A moins qu’on ne se trompe, la visite de Paul Kagame chez Alpha Condé est à plusieurs et multiples volets. Les deux ont des équations semblables à résoudre. En vrac et au jugé, essayons de supputer et de mettre sur la table ce que les deux ont de commun et de différent pour cette visite de travail et d’amitié qui semble sortir de l’ordinaire :
Alpha Condé s’est emmêlé dans les cordes de sa politique interne. Son propre parti est dans la même tourmente que le principal parti d’opposition. De chaque côté, l’on pense que le malheur vient de l’autre camp. L’acrimonie est générale, le pays sent le brûlé politique, économique et social et semble se diriger inexorablement vers là d’où le Rwanda revient de loin, pour s’en sortir de manière si honorable qu’il fait figure d’école en Afrique. Voir Hutus et Tutsis se côtoyer comme si de rien, il n’a été pour sortir de l’ornière économique, politique et sociale, cela relève d’un conte de fée. La leçon est attrayante.
Le pays d’Alpha Condé n’a pas connu de guerre ethnique et de génocide, à proprement parler, les différentes composantes de cette Guinée de toutes les contradictions et contestations cherchent à en découdre pour un oui ou pour un non, les braises incandescentes sont toujours sous la cendre depuis avant l’indépendance. A chaque élection, elles s’attisent un peu plus pour frôler un incendie tribal et ethnique. Cela ne pourra pas continuer éternellement de tenter le diable impunément : « Tant que va la cruche à l’eau qu’à la fin elle se brise ».
Alpha Condé aimerait sortir de cet empêtrement et réussir le même défi que Paul Kagame, mais, disons qu’il ne sait trop comment s’y prendre pour s’entendre avec ses opposants plus que jamais ébouillantés par des promesses non tenues, et qui craignent désormais l’eau froide. Et lui, par orgueil, ne voudrait pas se voir refuser sa main tendue. L’homme du Rwanda semble être tout neuf en Guinée. Peut-être qu’il pourrait tenter de débloquer la situation en faisant asseoir face à face les deux rebelles inconciliables.
Cellou Dalein Diallo, le principal opposant, par dépit, refuse jusqu’ici de jouer le rôle de chef de file de l’opposition, statu pourtant institutionnalisé. La situation est grippée et bloquée. Il faut un intercesseur…
Paul Kagame, lui, s’est mis à dos ou a tourné le dos au monde francophone. Il est maintenant au Commonwealth. S’y sent-il dans son milieu, n’a-t-il pas de nostalgie, que ces questions se poseraient, mais s’il lui venait un jour à l’idée de revenir à ses premières amours, Alpha pourrait être son chaperon de cœur, avec ses ramifications nombreuses.
En outre, la situation au Burundi l’empoisonne et l’asphyxie. Tant que les Burundais fuiraient en masse Bujumbura pour Kigali, ils constitueraient une diversion et une perturbation, un frein à sa croissance florissante, et le « chat » Nkurunziza tient si bon l’os à Bujumbura que personne ne semble pouvoir trouver la solution idoine. La remise en question de son troisième mandat n’est plus à l’ordre du jour. Jouer aux prolongations dans ces conditions est une perte inutile de temps préjudiciable au Rwanda. Alpha Condé, tout neuf dans les crises en Afrique et dans la région des Grands Lacs, pourrait lui tirer l’épine du pied, en allant intercéder auprès du chefs des Imbonerakures. C’est le seul qui ne risque pas de se faire éconduire comme Yayi Boni ou comme les cinq derniers chefs d’Etat qui y étaient allés en rang disloqué.
Tout cela tourne autour du partage du pouvoir et de l’égalité pour tous pour tuer les confrontations politiques, des chose dont Paul Kagame a des leçons, conseils et secrets à revendre.
Si tout cela n’est pas dans le calendrier, que vient faire Kagame à Conakry ?
Source: guineenews