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Mohamed Youssouf Bathily alias Ras Bath :« Bob Marley demeure un espoir, une référence morale pour tous les pauvres »

Mohamed Youssouf Bathily alias Ras Bath :« Bob Marley demeure un espoir, une référence morale pour tous les pauvres »

11 mai 1981-11 mai 2020. Cela fait 39 ans que Bob Marley, l’icône de la musique reggae africaine et mondiale est disparue. Dans le cadre de la commémoration de cette date, nous nous sommes entretenus avec Mohamed Youssouf Bathily, porte-parole du CDR et membre de la communauté des rastas du Mali. De l’enfance de Bob, passant par ses combats jusqu’à son décès, Ras Bath nous donne des détails. Nous vous proposons l’interview.

Le Pays : Que faut-il comprendre de la commémoration du 11 mai ?

Youssouf Mohamed Bathily : le 11 mai est une date symbolique, il marque la date de la disparition de Bob Marley décédé en 1981. Comme Thomas Sankara et tous les grands hommes, on commémore chaque année son décès.

Que peut-on retenir de l’icône ?

La commémoration, c’est le fait de se rappeler, se remémorer de la disparition de l’homme. Dans ce monde, deux grandes dates marquent la vie d’un homme. Le jour de sa naissance et celui de sa mort. On se rappelle du départ de cet homme, voire de tout ce qu’il a eu à faire avant sa disparition. Afin de servir de sources d’inspiration et de référence pour des générations. Le passé de Bob vaut un rappel constant pour l’opinion mondiale. Bob Marley demeure une référence pour chaque génération. Le 11 mai nous rappelle la disparition physique de cet homme. Cet appel de Dieu a mis fin à une cohabitation physique, voire au partage de chaleurs humaines. Cet homme dont la vie a été écourtée est une source de quiétude et de bonheur dans le monde. De par ses actions, ses propos, ses ambitions et combats, Bob Marley demeure dans nos cœurs. Nous lui rendons hommage pour tout ce qu’il a eu à faire, à dire, à penser, et à crier pour toute l’humanité.

Pourquoi Bob Marley mérite tant d’hommages ? Pourquoi devrions-nous nous rappeler annuellement de lui ? C’est parce que chaque génération se retrouve en lui. Voici quelqu’un dont la vie ressemble un peu à celle de la majorité des habitants de cette planète. Né d’un père blanc d’origine anglaise (Norval Sinclair Marley) et d’une mère noire en pleine époque du racisme, précisément le 6 février 1945, son père a dû l’abandonner suite à la pression de sa famille. À l’époque, voir un blanc, considéré comme race supérieure aux noirs, s’accoupler avec une femme noire était une sorte d’ascension sociale pour les noirs et une régression pour les blancs. Ce qui a valu au père de Bob d’être déshérité de sa famille. Du coup, Bob s’est retrouvé tout seul avec sa maman à l’âge de 12 ans. Sa maman a dû déménager dans la capitale avec lui. Étant infirmière de formation, sa mère n’a pas eu de boulot. Pour subvenir aux besoins de Bob, payer sa scolarité et le frais de la location, la mère faisait le job de servantes dans la capitale. De cette école, Bob a embrassé l’école de la musique jusqu’à devenir une célébrité.

De la campagne au fils de la servante dans la capitale, Bob passe au rang du héros national. Son ascension montre que tout est possible dans la vie et que tout le monde peut réussir. Bob Marley est la preuve de la possibilité en tout. Sa vie montre que le fils du pauvre n’est pas fait pour être pauvre ni le riche fait pour être riche. Bob Marley a été le premier Africain à recevoir le prix Nobel de la paix au nom de toute l’Afrique grâce à son combat pour l’unité africaine et contre la colonisation. Puisqu’à l’époque Zimbabwe jadis appelé Rhodésie était une colonie anglaise. Le 5 juin 1978, à New York, une médaille de la paix lui a été décernée au nom de toute l’Afrique par l’ensemble des représentants de la délégation africaine des Nations unies. Deux ans avant 1978, il y avait des violences politiques dans son pays (Jamaïque) qui avaient engendré des divisions systématiques des quartiers, familles et du pays. Les deux grands partis politiques jamaïcains ne s’entendaient pas. Lors de l’élection législative de 1972, Marley qui avait vécu dans des quartiers pauvres où il n’y avait pas de soins, d’écoles, d’électricité, et d’eau, a vu ses rêves incarnés dans le programme électoral de Michael Manley. Celui-ci prévoyait la gratuité des soins, l’adduction d’eau dans des quartiers pauvres où vivaient les noirs. Pour l’élection de Michael au poste du Premier ministre, Bob et sa femme ont sillonné toute Jamaïque pendant 1 mois. Ils invitent les gens à voter pour Manley. Cela a été la première fois où les socialistes jamaïcains ont accédé au pouvoir avec la majorité absolue.

Pour contribuer au développement du pays, le 5 décembre 1976, Bob a mis son charisme, sa carrière et son talent de musique en pratique à travers l’organisation d’un concert au parc des héros pendant que le pays était divisé par des violences. L’accès aux fusils et aux drogues était plus facile que celui des nourritures. L’espérance de vie était de 20 à 25 ans dans des quartiers pauvres. La prison était remplie à plus de 2/3 des personnes issues des populations déshéritées. Pendant ce temps, Bob Marley organisait des concerts avec ses propres moyens, appelant les gens à faire taire les armes, à cesser de couler les sangs, et à apporter plus de sourires au lieu de s’entretuer. Le vendredi 3 décembre 1976, en plein concert, des hommes ont tenté d’attenter à la vie de Bob. Malgré qu’il ait été blessé par balle à l’épaule, sa femme au niveau de la tête, Bob a fait son concert le samedi 5 décembre. Il disait que si ledit concert pouvait apporter un peu d’espoir pour faire taire les armes, il serait le plus heureux de mourir à l’issue de son concert en ayant su qu’il a réussi sa mission de maintenir la paix dans son pays. Deux ans après, les mêmes violences ont repris dans le pays. Les autorités politiques et religieuses ont échoué face aux gangs. La seule personne dont tout le monde avait du respect et de l’admiration était Bob Marley.

Les deux grands gangs qui se battaient pour les deux grands partis politiques ont pris conscience en faisant la paix. Le 22 avril 1978, sur l’initiative des gangs sortis de prison, Marley a organisé un concert dénommé « » concert de l’amour ; de la paix ; et de la réconciliation » ». C’est à l’occasion de ce concert qu’il a composé le morceau « One love ». Un an après (1979), Bob vient en Éthiopie où il rencontre des guerriers qui se battaient pour l’indépendance de Zimbabwe. Ceux-ci ont expliqué à Marley l’esclavage des Africains. Touché par l’histoire, Bob a écrit les premiers morceaux de « ’Africa you nate » » dans l’avion lorsqu’il quittait Éthiopie pour Londres. Dès l’indépendance de Zimbabwe, les Zimbabwéens ont dépêché quelqu’un pour remercier Bob pour son morceau dédié au « » Zimbabwe » » qui a beaucoup aidé les Zimbabwéens dans leurs combats pour l’indépendance du pays. Lors de la célébration de l’indépendance, Bob a tenu un concert gratuit pour les Zimbabwéens.

Ras Bath, selon vous, Bob Marley a laissé quoi comme héritage au monde ?

De par son parcours, Bob Marley demeure un espoir, une référence morale pour tous les pauvres, les enfants, et toutes les sociétés. Du fils d’une femme servante à un héros national, son passé montre que tout est possible au monde. De son vivant, Bob Marley a construit un centre de formation pour toutes les couches déshéritées et les aveugles. Chaque année, l’Afrique célèbre le 25 mai, journée de l’OUA, de l’union et de l’unité africaine. Partout où l’on parle des panafricanistes, on parlera de Bob. C’est pourquoi, lorsqu’Alpha Oumar Konaré a été nommé président de la commission de l’Union africaine, il a proposé à toute l’Afrique de retenir la date de naissance de Bob Marley comme la journée africaine de reconnaissance et d’hommage à Bob. L’Union africaine a retenu la date du 6 février comme journée d’hommage à Bob Marley. La fondation Bob Marley est membre du conseil économique et social des Nations-Unies. De par son parcours social, Bob nous a laissé une image de la force de la volonté, à cœur vaillant tout est possible. Du point de vue musical et artistique, Bob Marley a donné une dimension économique, culturelle, politique et spirituelle à l’art. Il nourrissait 400 personnes en 1981 et sa fortune était estimée à plus de 15 millions de dollars quand il disparaissait. Ces concerts ont politiquement contribué à stabiliser son pays. Les chansons de Bob s’adressent à ceux qui font du mal. C’est pourquoi l’UNESCO a dit que partout où l’humanité se rassemblera pour chanter les droits de l’homme ; dénoncer les atteintes ; et réclamer les droits on chante Bob Marley. Les chansons de Bob sont des musiques universelles. En Jamaïque, le premier droit de l’homme est parti de Bob. Il a recruté une avocate uniquement pour défendre les gens qui se retrouvaient en prison pour faute d’avocat. Cela n’existait pas avant lui.

Y a-t-il des raisons qui ont fait que vous n’avez pas pu commémorer la date du 11 mai cette année ?

Cette année, on a commémoré la date. On a consacré plus de trois heures du temps à la radio en commémorant la date. Il y a plusieurs façons de faire le 11 mai. On peut le faire dans le cœur. Célébrer la date ne s’entend pas que par un regroupement. Mais nous jeunes, membres de la communauté rasta du Mali, célébrons le 11 mai par des activités, dont une conférence portant sur l’actualité du pays. Le thème de cette année portait sur la covid-19. Pour la circonstance, des questions ont été posées : Bob Marley qui a risqué sa vie pour son pays s’il vivait en ce moment de coronavirus avec nous allait-il écouter le conseil des médecins, respecter les gestes-barrières ? La réponse est non. Bob n’allait pas contredire les experts en disant que le virus est faux. Vu les mesures en vigueur, nous disons que la covid-19 nous a empêchés de tenir des regroupements pour commémorer la date. Ensemble, prions Dieu pour la fin de la covid-19. Tous, les jours sont des jours de fête. Bob Marley, c’est tous les jours, ce n’est pas que le 11 mai.

Par Mamadou Diarra

Source: Journal le pays- Mali

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