulaye Idrissa Maïga s’inspirait de l’audace du Grec Alexis Tsípras” (Le Reflet n°584 du jeudi 4 mai 2017).
Ils font allusion à John Pombe Joseph Magufuli, l’actuel président de la Tanzanie. “J’aurais tellement souhaité pour le Mali qu’IBK fût la solution. Mais, hélas, ce n’est qu’un grain de sable de plus”, déplore l’un d’entre eux.
Président de la Tanzanie depuis le 5 novembre 2015, John Pombe Joseph Magufuli est un homme d’Etat tanzanien né le 29 octobre 1959. Titulaire d’un doctorat en chimie de l’Université de Dar-Es-Salam, il a géré plusieurs portefeuilles ministériels (Travaux publics, Elevage et Pêche, Terres et Logement) avant d’être élu président de la République en succédant à Jakaya Kikwete…
En quelques mois seulement de gouvernance, Magufuli s’est vu attribuer le surnom de “Président bulldozer” ! Et pourtant, il est “un pur produit du système”. Mais, depuis qu’il est élu président de la République de Tanzanie, John Pombe Magufuli “ne ressemble à personne”.
Pas en tout cas à la majorité des chefs d’Etat africains qui se comportent en vrais valets du néocolonialisme. Avec Robert Mugabe (Zimbabwe), Paul Kagamé (Rwanda) et, ces derniers temps, Idriss Deby Itno (Tchad) et Patrice Talon (Bénin), ils sont nos rares dirigeants qui ne se soumettent plus au diktat des supposés partenaires techniques et financiers (PTF) dont les pays se nourrissent pourtant des richesses du continent.
Réputé intègre et travailleur, le nouveau président veut en finir avec la corruption et les passe-droits. C’est pourquoi, disent des observateurs, “les élites le détestent, mais le peuple l’adore” !
Et pourtant, malgré les responsabilités ministérielles assumées, Magufuli était un quasi-inconnu, un homme politique finalement peu glamour. Mais, à la surprise générale, c’est lui qui a succédé à Jakaya Kikwete après avoir remporté, face à plus d’une trentaine d’autres prétendants, les primaires organisées au sein du Parti de la révolution (le Chama Cha Mapinduzi) au pouvoir depuis l’indépendance.
Huit mois plus tard, rapportent les médias en Occident, “les Tanzaniens ont appris à croire en ce dirigeant d’un genre nouveau, réputé bosseur et fonceur, qui a fait de la lutte contre la corruption et de l’amélioration des conditions de vie ses priorités et qui s’est, depuis son élection, lancé dans une chasse contre le gaspillage”.
Même si, soulignent les mêmes médias en guise de bémol, “il n’est pas le premier dirigeant à s’être fait élire sur la base d’un programme très radical et à revendiquer de solides valeurs morales. Beaucoup avant lui ont paru prometteurs et ont fini en autocrates inefficaces”.
A 56 ans, John Pombe Magufuli suscite néanmoins de fortes attentes et un enthousiasme certain. A Dar-Es-Salam, le peuple se prend à rêver : aurait-il fini par trouver un chef capable de réveiller la “Géante endormie” qu’est la Tanzanie ? Un président capable de tirer le meilleur de ses immenses ressources gazières et minières largement inexploitées ?
“Magufuli prêche… Quand il dit quelque chose, il le fait. Ce n’est pas un menteur”, résume Samuel Wangwe de la Fondation pour la recherche économique et sociale à Dar-Es-Salam.
Comme au Mali, le chef de l’Etat détient des pouvoirs très étendus en Tanzanie. Et Magufuli n’a, jusqu’à présent, pas craint d’en faire usage. Il a ainsi procédé à nombre de remaniements au sein des ministères et viré sans préavis les collaborateurs qui ne lui donnaient pas satisfaction. Selon de nombreux témoignages, il se charge le plus souvent lui-même (déguisé) des visites d’inspection dans les services de l’administration publique.
Qui pourrait être le Magufuli malien ?
Professeur de chimie et fils de paysans, Magufuli a dès le départ annoncé la couleur. Il a renoncé aux somptueuses et coûteuses célébrations de l’indépendance. Et il a considérablement réduit les déplacements à l’étranger des officiels tanzaniens, validant lui-même les missions de ses collaborateurs, alors que son prédécesseur aimait tant changer d’air que ses concitoyens l’avaient surnommé Vasco de Gama. En présentant son tout premier projet de budget, en juin 2016, il a promis d’allouer 40 % des dépenses de l’Etat au développement et aux infrastructures.
Aujourd’hui, Magufuli veut briser les chaînes de la pauvreté. “Les mesures en faveur des plus pauvres seront financées grâce à la réduction des dépenses courantes”, a-t-il précisé dans une déclaration officielle. Chez nous, les programmes de lutte contre la pauvreté sont le plus souvent financés par des dettes bilatérales ou multilatérales.
Le gouvernement dans son ensemble a été prié de renoncer à ses petites extravagances, les sociétés privées seront davantage mises à contribution… Tout comme les élites les plus riches. Et le président s’est dit bien décidé à faire rentrer les taxes et impôts dans les caisses de l’Etat. Traditionnellement, ils atterrissent dans les poches ou sur les comptes en banque des barons du régime.
Naturellement que sa méthode ne plait pas à tout le monde, surtout ceux qui ont échoué à redonner espoir au peuple tanzanien. “Les gens croient sincèrement qu’il y a un nouveau shérif en ville. Mais je suis inquiet. Un jour, il va bien falloir qu’il change de méthodes. Sa présidence ne peut pas être un one-man-show”, a ainsi déclaré à la presse internationale l’ancien Premier ministre Salim Ahmed Salim.
“Magufuli est comme un soldat employé dans un hôpital. Et quand vous êtes un soldat, vous ne devez pas sourire mais choisir vos intonations. C’est quand vous souriez que les gens volent”, s’enthousiasment les habitants du quartier de Msasani de Dar-Es-Salam, cités par la presse internationale.
Et l’un d’entre eux d’ajouter : “Si Magufuli peut vraiment faire des miracles, il n’y a pas de raison pour que nous n’y parvenions pas”.
Dans les starting-blocks de 2018 qui peut mieux incarner John Pombe Joseph Magufuli pour les électeurs maliens ? Si l’on se réfère au passé de potentiels candidats dans la gouvernance des affaires, nous dirons objectivement Soumana Sako et relativement Modibo Sidibé. Et en dehors du système politique classique, Aliou Boubacar Diallo, l’homme d’affaires et président d’honneur de l’ADP/Maliba.
Hamady Tamba
Par Le Reflet