Inclusivité ; état des lieux du pays ; chantier du nouveau quinquennat ; ‘’new deal’’, sont les axes majeurs du discours présidentiel, lors de la cérémonie solennelle de prestation de serment, hier au Palais de la culture Amadou Hampâthé BA. Décryptage.
L’état des lieux
Le discours du Président Ibrahim Boubacar KEITA a été fortement marqué par l’état du pays qui reprend les grandes lignes de celui du 4 septembre 2013, au Centre international de conférence de Bamako, lors de sa première prestation de serment. Les engagements gravitaient alors autour des éléments suivants : sauvegarder notre peuple, en ses personnes et ses biens ; faire de la réconciliation nationale la priorité la plus pressante ; restaurer l’Autorité de l’État ; mettre fin à l’impunité, aux passe-droits qui sont à l’origine du dévoiement des institutions judiciaires et étatiques ; mener une lutte sans répit contre la corruption ; bâtir un État fort, impartial ; œuvrer pour que les Maliens retrouvent foi en l’avenir ; bâtir ensemble un Mali nouveau qui sera en mesure d’apporter une contribution significative à l’unification de l’Afrique au cours de ce siècle.
Le Président IBK a résumé hier la situation du pays dont il a hérité : « Il y a cinq ans, nous étions confrontés à une situation catastrophique. Notre armée nationale avait de réelles difficultés à faire face aux envahisseurs. L’intégrité de la terre de nos ancêtres était compromise et souillée par des mercenaires du chaos. La présence de l’État était quasi inexistante dans les régions du Nord, notre économie soumise à des convulsions violentes, la cohésion sociale profondément atteinte, et notre jeunesse était en proie au désarroi. Le péril était à la porte. Le danger menaçait. Le désastre et la catastrophe nous frappaient ».
En droite ligne de ses engagements précédents, le Président nouvellement réélu a rappelé hier la priorité accordée, au cours du premier quinquennat, à la paix et la réconciliation. Dans ce sens s’inscrit l’Accord pour la paix et la réconciliation arraché au bout de 8 longs mois de pourparlers inter maliens. Au nombre des dividendes de cet Accord, depuis sa signature, les Forces de défense et de sécurité ne sont plus en état de belligérance avec les mouvements armés. Mieux, ils font front commun contre le terrorisme.
La sécurisation a été une préoccupation constante du Président IBK depuis 2013. Au cours des 5 dernières années, il l’a prouvé et le rappelle en faisant état des efforts fournis dans le cadre de l’équipement de nos Forces de défense et de sécurité, pour mener une lutte implacable contre la violence extrémiste. Alors que l’Armée s’était écroulée, aujourd’hui elle relève fièrement le challenge de sa mission, en payant souvent le prix fort.
Désormais, IBK peut affirmer que l’État est de retour dans le Nord, notre intégrité territoriale est sauve.
A l’actif du Président IBK, il y a la satisfaction des urgences sociales et économiques. Il faut dire que les différents programmes d’urgences présidentiels, en matière d’eau et d’électricité voire de pistes rurales, a été une véritable bouffée d’oxygène pour les populations bénéficiaires.
L’économie également se porte mieux, a souligné le Président IBK. A l’aune du taux de croissance, en effet, le Mali bien que confronté à de nombreuses urgences est quand même la 3e économie de l’UEMOA, après la Côte-d’Ivoire et le Sénégal.
Le Président IBK n’est pour autant pas triomphaliste. « Aujourd’hui, chacun peut constater la marche vigoureuse et inéluctable enclenchée. Mais nous devons de reconnaître que beaucoup reste encore à faire », nuance-t-il ses réussites.
En effet, des dossiers tels la lutte contre la corruption qui reste un chantier inachevé ou les réformes institutionnelles, mériteraient une attention soutenue pour l’avènement du ‘’Mali nouveau’’ annoncé. Les différents scandales supposés ou réels de ces 5 dernières années interpellent et imposent davantage de transparence dans la gestion des derniers publics.
L’inclusivité
A s’en tenir à cette annonce : ‘’je serai le président de tous les Maliens’’, l’on dirait que IBK ne sort pas des sentiers battus. Ce, d’autant que c’est la Constitution du 25 Février 1992 qui l’impose et que d’autres Présidents ont usé de cette formule avant lui.
Mais, dans le cas présent, elle revêt une portée particulière. Parce que IBK est le Président d’un pays où la dernière élection présidentielle a rouvert des plaies à peine cautérisées, où certains confondent régionalisation et régionalisme… En tant que garant de l’unité nationale, au-dessus des partis politiques, tendre la main à tout le monde, y compris ceux qui ont fait d’autres choix, n’était pas qu’une option pour lui ; c’était une nécessité absolue. D’ailleurs, il reconnaît lui-même que le « pays fait face à de nombreux défis politiques, économiques, sociaux, en ces temps remplis d’incertitudes, et de doute, mais aussi d’espoir, l’unité de la nation n’est plus une option. Elle est une priorité, une urgence même ».
Le chantier du quinquennat
En ce qui est du nouveau bail du Président IBK avec le peuple malien, il est profondément ancré dans le projet de société du candidat.
Nonobstant les progrès réalisés depuis 2012, le renforcement de la cohésion nationale reste le principal défi auquel nous sommes confrontés. Un des piliers de cette cohésion sera l’Accord pour la paix et la réconciliation pour la mise en œuvre de laquelle IBK a exigé une loyauté de tous les acteurs. Il faut dire que les atermoiements ont été fortement préjudiciables à la mise en œuvre de l’Accord.
Le 2e chantier du Président IBK, au cours de cette mandature, sera la lutte contre le terrorisme. Pour cela, il compte s’appuyer sur la pleine opérationnalisation des Forces de défense et de sécurité, en prenant en compte les partenaires du G5 Sahel et en restant ouvert à ceux qui veulent revenir au sein de la République.
Par contre IBK montre un carton jaune à tous les fauteurs de trouble à l’égard desquels il sera « implacable ».
Depuis plusieurs mois, IBK ne cache plus qu’il attache une grande importance à la restauration des valeurs. Naturellement, en 3e position, il en fait un cheval de bataille de la présente mandature, d’autant que de nombreux dérapages sont constatés, à l’instar des fréquents outrages au chef de l’État ; d’accusations infondées contre des prélats de l’église, de propos irrespectueux à l’endroit de dignitaires musulmans… Le contenu de ce point est de ce fait : le respect d’autrui, du bien public ; le travail ; la culture de l’effort ; l’amour de la Patrie…
En quatrième lieu, IBK entend poursuivre la réforme de l’État. Il annonce les changements institutionnels nécessaires et l’opérationnalisation des régions nouvellement créées.
La libération de l’initiative privée, en 5e position, fait partie des chantiers d’IBK. Cela, en boostant l’emploi, l’entrepreneuriat et l’industrie.
En 6e lieu, IBK ambitionne de lutter contre la pauvreté. Il exprime sa détermination en paraphrasant un grand homme de lettres :“ je suis de ceux qui pensent et affirment que nous pouvons détruire la misère”.
En 7e position, faire de la jeunesse la grande cause de ce nouveau mandat, telle est la base de laquelle IBK veut être jugé.
Le ‘’new deal’’
Pour cette nouvelle mandature, IBK introduit une doctrine: l’action rapide. Un principe : la justice. Un objectif : l’intérêt général. Il détaille : « C’est un “new deal” que je vous propose, un contrat de confiance fondé sur le résultat ». Il s’agit indubitablement de la vitesse supérieure dans la satisfaction de la demande des Maliens. Ce nouveau concept a le mérite d’entretenir la flamme de l’espoir dans un contexte où de nombreux éléments incitent au doute quant au ‘’Mali meilleur’’ promis. L’association de tous les Maliens à la réalisation de cette vision nouvelle devrait constituer un atout majeur, parce que c’est ensemble qu’on réussit ou qu’on échoue. D’où la main tendue de IBK à tous ceux qui veulent la réussite du Mali. Dans cette veine, il fait une profession de foi :
Oui, annonçons ce Mali uni, qui célèbre ses différences et avance serein, déterminé ;
Annonçons ce Mali sûr de son avenir, confiant en son grand destin ;
Annonçons ce Mali solidaire et fort ;
Annonçons ce Mali tenace, debout et résilient ;
Annonçons le rêve malien à cette jeunesse qui a soif de réussite ;
Annonçons ce Mali renaissant par l’ambition et l’innovation ;
Annonçons ce Mali où l’État est efficace ;
Annonçons ce Mali des citoyens engagés, civiques, responsables ;
Annonçons ce Mali où nous retrouvons le goût de rêver ensemble, de bâtir ensemble, de construire ensemble, de partager.
Par Bertin DAKOUO
Info-matin