Le Président de la République, Ibrahim Boubacar Kéïta, a passé le 14 février dernier un appel téléphonique au Chef de file de l’opposition politique, Soumaïla Cissé. Depuis la fin de la présidentielle de juillet et août 2018, Soumaïla Cissé et ses soutiens refusent de reconnaître la réélection d’IBK à la magistrature suprême.
Après quelques réticences, le Président IBK a fini par écouter les sages conseils formulés ors de la cérémonie de présentation de vœux du nouvel an, par Ousmane Chérif Madani Haïdara et du patriarche des Niaré. Bien avant, le Cardinal Jean Zerbo, Archevêque de Bamako et les familles fondatrices de Bamako avaient entamé des démarches pour faire baisser la tension entre les acteurs politiques. Cet appel téléphonique d’IBK à son jeune frère est donc un pas en avant et laisse penser que le Président de la République et son gouvernement ont compris que la voie qu’ils ont empruntée mène à l’impasse. Une impasse qui pourrait être source d’instabilité institutionnelle.
IBK est un as de la communication politique. Sommé par ses ex-soutiens religieux de se débarrasser de son Premier ministre, sous la pression politique des opposants depuis la fin de la présidentielle, acculé par un front social en ébullition, pressé par la communauté internationale d’appliquer l’Accord pour la paix et la réconciliation, secoué et traumatisé par les affrontements intercommunautaires au centre du pays, le Président fondateur du Rassemblement pour le Mali (RPM) dispose d’une marge de manœuvre très mince. Toutefois, il a des cartes en main pour procéder à un semblant d’équilibrisme.
Jusque-là, le chef de l’Etat a su se mettre au-dessus de la mêlée en laissant presque toute initiative au chef du gouvernement dont les méthodes commencent à montrer leurs limites. A ce rythme, les réformes indispensables en vue, qui semblent être une camisole de force pour les plus hautes autorités de la République, peuvent difficilement aboutir. Le premier calendrier électoral a été rangé dans les placards. L’ambition de coupler le référendum constitutionnel au 1er tour des élections législatives en mi-juin peut paraître à la limite démesurée.
Comme le Président IBK, Soumaïla Cissé marche sur des œufs. Il doit être en mesure de déjouer les pièges éventuels en évitant des compromissions qui risquent d’avoir raison de ses ambitions présidentielles. Déjà, dans l’imaginaire populaire, on ne fait pas la différence entre lui et le chef de l’Etat. Cet état de fait est accentué par des discours d’adversaires politiques. Il s’agit pour le Chef de file de l’opposition et ses alliés de ne pas donner cette mauvaise impression que leur combat a pour finalité un partage de gâteau national. Ces derniers temps, certains responsables connus pour leurs comportements versatiles ont présenté publiquement le Chef de file de l’opposition et ses soutiens comme des gens affamés réclamant leur part de soupe.
C’est le temps des grandes manœuvres. Le dialogue doit aller au-delà d’un tête-tête entre le Président de la République et le Chef de file de l’opposition politique. La voie proposée par les FARE de Modibo Sidibé est sans doute une des meilleures offres à explorer pour une vraie refondation de la République. Que les acteurs politiques fassent preuve d’humilité- pour le Mali sans lequel ils sont rien- acceptant les petites graines de vérité qui nous permettraient d’avancer ! Même si elles n’émanaient pas d’eux ! Même si ça dérangeait leurs égos!
Chiaka Doumbia
Le Challenger