Malgré ses inouïs atouts, l’Afrique excelle paradoxalement dans la mendicité ! Finalement, le bon Dieu ne va-t-il pas se révolter de nous avoir aussi gracieusement offert autant d’atouts et de ressources pour nous voir pleurnicher sur notre sort et mendier comme de vrais lépreux auprès des autres qui, à vrai dire, n’ont fait qu’utiliser leurs facultés et leur intelligence dont nous sommes tout autant dotés en tant qu’êtres humains ?
Les paradoxes en Afrique ne cessent en vérité de se multiplier, d’année en année et de génération de gouvernants en génération de gouvernants. Alors que les peuples d’Afrique attendent légitimement leurs dirigeants sur le front de la production et des dispositions pratiques pour accroitre substantiellement la productivité de ce qui est consommé sur le continent, ceux-ci excellent plutôt dans la navigation permanente à vue, errant de continent en continent pour quémander la nourriture aux supposés puissances du monde.
Ainsi donc, Macky Sall, Président de la République du Sénégal et Président en exercice de l ‘Union Africaine, a, la semaine dernière, fait le déplacement en Russie, notamment à Sotchi avec à ses côtés, Moussa Faki Mahamat, le secrétaire exécutif de la même organisation.
Objectif : négocier farouchement auprès du patron du Kremlin, afin que celui-ci libère au niveau de la Mer noire des voies à l’écoulement des céréales, en l’occurrence le blé ukrainien activement recherché sur le continent africain. Car affirme-t-il, ce sont les économies africaines, très fragiles, qui subissent les pires conséquences des opérations militaires en Ukraine. Autrement dit, sans le blé ainsi importé de la Russie et de l’Ukraine, le peuple africain court le risque évident d’une famine sans précédent sur le continent.
Il en est sorti visiblement content, puisqu’il soutient avoir été rassuré par Vladimir Poutine qui, semble-t-il, est très conscient de la menace de famine qui plane sur l’Afrique, notre cher continent.
Macky Sall chez Poutine, le mérite d’une démarche…
Il me plait, au prime abord, de saluer cette démarche du président Macky Sall qui aura ainsi eu le mérite d’avoir fait le pas, d’être allé faire écouter ses lamentations par l’homme fort de la Russie qui, pour l’instant, met le monde entier en transe.
Nous saluons cette démarche parce que lorsque vous souffrez d’un mal, vous êtes naturellement le seul à en mesurer son degré de dévastation en vous et si par complexe, par orgueil, vous n’en cherchez pas les solutions en urgence, le risque de vous voir décimer par celui-ci devient de plus en plus en plus grand. De ce point de vue donc, le président Macky Sall, mérite d’être remercié pour avoir montré qu’il tient à la survie des peuples d’Afrique.
Mais après avoir dit ceci, revenons à nos réalités, oui nos réalités. L’Afrique est le continent qui regorge les terres les plus fertiles du monde. L’on les évalue d’ailleurs entre 60 et 65% de tout ce qu’il y’a comme terres cultivables sur cette planète. Comment donc expliquer que c’est l’Afrique, continent aussi peuplé de jeunes parfaitement dynamiques et pleins d’énergie qui quémande la nourriture à la Russie alors que le conflit a lieu à mille lieues des frontières africaines ?
….le flagrant paradoxe
Comment les Russes et les Ukrainiens ont-ils fait pour produire, consommer à leur faim, puis exporter conséquemment le reste de leurs produits agricoles au monde au point d’en devenir des références dans ce domaine de l’agriculture?
Il y’a là, un paradoxe flagrant qui, au bout du compte, rend compte du manque d’inspiration judicieuse des dirigeants africains. Ils ont problème flagrant de leadership, de vision et de méthode d’organisation optimale et efficiente de leurs sociétés afin de tirer meilleur profit du génie et du potentiel que celles-ci renferment.
Mais finalement, le bon Dieu ne va-t-il pas se révolter de nous avoir aussi gracieusement offert autant d’atouts et de ressources pour nous voir pleurnicher sur notre sort et mendier comme de vrais lépreux auprès des autres qui, à vrai dire, n’ont fait qu’utiliser leurs facultés et leur intelligence dont nous sommes tout autant dotés en tant qu’êtres humains ?
Théories guindées, grandiloquence, m’as-tu vu, sensationnel
La question reste entière et il est bien étonnant d’observer combien nos élites dirigeantes se vantent d’avoir les meilleurs diplômes du monde pendant que dans l’action, en terme de choix politiques éclairés et inspirés susceptibles de résultats concrets, l’on les cherche en vain, ils s’assignent malheureusement à la résidence des abonnés absents. Bien pire, ils excellent dans des théories guindées, dans la grandiloquence et le m’as-tu vu, dans le sensationnel tout court, alors que leur mission est précisément de trouver des solutions pratiques aux différents défis qui se présentent à leurs peuples, afin d’assurer leur épanouissement et leur affranchissement par rapport à cette puérile dépendance vis-à-vis de l’extérieur.
Comment est-il possible de disposer d’une intelligence qui ne sert pas la cause du meilleur devenir collectif d’un peuple ou j’allais dire, d’une race humaine entière ? Pourquoi nos pays ont-ils tant investi, pendant des décennies entières sur des pseudos intellectuels qui, au bout du compte, ne sont capables d’aucun génie ou du moins, d’aucune action déterminante qui sorte leur peuple de l’ornière, de la dépendance et de la mendicité ?
Problème structurel qui questionne les choix politiques
La démarche du président Macky Sall et de son compagnon Moussa Faki, si elle est suivie d’effet, ne pourra résorber que de façon partielle, circonstancielle et relative un problème structurel qui questionne nos choix politiques en Afrique qui ne reposent sur aucun principe déterminant et susceptible d’inscrire le continent dans la perspective d’un développement harmonieux.
Il est évident que pour échapper à la vulnérabilité, pour dynamiser, consolider et doter nos économies d’une certaine robustesse et éventuellement nous sentir auto suffisants, au moins sur le plan alimentaire et ensuite envisager la perspective de maquillage de notre vie et de notre environnement, il faut tout simplement capitaliser nos terres, les cultiver, les exploiter convenablement en y produisant ce dont nous avons besoin ici et maintenant. Elles sont gratuitement mises à notre disposition par le bon Créateur pour cette noble et juste cause.
Ne pas le faire, c’est insulter Sa générosité naturelle. Nos dirigeants vont-ils indéfiniment se risquer à cette insulte qui englue leurs propres facultés dans une forme de léthargie et même d’hibernation ?
Attendons de voir les leçons qu’ils tireront de ce que leur apprennent les épreuves actuelles de la vie au plan mondial et les nouvelles orientations qu’ils pourraient éventuellement être amenés à donner à leur gouvernance sur le continent. C’est alors que nous serons bien à l’aise pour aviser de leur lucidité et de leur engagement à servir la cause commune, par leurs actes à la tête de nos pays.
Luc Abaki, journaliste togolais
Source : Le Challenger