La France va fermer progressivement ses bases de Kidal, Tessalit et Tombouctou d’ici au début de 2022. Niamey sera désormais le point d’ancrage de la task force Takuba, à laquelle elle apportera une assistance en hommes et en matériels. De même elle continuera à participer à la mission de formation de l’Union européenne au Mali (EUTM).
Ces mesures, qui ont été annoncées par le président Emmanuel Macron à la faveur du sommet des chefs d’Etat du G5 Sahel et de France, tenu par visioconférence, vendredi 9 juillet, visent, selon lui, à une meilleure adaptation des forces aux évolutions de la lutte contre le terrorisme, tout en rationnalisant celle-là. Il est vrai que l’engagement militaire français contre les groupes djihadistes, principalement le GSIM affilié à Alqaïda et l’EIGS, a coûté à ce jour 50 soldats tués et d’importantes ressources financières dont le montant n’est pas connu officiellement.
Aussi compréhensible qu’il soit au triple plan stratégique, humain et financier, ce changement dans le fonctionnement du dispositif militaire français au Sahel n’apparaît pas moins comme la conséquence de la dégradation du partenariat militaire entre Paris et Bamako, suite au coup d’Etat du 24 mai dernier, le deuxième en l’espace de neuf mois au Mali. L’arrivée au pouvoir du M5-RFP, qui conserve des accointances avec l’imam Mahmoud Dicko, son » autorité morale » des heures chaudes de la lutte contre le régime honni d’IBK, fait redouter aux autorités de l’hexagone une collusion avec l’islamisme radical qu’elles ne sont pas prêtes à cautionner. En dépit des assurances données par le colonel Assimi Goïta quant à la préservation du caractère républicain, laïc et démocratique de l’Etat malien, qui ont permis la reprise des opérations militaires conjointes suspendues par la France en représailles à ce coup d’Etat de trop, la confiance n’est véritablement pas rétablie entre les deux pays. Ce qui pourrait expliquer le choix du Niger comme nouvel allié stratégique en lieu et place du Mali.
La fermeture prochaine des bases françaises dans les régions septentrionales est déjà perçue avec une crainte justifiée par les populations locales. Lesquelles jouissaient, grâce à elles, d’une relative sécurité liée aux patrouilles qu’elles effectuaient fréquemment aussi bien sur les routes du désert que dans les agglomérations. Ces routes et ces habitats deviendront moins sûrs une fois les soldats français partis. Les FAMa, en dépit de toute leur bonne volonté et de leur patriotisme, n’ont ni l’équipement ni le professionnalisme de Barkhane. Si l’on y ajoute que la majeure partie des régions du nord échappe encore à leur contrôle et que l’armée reconstituée selon les dispositions de l’accord pour la paix tarde à se mettre en place, le risque d’une réoccupation de ces régions par les groupes djihadistes n’est pas à écarter.
L’avancée des djihadistes vers le sud est une autre source d’inquiétude. Elle n’a de chance d’être enrayée que dans le cadre d’un partenariat solide entre forces maliennes, force conjointe du G5 Sahel et forces d’appui extérieur. La distanciation prise par Paris par rapport au Mali et les critiques acerbes du président nigérien, Mohamed Basoum, à l’égard des militaires putschistes maliens, prononcées aux côtés du président Macron à Paris, n’incitent pas à l’optimisme.
Il reste donc au Mali de prendre ses responsabilités, toutes ses responsabilités. C’est, au demeurant, l’un des objectifs recherchés par le président français qui a rappelé, vendredi, qu’ « il ne s’agit, en aucun cas pour la France, de se substituer à la responsabilité et à la souveraineté des États de la zone pour remplir leur mission de sécurité et de services à apporter à leurs populations.»
Saouti HAIDARA
Source: l’Indépendant