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Opposition-Majorité : Le dialogue est-il possible ?

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La semaine dernière, la majorité et l’opposition ont donné un signal fort d’assurance  à l’opinion nationale en créant un cadre global de concertation. C’était au cours de la toute première véritable rencontre entre les deux regroupements politiques depuis la prise de fonction du président Ibrahim Boubacar Kéïta en septembre 2013.

Ce coup d’essai suscite d’autant plus des espoirs chez les Maliens qu’il est censé instaurer désormais un dialogue de vérité entre les acteurs sur qui repose, en partie et en priorité, l’avenir du pays. Mais, ce dialogue est-il réellement possible ? La réponse est liée aux préalables suivants : le président IBK est-il dans les dispositions de tendre (à nouveau) à l’opposition la main qu’il a retirée récemment en s’attaquant à Tiébilé Dramé ? Les politiques vont-ils accepter de mettre de côté leurs intérêts pour sauver le Mali ?

Le mercredi 02 décembre dernier, la vie politique au Mali a connu un tournant décisif avec cette importante (première) rencontre entre les leaders de la majorité présidentielle et ceux de l’opposition républicaine et démocratique. L’initiative est de la Convention pour la majorité présidentielle. « Mieux vaut tard que jamais », peut-on dire, si l’on sait que moult scandales, moult dossiers brûlants et moult sujets d’intérêt national commandaient que cette initiative fût prise depuis fort longtemps. Entre autres, la situation sécuritaire précaire au nord puis sur l’ensemble du territoire national, les scandales d’Etat liés à l’avion présidentiel, au contrat d’armement militaire, à l’affaire Tomi Michel, la situation de Kidal, les pourparlers inclusifs inter maliens, l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali, le marasme économique, la montée du terrorisme avec les attentats de la Terrasse (à Bamako) et du Byblos (à Sévaré).

Mais, sur toutes ces questions et pendant que la République était menacée d’effondrement, la majorité présidentielle a toujours évité d’approcher l’opposition…pourtant républicaine et démocratique. Pourquoi ? Parce que les partis ou leaders de ce regroupement montaient chaque fois au créneau pour dénoncer les dérives du moment. Les alliés du président IBK voyaient dans ces levées de bouclier une forme d’apatridie plutôt qu’une participation à l’animation de la scène politique. Ces amis politiques ne pensaient, ni plus, ni moins qu’à leurs intérêts qu’ils semblaient voir menacés. Ils se préoccupaient surtout de nominations, de postes, de promotions, de marchés.

Mais, l’attentat du Radisson Blu (20 novembre 2015) semble les avoir réveillés de leurs méditations même s’ils affirment que l’idée date d’au moins deux mois. Sont-ils décidés de faire fi finalement de leur égo pour mettre en avant l’intérêt supérieur de la nation ? Certainement.

 

« Sauvons le Mali »

Et alors, ils doivent avoir la main tendue de l’opposition qui, à son tour, n’est pas propre de toute critique. Le tort de l’opposition ? C’est d’abord, d’avoir voulu instaurer un faux débat sur le problème de leadership. Ensuite, elle est composée de plusieurs courants qui se créent çà et là. Enfin, elle a quasiment toujours agi en rangs dispersés, avec des positions internes et propres à chaque parti. La seule fois qu’elle a tenté de faire une déclaration commune (pendant les pourparlers inclusifs), le projet a capoté, accouchant de deux communiqués.

Cet égarement des forces et des idées n’a pas forcement permis aux leaders de l’opposition de penser à sauver la nation aux côtés des autorités.

Cependant, ils ont toujours répondu à l’appel de ceux qui voulaient les rencontrer, à l’image du président de la République (nous y reviendrons plus bas) et surtout, du Premier ministre Modibo Kéïta.

Aujourd’hui, c’est la Convention pour la majorité présidentielle qui vient à l’opposition républicaine et démocratique dans une sorte de collaboration placée sous le signe de « Sauvons le Mali d’abord ». Pour le moment, c’est bon signe.

Le 02 décembre au Cicb, Boulkassoum Haïdara du Rpm conduisait la Cmp ; et Tiébilé Dramé du Parena, l’opposition, en l’absence de Soumaïla Cissé et de Modibo Sidibé.

Boulkassoum plante le décor : « J’ai fortement sollicité cette rencontre avec beaucoup d’insistance auprès des présidents Soumaïla Cissé et Tiébilé Dramé, il y a au moins deux mois, parce que le pays traverse une crise assez grave et je souhaiterai que la classe politique place cette rencontre sous le signe de « Sauvons le Mali d’abord ». Cette rencontre est une prise de contact pour voir ensemble si on peut planter un arbre qui aura un tronc qui est le Mali, avec une racine qui est le peuple malien et des ramifications qui sont nos partis politiques. Il faut voir qu’est-ce que, de commun accord, la classe politique peut défendre. C’est le but essentiel de cette rencontre ».

Tiébilé Dramé répond : « Nous sommes venus à cette toute première rencontre dans les meilleures dispositions pour discuter du Mali. Nos critiques à l’Assemblée nationale et hors de l’Assemblée nationale visent à sauver le pays, en amenant la majorité et le gouvernement à rectifier le tir. Vous souhaitez que nous parlions de la situation sécuritaire et la consolidation de la paix, nous avons suggéré un troisième point qui concerne la gouvernance politique, sociale et économique du pays, parce que c’est la gouvernance qui détermine tout le reste. Nous nous sommes préparés pour diagnostiquer, afin de faire des propositions. Nous avons une conscience claire pour le bien de ce pays. L’opposition est prête pour discuter  et faire en sorte que le pays puisse se stabiliser».

Le président de la Cmp revient à la charge : « Vous êtes toujours prêts pour aborder ces problèmes, mais de mon côté, je souhaiterais avoir un peu de temps afin de développer ces trois points. Et puis de voir ensemble pour trouver des remèdes aux maux du pays ».

Dramé réplique : « On n’a pas besoin de temps pour discuter des questions essentielles du pays. Si l’état du malade (le Mali) est préoccupant, je ne vois pas pourquoi on prendra du temps ? s’est-il interrogé. Au regard de la gravité de la situation où l’insécurité mine partout, il est nécessaire d’aller vite ».

Beaucoup d’autres participants interviennent pour meubler la rencontre. Sur la base de tout ce qui a été dit, les deux parties conviennent de la mise en place d’un cadre de concertation paritaire de 12 membres pour discuter périodiquement de thèmes bien précis ; à commencer la paix, la sécurité et la bonne gouvernance. La première véritable rencontre de ce cadre de concertation initialement prévue pour ce samedi est reportée à cause de la visite (en cours) du président IBK dans la région de Ségou.

 

Démarche républicaine

Justement Ibrahim Boubacar Keïta ! L’autre préalable tient à sa disposition à renouer avec l’opposition le fil que lui-même a sectionné en vilipendant Tiébilé Dramé à son retour de la visite d’Etat en France.

Pourtant, entre IBK et l’opposition et la majorité, tout était si bien parti à partir de juin 2014. Le 4 juin plus précisément, le président Ibrahim Boubacar Keïta recevait à Koulouba, les responsables d’une soixantaine de partis politiques de l’opposition et de la majorité. Au cœur des échanges, le chef de l’Etat et les leaders politiques ont échangé sur la situation socio-politique et sécuritaire du pays, notamment les événements à Kidal. En effet, suite à la visite du Premier ministre de l’époque, Moussa Mara, à Kidal, l’armée malienne avait connu une cuisante défaite le 21 mai après que des administrateurs civils eurent été froidement assassinés le 17 mai.

Ce jour-là, la classe politique a salué  une démarche républicaine  et souhaité le maintien d’un tel cadre de concertation.

Toutes les parties étaient visiblement satisfaites au sortir de la rencontre avec le président de la République.

Le chef de fil de l’opposition, Soumaïla Cissé, avait confié à la presse : « Nous avons écouté avec beaucoup d’attention le Chef de l’Etat. Ce qui est sûr, c’est que l’opposition malienne est une opposition responsable, une opposition qui ne va pas manquer de critiquer et de proposer. Nous avons fait remarquer au Chef de l’Etat que nous sommes des maliens à part entière, que nous aimons ce pays profondément, que nous sommes prêts à aider notre pays quelle que soit la situation difficile dans laquelle il se trouve. Mais nous avons besoin d’un cadre d’échange, nous avons besoin de méthode, que nous nous respections les uns les autres et, qu’aujourd’hui, la démocratie malienne a besoin d’une opposition responsable, une opposition forte, une opposition consultée, une opposition respectée. Je pense que le Chef de l’Etat a pris bonne note ; il a donné l’engagement que nous aurons d’autres rencontres. J’espère qu’au cours de ces rencontres, nous dégagerons ensemble un minimum de solutions pour que le Mali s’en sorte. L’étape de Kidal a été une étape très douloureuse pour l’ensemble des maliens, très douloureuse pour nous de l’opposition, c’est pourquoi nous souhaitons que les responsabilités soient clairement situées pour que nous ne retombions plus dans des situations d’humiliation comme celles que nous avons connues le 21 mai dernier ».

Modibo Sidibé, président des Fare Anka wuli, n’en était pas moins réjoui: « Nous avons été conviés par le Président de la République dans un cadre tout à fait démocratique. Il a tenu à rencontrer les partis de la majorité et ceux de l’opposition pour nous faire part d’un certain nombre d’informations sur la situation grave que vit notre pays. Nous saluons le cadre d’échange qui se met en place dans le respect du jeu républicain. Nous sommes tous des maliens, nous sommes tous des patriotes et nous souhaitons tous que nous puissions trouver la solution à la crise actuelle. C’était un premier tour d’informations. Et comme le Président l’a indiqué lui-même, d’autres séances suivront et en ce moment, nous nous prononcerons sur le cas de Kidal qui constitue une préoccupation pour chaque malien. Nous souhaitons vivement que Kidal et l’ensemble du Mali soient dans une dynamique de développement, de stabilité et de prospérité».

Malheureusement, le président de la République n’a pas donné assez de suite à cette initiative louable, même si le relais fut pris par le Premier ministre Modibo Kéïta. Pire, le dialogue fut (définitivement) cassé au retour d’IBK de sa visite d’Etat en France quand il qualifia Tiébilé Dramé de « ce petit monsieur ». Les leaders de l’opposition montent au créneau pour le ramener sur terre. Et IBK semble revenu à de meilleurs sentiments. Selon des indiscrétions, la visite du chef des griots chez Tiébilé Dramé et l’initiative de la Cmp seraient ses idées. Si tel est le cas, on peut encore espérer pour le Mali. Pour l’honneur (enfin) du Mali ! Pour le bonheur (enfin) des Maliens !

Sékou Tamboura

source : L Aube

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