“Nous recevons souvent plus de 1000 visiteurs par jour”
Dans une interview qu’elle a bien voulu nous accorder, la directrice du Pavillon Mali à l’Expo Dubaï 2020, nous parle de sa mission, de la participation du Mali à ce rendez-vous planétaire, de ses impressions sur l’organisation et surtout de la visite de certains officiels, entrepreneurs maliens et étrangers à l’espace dédié au Mali à cette exposition.
Aujourd’hui Mali : Pouvez-vous vous présenter à nos lecteurs ?
Nakana Diakité Prats : Je me nomme Nakana Diakité Prats. Je suis consultante en diplomatie culturelle, soft power, commissaire d’expositions indépendantes. J’ai été désignée depuis le mois de février dernier, directrice du Pavillon Mali à l’Expo Dubaï-2020, en charge de la gestion du Pavillon et de la coordination des équipes projets du Mali à Expo Dubaï-2020.
Quel est l’objectif recherché par le Mali en participant à l’Expo Dubaï-2020 ?
L’objectif recherché par la participation à cette Expo est multiple. Il s’agit tout d’abord de changer le narratif sur la scène internationale, en proposant nos éléments de langage, en réassurant, en affirmant et en présentant un Mali intemporel et non circonstanciel.
Le Mali intemporel est très fort, présent et apprécié. Il est important dans un concert des nations de 192 pays de raconter cela, de le confirmer. A travers l’espace dédié au Mali, le Pavillon Benso Jatiguiya est celui de l’hospitalité, une valeur essentielle de notre société. Donc, nous ne présentons que ce que nous sommes.
Ensuite, il s’agit bien entendu de donner un crédit pour le retour des investisseurs qui n’ont jamais nécessairement quitté le pays d’ailleurs. Il s’agit simplement de rassurer, de réassurer et de permettre un retour de confiance. J’ai l’habitude de dire qu’avant de commencer des affaires, avant de nouer des relations d’affaires, il faut d’abord une relation de confiance et la présence du Mali à Expo-2020 est de permettre cette relation de confiance qui aboutira sans doute à un changement de perception de l’audience globale mais aussi à un changement de la perception des partenaires qui vont avoir un autre regard sur notre pays.
Parce qu’ils vont rencontrer des entrepreneurs de notre pays. Ils vont voir des réalisations qui sont là. Ils vont voir un tissu économique qui tient debout malgré tout. Ils vont voir une population résiliente et c’est par nos actions que nous gagnerons leur confiance et non par nos mots. C’est pour cela qu’il est important d’apporter des projets. Certains projets innovants font déjà des émules à Dubaï.
Egalement, la présence de notre cher pays à Expo Dubaï, c’est de changer le narratif vis-à-vis de nous-mêmes. Il est important que nous nous réapproprions le territoire mais aussi nous réapproprier nos propres valeurs. Le Pavillon Mali est un concentré, un nectar de ces valeurs qui sont proposées et de notre capacité à créer des liens et des ponts depuis des siècles déjà via l’histoire de Mansa Moussa, de notre capacité à créer des richesses, de notre capacité à transmettre notre savoir-être, et notre savoir-faire et nos connaissances, notre science à travers Tombouctou, Djenné et autres lieux de savoir et aussi de montrer toute cette capacité créative et les liens que nous pouvons aussi avoir avec les autres pays dans la sous-région.
Bref, le Pavillon Mali fait ce lien, rappelant que notre pays se situe au cœur de l’Afrique de l’Ouest avec ses 7 frontières, un pays-carrefour, un pays incontournable d’Est en ouest, du Sud au nord et ses liens historiques sont faits avec l’Occident, avec l’Orient, avec l’Amérique avec la sous-région et tout cela renforce son positionnement sur la scène internationale.
Et nous avons beaucoup de visiteurs du Ghana, des pays d’Afrique qui viennent, qui se sentent chez eux. Ça c’est très étonnant et beaucoup de visiteurs d’Orient viennent aussi.
A ce niveau-là, l’objectif est presqu’atteint du fait qu’un visiteur qui n’a jamais été au Mali se trouve une part de soi et c’est en cela que le Mali est intéressant sur la scène internationale parce que chacun y trouve une part de soi, ce que veut dire à quel point le Mali apporte au monde.
Vos missions en tant que directrice du Pavillon ?
C’est d’abord une mission d’interface entre les équipes d’Expo Dubaï et les équipes pays. C’est une mission pivot de transmettre et de pouvoir garantir la bonne exécution du projet Mali mais de pouvoir aussi veiller à ce que la règlementation des organisateurs soit respectée, veiller à ce que les équipes suivent les procédures, il y a beaucoup de techniques en fait. Il y a beaucoup d’opérationnels sur le plan logistique, sur le plan business, sur le plan communication, sur le plan de la curation. Donc, c’est un travail quotidien de coordination permanente.
Il faut avoir en fait une boite d’outils ; on répare, on ficelle, on raccommode. On trouve des solutions. On crée. C’est un travail où chaque pour problématique qui se pose, il faut trouver une solution. C’est un quotidien d’interface, la mission aussi bien entendu, c’est d’être le relais du commissaire général qui est le ministre de l’Industrie et du commerce M. Mahmoud Ould Mohamed, lors des réunions techniques, d’être son relais vis-à-vis des interlocuteurs à Dubaï en tant que commissaire.
A cet effet, c’est un travail de coordination de mise en relation avec les autres pavillons, un travail de diplomatie permanente pour veiller à ce qu’on entende parler de notre pays, de rendre notre pays attractif sur cette scène-là.
Quel regard portez-vous sur l’organisation de cette édition à Dubaï ?
Concernant l’organisation de cette dernière édition, elle est inédite, elle est juste exceptionnelle. Les moyens mis à la disposition pour assurer la visibilité des pays est juste gigantesque. L’accueil est juste exceptionnel, l’Expo-2020 tombe au moment de jubiler des 50 ans des UAE et nous savons que Cheikh Zayed est un visionnaire et cette exposition est issue de sa vision à tous les niveaux.
L’organisation utilise toute les dernières technologiques, toutes les dernières pratiques, c’est-à-dire nous sommes à la pointe de l’innovation et de l’accueil. Je crois qu’il aura un avant Expo-2020 et un après Expo-2020. Ce qui a été mise à la disposition des pays pour les aider à être présents est assez impressionnant, c’est-à-dire ils sont partis du principe que tous les pays par le simple contrat d’assistance devaient être en mesure d’être présents à Dubai et nous sommes dans le cas parce que le Mali a fonctionné le contrat d’assistance. C’est avec ce contrat d’assistance que nous sommes présents en dépit de toute circonstance.
Et c’est la prouesse de Dubaï d’avoir pu réaliser cela, des équipes de l’Expo-2020. Ensuite, concernant notre organisation, je dirais que les résultats sont là. Nous continuons de croire que nous pouvons faire mieux. La venue du ministre de l’Industrie et du Commerce a porté un grand coup d’accélérateur dans la manière de structurer, d’organiser et cela nous a permis de poursuivre ce travail au niveau de Dubai Expo-2020.
Que peut-on avoir dans le Pavillon Mali ?
Le Pavillon Mali est un concentré du Mali, ce qui m’a le plus frappé, c’est la réaction positive de nos compatriotes quand ils entrent dans ce Pavillon. Dans l’espace dédié à notre pays, aucune région du Mali n’est oubliée, il est le reflet du Mali dans toutes sa diversité, sa richesse historique, culturelle, économique…C’est un pavillon où la parole est présente, vivante. On y retrouve le verbe.
Lorsqu’on arrive à l’arche de Gao, on est accueilli par la sentence de Gao, de Tombouctou, idem pour Gao, Bamako… on y retrouve les archives numérisés de Tombouctou, l’histoire de Kankou Moussa, l’histoire du coton ? Nous avons l’application Lenali qui permet de faire commerce en langue nationale, Imapct Hub… C’est un condensé de ce que nous sommes capables de réaliser depuis des siècles qui se trouve dans cette zone avec un regard vers l’avenir.
Y a-t-il de l’affluence dans le Pavillon Mali ?
Oui je dirais qu’il y a affluence car durant les week-ends nous sommes à plus de 1000 visiteurs par jour, ce qui est pour nous un bon chiffre. Quand on vient dans le Pavillon Mali, c’est pour vivre une expérience unique du début jusqu’à la fin de la visite ; c’est ce que disent les visiteurs étrangers.
Au terme de leur visite, ils en sortent différents, régénérés. Ils en sortent avec la sensation d’avoir mis un pied au Mali. Ce vécu qu’ils gardent en eux fait la réussite de ce pavillon. D’ailleurs, nous avons mis des pancartes par-ci par-là avec la mention ne pas toucher ou s’asseoir car quand on rentre on n’a envie de tout toucher, de faire corps avec le Pavillon. C’est pourquoi nous invitons les visiteurs à toucher avec les yeux mais pas les mains.
Avez reçu la visite d’officiels maliens et étrangers ?
Evidemment nous, avons reçu un certain nombre d’officiels, bien entendu notre ministre de tutelle à savoir le ministre de l’Industrie et du Commerce, Mahmoud Ould Mohamed, le ministre de la Communication, Harouna Toureh.
Nous avons aussi reçu la visite de Mossadeck Bally du Groupe Azalaï, d’Ibrahim Diawara d’Ibi Group. Le ministre de l’Education des Emirats arabes unis nous a rendu visite, le commissaire général de l’Union africaine, une délégation du Ghana et plusieurs autres délégations étrangères nous ont aussi rendus visite.
A titre de rappel, le Mali est dans le VIP Tour, qui est une sélection de pavillon sur les 192 qui ont été assistés à concevoir leur projet, ce qui fait que nous avons des visites surprises à tout moment.
Et nous attendons d’autres visites d’officiels maliens et étrangers dans les jours à venir.
Votre mot de la fin
C’est d’abord un mot de remerciement à tous les contributeurs, c’est-à-dire ceux qui ont donné leur corps, âmes, vies et esprit à ce pavillon. Ils sont nombreux, ils ont également laissé une part d’eux à savoir : Oussouby Sacko, président de l’Université Kyoto Osaka au Japon qui est aussi l’un des quinze (15) experts désignés pour l’Osaka 2025, Sékou Kanté de la direction nationale du patrimoine dont le travail et l’archivage ont permis de donner vie à cette parole, de Mamadou Diagne, un personnage clé dans la réalisation du Pavillon, mais aussi dans le choix de la thématique ; de tous nos photographes : Hamza Traoré, Fatoumata Diabaté, Koné, Gold et Thiès qui ont donné cette touche particulière à la façade et à l’intérieur. Ces images nous ravivent. Les visiteurs sont contents et les aiment.
Je parlerais également d’Abdoulaye Konaté de sa très belle œuvre qui fait la synthèse du Pavillon à travers Massa Moussa, notre potentiel culturel, économique. Cheick Diallo, Amaguiré Dolo, tous ont contribué.
Fodé Moussa Sidibé, notre chasseur, les chasseurs ont été présents dans le Pavillon Mali à travers ces idéogrammes gravés dans les murs.
Mon mot de la fin est pour tous les hommes et femmes qui ont œuvré depuis 4 ans pour que ce pavillon voie le jour. C’est un travail collectif, il a fallu des fondations, la construction de la maison, l’habillement et la finition, chacun compte, chaque œuvre compte et de cette œuvre collective nous pouvons être fiers ce jour. C’est aussi le reflet de ce que nous sommes au Mali et je voudrai parler également de Mohamed El Maouloud Ag Amid, un personnage qui n’est plus à présenter à travers son association Timid Wa et ses actes de formations des jeunes et des femmes.
Il a longuement œuvré dans la mise en place du Pavillon en donnant des images. Aujourd’hui, il est notre logistique officielle et membre de l’APPCM en charge de l’approvisionnement du Shop-Mali et le gardien des trésors Mali à l’Expo-2020 Dubaï.
Les mots de la fin sont pour eux parce que chacun dans son domaine a contribué à la réalisation de ce pavillon en donnant le meilleur de lui-même. C’est pourquoi ce pavillon ne laisse personne indifférent.
Réalisée par Kassoum Théra
Source: Aujourd’hui-Mali