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Opération Serval : La misère et la gloire de l’armée française

Le succès de l’opération Serval contre les djihadistes au Mali est un des plus brillants faits d’armes de l’armée française, justement salué par tous les experts militaires. Le journal de guerre de cette victoire par le commandant du groupement d’hélicoptères de la brigade sur le terrain révèle aussi les graves lacunes de notre outil de défense, usé par des années de réduction d’effectifs et de moyens.

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Avec ce nouveau témoignage sur l’opération Serval au Mali, le colonel Frédéric Gout, commandant du groupement d’hélicoptères présent au sein de la brigade française, nous livre une chronique des opérations et de ses rencontres depuis la capitale Bamako jusqu’à Tessalit dans le nord du pays en passant par Tombouctou. Incontestablement, l’opération Serval a été une réussite. Les djihadistes qui voulaient conquérir le Mali ont été défaits et les soldats français, maliens et tchadiens sont allés les déloger de leurs bases arrière dans le nord du pays. Mais son témoignage en dit surtout long sur l’état de l’armée française et sur ses lacunes révélées crûment par le déroulement de cette guerre menée dans l’urgence.

Dès le début de son récit avec le lancement des opérations, les faiblesses de la logistique de notre armée apparaissent au grand jour. La France souffre d’une pénurie criante d’avion gros-porteurs, et ce malgré l’appui de l’allié américain et la location d’avions de transport Antonov ukrainien pour pallier les déficiences de l’armée de l’air. Frédéric Gout raconte qu’à son arrivée il a dû attendre plusieurs jours ses munitions, alors que l’état-major parisien réclamait à corps et à cri des « reconnaissances offensives » pour localiser et détruire les djihadistes infiltrés près de la capitale malienne. Des ordres que le colonel recevait parfois sur son téléphone portable personnel, faute de matériel  de communication suffisant… ((Photo Yann Péducasse.)

Plus prosaïquement, il n’y a qu’un lit pour deux hommes et aucun WC de campagne, le système D français étant chargé de pallier ces manques criants. Pendant une bonne partie des opérations, l’approvisionnement en kérosène est une épine dans le pied du colonel Gout qui se demandera parfois s’il aura les moyens de faire voler ses hélicos. Le salut viendra finalement de l’armée algérienne qui mettra à disposition des citernes de carburant.

Une recherche permanente d’économies

Le déploiement des hélicoptères de combat Tigre, les plus modernes et les plus redoutables des appareils du groupement aéromobile (GAM) ont également représenté un casse-tête pour le groupement. Il n’y a dans l’armée française que trois lots de déploiement comprenant les outils et les pièces de rechange nécessaires à leur maintenance. Au moment du lancement de Serval, l’un se trouve en Afghanistan, le deuxième au large de la Somalie où les forces spéciales viennent de tenter de délivrer un agent de la DGSE et le troisième au Burkina-Faso où sont basée des forces spéciales pour les opérations dans le nord du Mali. Frédéric Gout doit donc baser ses Tigre au Burkina, entre 500 et 1000 kilomètres des premières opérations.

Autre élément révélateur de la grande misère de l’armée française, la recherche permanente d’économies dans l’utilisation du matériel. Si le nombre d’heures de vol au Mali n’est pas restreint, en contrepartie, les régiments d’hélicoptères restés en France doivent limiter drastiquement les vols afin d’éviter d’user le matériel pour rester dans le cadre étriqué du budget affecté à la maintenance et à l’entraînement des équipages.

L’état-major et les cabinets ministériels poussent des hauts cris

Et quand deux Tigre ont le malheur d’être atteints par des tirs de kalachnikov djihadistes, l’état-major et les cabinets ministériels poussent des hauts cris : comment a-t-on pu laisser endommager ces bijoux de technologie valant près de 30 millions d’euros par des armes de quelques centaines de dollars ? Le colonel Gout devra fournir des explications détaillées sur les circonstances de cet incident et protéger ses hommes de ces remous budgeto-politico-militaires… Libérer Tombouctou est un livre document qui intéressera tous ceux qui veulent comprendre les dessous d’une opération militaire et découvrir l’armée française de l’intérieur. Même si on peut regretter que ce récit ne s’accompagne pas d’une mise en perspective de l’opération Serval dans son ensemble, ce journal de guerre est riche d’enseignements, sur l’excellence de nos soldats et de ceux qui les commandent ; mais surtout il en dit long sur le triste état de l’armée française laminée par les coupes budgétaires des derniers gouvernements de gauche comme de droite.

 

Source: Paris Match

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