La Première dame et la princesse héritière du royaume nordique ont co-présidé une session de plaidoyer de haut niveau
« Santé de la reproduction et abandon du mariage d’enfants : une dynamique pour l’autonomisation de la femme », tel était le thème d’une session de plaidoyer de haut niveau qui s’est tenue hier à l’hôtel Radisson Blu de Bamako, sous la co-présidence de l’épouse du président de la République, Mme Keïta Aminata Maïga et de Son Altesse royale Mary, princesse héritière du royaume de Danemark. C’était en présence des membres du gouvernement de notre pays et du Danemark, des membres du corps diplomatique ainsi que des organisations internationales.
Le thème du mariage d’enfant et de la santé de la reproduction est un sujet d’actualité très préoccupant. Phénomène à la fois courant et banal dans notre pays où 55% des filles sont mariées avant 18 ans et deux filles sur trois de 19 ans sont déjà entrées en vie procréative, 20% des enfants sont mariées avant 15 ans. Hélas notre pays fait partie des 4 pays d’Afrique qui enregistrent le taux de prévalence le plus élevé de mariage précoce. Cette situation a des implications néfastes sur la santé et peut engendrer des fistules obstétricales, des décès maternels, des naissances prématurées, entre autres.
Aussi, s’agissant du problème de la santé de la reproduction, selon le rapport sur l’état de la population mondiale 2017 « Des mondes à part », la santé et les droits en matière de reproduction sont marqués par des inégalités. Le même document révèle que dans les pays en développement, les femmes vivant dans 20% des ménages les plus pauvres sont généralement celles dont les besoins en matière de planification familiale sont le moins satisfaits.
Le tableau est moins reluisant dans notre pays par rapport à la santé de la reproduction et à la problématique du mariage précoce. L’espoir est tout de même permis car il, y a une forte volonté politique pour mettre fin au mariage précoce et améliorer la santé de la reproduction. En attendant de vraies solutions, voici la situation presque insupportable et injustifiable des deux problématiques de la rencontre qui sont en effet liés. Au Mali, elles sont 70 000 adolescentes, selon les données de décembre 2016, à perdre la vie chaque année en donnant la vie, et la mortalité maternelle constitue la 2e cause principale de décès chez les adolescentes de 15 à 19 ans. Un chiffre effroyable qui doit inciter à l’engagement de tous afin qu’aucune fille ne soit mariée dans notre pays avant ses 18 ans ou plus. La thématique du mariage précoce reste dans notre pays inachevée du point de vue de Mme Josiane Yaguibou, représentante résidente de l’UNFPA. C’est pourquoi elle a saisi l’occasion pour appeler à l’action, à la relecture de certains textes législatifs, à la mobilisation de ressources publiques et privées. Cela afin d’assurer le maintien des filles à l’école, de promouvoir la formation technique et professionnelle des jeunes, de garantir l’accès à tous en particulier les couches vulnérables rurales et plus pauvres aux services de la planification familiale et de la santé sexuelle et reproductive. Elle a par ailleurs plaidé pour l’insertion socio-économique des filles déscolarisées pour leur permettre d’avoir une plus grande autonomie et de contribuer au développement économique et à l’émergence de notre pays. Ce cri de cœur a été suivi des déclarations d’engagement du ministre de la Santé, celui de la Justice et du ministre de l’Economie et des Finances. Tous se sont engagés, qui pour adopter des stratégies visant à lutter contre le phénomène, qui pour prendre des mesures.
Ce qui a fait dire à Me Kassoum Tapo, représentant son collègue de la Justice, qu’une loi contre les violences basées sur le genre et qui prend en compte le mariage précoce sera bientôt sur la table de l’Assemblée nationale. C’est donc un président de l’Assemblée nationale, prévenu et mieux sensibilisé, qui dirigera les débats sur le texte traitant du bien-être des femmes et des filles maliennes.
Pour sa part, Dr Boubou Cissé a rassuré les uns et les autres que son département restera attentif pour le financement de tous programmes et projets en lien avec le mariage précoce et la promotion de la santé sexuelle et reproductrice. Quant au ministre de la Coopération au Développement du royaume de Danemark, Mme Ulla Tornaes, elle a salué l’engagement de la Première dame pour la cause. Les causes profondes du mariage précoce, dira-t-elle, est l’inégalité genre. Pour le ministre danois, chaque femme doit décider avec qui se marier et combien d’enfants elle veut faire. Dans le combat contre le mariage d’enfant, il faut forcément promouvoir, a-t-elle conseillé, l’éducation des filles et leur maintien à l’école. L’accès de tous aux services de la planification familiale doit aussi être une priorité, ajoutera Mme Ulla Tornaes qui a plaidé aussi en faveur d’une synergie d’action pour lutter contre le mariage précoce et ses conséquences graves et dangereuses pour les filles et les femmes.
Visiblement émue, Son Altesse royale Mary, princesse héritière du royaume de Danemark, s’est réjouie de cette volonté politique affichée par les autorités à travers leur engagement en faveur de la problématique du mariage précoce et de la santé sexuelle et reproductive. Elle a suggéré la combinaison des stratégies pour gagner le combat. « Il n’y a pas une solution, mais des solutions. Nous devons tous ensemble conjuguer nos efforts afin que le mariage précoce soit un mauvais souvenir au Mali », a-t-elle lancé.
Mme Keïta Aminata Maïga dira que le mariage précoce et les grossesses précoces enlèvent à la petite fille tout droit de poursuivre sa scolarité, de pouvoir s’affirmer et de jouir d’une quelconque autonomisation et contribuer au développement de son pays. Pour la Première dame, la maîtrise de la santé reproductive par les adolescentes et les adolescents permet non seulement de prendre en charge le planning familial, mais aussi de lutter contre les MST dont le VIH, les grossesses précoces, les mariages précoces, etc.
C’est justement pourquoi depuis plusieurs années, indiquera la Première dame, son ONG « Agir » accompagne le gouvernement dans la dynamique de la promotion de la santé reproductive des jeunes et des adolescents. L’ONG « Agir » travaille aussi à créer les conditions favorables à l’accès des filles à l’école, à leur apporter une formation professionnelle de qualité pour leur autonomisation. Elle a salué l’attention particulière que le gouvernement a accordé aux différentes préoccupations soulevées au cours de la session et leur engagement à accompagner l’initiative par des actions concrètes. « Je nourris l’espoir de voir la situation peu satisfaisante dépeinte, connaître des améliorations significatives pour renverser la tendance », a-t-elle indiqué. Avant de plaider pour une prise de conscience mettant en relief que bien des fléaux empêchent l’épanouissement des jeunes notamment les jeunes filles et qui ont des causes humaines que nous pouvons éradiquer.
Mariam A. Traoré
Source: Essor