Né vers 1993 au Niger, Moussa Hamadou est cultivateur domicilié au Niger. Il est marié et père de deux enfants. Ibrahim Bello, né vers 1999 à Gossi, est berger. Ils ont été les premiers à comparaitre devant les jurés pour cette session spéciale de la Cour d’assises consacrée aux cas de terrorisme. La sentence est tombée sur eux, raide comme un couperet.
Moussa Hamadou et Ibrahim Bello sont accusés d’acte de terrorisme par appartenance à un groupe de combat intentionnellement en relation avec une entreprise terroriste, détention, port et transport d’armes et munitions de guerre ou de défense définies par la loi en relation avec une entreprise de terrorisme en l’occurrence l’Etat Islamique au Grand Sahara et la “Jamaat Al Nostrat Al Islam Wal Mouslin’” ou “Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans” affilié à Aqmi (Al Qaeda au Maghreb Islamique).
Les faits remontent au 17 mai 2020. Lors d’une patrouille de reconnaissance dans la localité d’Inlaglou, Gossi, la force Barkhane a découvert un groupe de combattants armés circulant à bord de véhicules pick-up et de mobylettes. Lorsque les militaires de la force Barkhane ont voulu stopper le convoi, le groupe armé a engagé immédiatement le combat en tirant à l’arme automatique. A l’issue des combats, la force Barkhane a pu arrêter six combattants dont Moussa Hamadou et Ibrahim Bello au moment où ils ont débarqué du pick-up armés de kalachnikov et de chargeurs garnis de munitions et protégés de gilets de combat. Les autres ont réussi à s’enfuir. Ibrahim a été testé positif au DOPEX mettant en évidence un contact récent avec de l’explosif militaire. La fouille des véhicules abandonnés par le groupe armé a permis la découverte d’une importante quantité d’armements dont des fusils d’assaut, leurs chargeurs, une mitrailleuse lourde de calibre 12,7mm et ses accessoires. Il y avait aussi des éléments et chargeurs pour fusils de précision, plus d’un millier de munitions perforantes traçantes, des explosifs, du matériel de préparation de pause d’explosif, une grenade artisanale ainsi que des talkies walkies.
Après leur arrestation, ils ont été mis à la disposition des autorités pour enquête, puis déférés devant le procureur de la République en charge du pôle judiciaire spécialisé. Au sens des dispositions combinées des articles 6, 6.2, 7 et 13 de la loi n°08-023 du 23 juillet 2008 portant répression du terrorisme au Mali, ces faits reprochés constituent des actes de terrorisme, lorsqu’ils sont intentionnellement en relation avec une entreprise individuelle ou collective ayant pour but de troubler gravement l’ordre public par intimidation et la terreur, l’appartenance à un groupe de combat et le fait de contribuer par l’une des formes de complicité telles que réglées par le code pénal, à la commission de l’une des infractions prévues par la présente loi. A l’enquête préliminaire, les accusés ont reconnu les faits de terrorisme. Ainsi, Moussa Hamadou a soutenu qu’il a été arrêté avec un groupe de Moudjahidines de quatorze (14) personnes roulant à bord de pick-up, encadré par un dispositif de mobylettes au moment où ils déplaçaient leur base.Il déclare avoir intégré l’effectif de l’Etat Islamique au Grand Sahara depuis 2018 à la base de Carfou-Wayewaye dans le cercle de Gao où ils étaient entre 500 et 700 combattants commandés par un certain Abdallah. Il dit n’avoir pas participé au combat parce qu’il s’occupait des tâches ménagères.
Ibrahim Bello indique à son tour avoir volontairement adhéré au rassemblement pour la victoire de l’islam et des musulmans (RVIV), puis à une katiba basée à la mare de Béri, près de Gossi, qui est dirigée par Nasser. Il signale que son groupe était vite défait par un groupe rival, en l’occurrence l’Etat Islamique au Grand Sahara conduit par Aliou qui l’a enrôlé en le dotant en armes et munitions dont une kalachnikov et cinq chargeurs garnis.
Ibrahim Bello fait savoir qu’ayant été interpellé très tôt après son adhésion, il n’a pas pu jouer un rôle déterminant dans les actions menées par ce groupe.
Contrairement aux dénégations de Moussa Hamadou et Bello au cours de l’information, il est attesté que Moussa a participé à plusieurs actions menées par l’Etat Islamique en 2019, notamment contre l’armée Burkinabé, des groupes d’auto-défense burkinabé et même contre le groupe rival de “Jamaat Al Nostra Al Islam Wal Mouslim” affilié à Aqmi.
Il a également déclaré avoir été séduit par le discours des djihadistes qui, selon lui, prônaient un islam droit et pur. A la barre, tous les deux accusés ont nié complètement les faits à eux reprochés. Moussa Hamadou déclare d’être arrêté au marché pendant qu’il s’approvisionnait et Ibrahim Bello notifie qu’il a été arrêté en brousse pendant qu’il s’occupait de ses animaux.L’un des avocats de la défense, à savoir Me Mah Mamadou Koné, a plaidé non coupable pour ses clients en raison de leurs propos tenus à la barre. La Cour, après délibération, les a reconnus coupables des faits de terrorisme avant de les condamner à la réclusion criminelle à perpétuité et au payement de 10 millions de Fcfa d’amende chacun.
Marie DEMBELE
Source: Aujourd’hui-Mali