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PMU : faire miser des Africains sur des courses de chevaux… organisées en France

Le concept était assez improbable. Et pourtant…

À l’origine, le Pari mutuel urbain (PMU) en Afrique, c’est une banale histoire de piratage. Nous sommes au milieu des années 1980 quand des Sénégalais ont une idée a priori folle, mais qui se révélera vite payante : pirater les images des courses hippiques qui se déroulent en France et faire parier les Africains dessus. La greffe prend, mais reste cantonnée au Sénégal – et dans l’illégalité – jusqu’au moment où les Corses, qui ont fait de l’Afrique centrale leur nouveau terrain de jeu (d’argent), s’y intéressent, au début des années 1990.

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Le plus puissant d’entre eux, Robert Feliciaggi, racontait en 1995 dans les pages du quotidien Libération comment il avait tenté l’improbable pari : « Franchement, je n’aurais jamais cru que des Africains parient sur des chevaux qui courent en France. Un jour, [Denis] Sassou [Nguesso] m’a demandé de mettre de l’argent dans la Congolaise de gestion de loterie, la Cogelo. Ce jour-là, j’ai [fait] une croix sur 60 millions de F CFA (91 500 euros actuels). Puis, quand il a eu presque tout bouffé, le directeur de la Cogelo est venu me voir pour me parler du PMU au Sénégal, qui, d’après lui, marchait très, très fort. Alors, je lui ai payé le billet pour Dakar. Il est revenu avec trois Sénégalais qui nous ont initiés. C’est comme ça que tout est parti. » Au Congo d’abord, puis au Cameroun et au Gabon.

Au Cameroun, il n’y a pas un village de brousse qui n’ait sa guérite du PMUC , note un homme d’affaires qui a dirigé un PMU

En quelques années, les PMU se multiplient un peu partout en Afrique francophone, du golfe de Guinée à Madagascar. On en compte seize aujourd’hui. « C’est un succès fou dans la plupart des pays. Au Cameroun, il n’y a pas un village de brousse qui n’ait sa guérite du PMUC », note un homme d’affaires qui a dirigé un PMU dans les années 1990 et qui s’inquiète des conséquences sociales d’une telle frénésie. Selon lui, « les bénéfices engrangés sont très importants, et seule une infime part revient aux joueurs et à l’État ».

Pour autant, les PMU africains n’ont pas grand-chose à voir avec leur « modèle » français, si ce n’est le nom et les courses. « Beaucoup de sociétés de paris hippiques prennent cette appellation, mais il n’y a aucun lien capitalistique, explique-t-on au siège de la société, à Paris. Elles sont gérées soit par les loteries nationales, soit par des opérateurs privés. Seuls des accords de partenariat nous lient : le PMU français fournit les images, des conseils sur la promotion et les programmes des courses contre un forfait. Nous avons un rapport de fournisseur à client, rien de plus. » Même les cotes ne sont pas du ressort de la « maison mère » parisienne. « Chaque PMU fait ses propres cotes en fonction du nombre de parieurs », explique un ancien dirigeant du PMU en Guinée.

À Paris, on semble gêné par la réputation de certains de ces « cousins » africains, écornée par plusieurs scandales de corruption et de blanchiment d’argent

Les chiffres dans ce pays, qui n’est pourtant pas le marché le plus florissant, sont éloquents : plus de 1 700 employés et près de 100 000 joueurs quotidiens, pour un chiffre d’affaires d’environ 30 000 euros par jour. « Dans ces pays, le PMU est souvent le plus gros employeur privé », poursuit cette source, qui ne comprend pas pourquoi la société française ne tente pas de reprendre la main sur ces « mines d’or ». Il existe bien, depuis quelques années à Vincennes (région parisienne), un Grand Prix d’Afrique visant à « célébrer l’amitié » avec les PMU africains. Mais à Paris, où l’on semble gêné par la réputation de certains de ces « cousins » africains, écornée par plusieurs scandales de corruption et de blanchiment d’argent, on prend soin de marquer sa différence.

Rémi Carayol

Source: Jeune Afrique

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