Il y a une permanence dans l’histoire des conquêtes militaires : l’utilisation des gens du cru contre leurs frères. Durant la ruée vers l’ouest aux USA, des amérindiens ont été utilisés comme éclaireurs et combattants par la déferlante guerrière qui a massacré d’autres amérindiens. Durant la conquête coloniale française en Afrique, à partir du Sénégal au XIXème siècle, la progression des troupes coloniales a été facilitée par l’incorporation d’Africains. Des Africains qui se sont illustrés parfois en rivalisant de férocité avec les troupes venus d’Europe contre leurs frères “insoumis”.
Parfois on vendait des armes modernes à certains, comme El Hadj Oumar Tall et l’Almamy Samory Touré. Ces derniers n’avaient pas compris qu’ils faisaient partie d’un jeu macabre dans lequel on les encourageait, à travers le djihad, à affaiblir les résistances. Après avoir semé la terreur et la désolation, ayant joué à fond leur rôle, ils ont été écartés de l’échiquier. En France, sous l’occupation allemande, des miliciens français ont pourchassé les juifs avec un zèle que même le régime nazi n’avait pas demandé. C’est encore et toujours la même recette qui est utilisée. C’est une affaire qui marche, alors pourquoi l’abandonner. Et la françafrique vient d’effectuer une nouvelle pêche miraculeuse : Mohamed Bazoum a mordu à l’hameçon. Et le bonhomme est fort en bouche, c’est du verbeux sardonique, du barreur de petit temps qui a cédé aux sirènes de la françafrique et américafrique. On lui a chanté la bonne parole et tel le corbeau de Jean de la Fontaine et le renard l’a manipulé et jeté contre ses frères du Mali. Alors il grogne, il vitupère contre les nouveaux dirigeants du Mali. Son ministre des affaires étrangères se met aussi à japper, le petit toutou de Bazoum. A leur décharge, nous savons qu’ils n’ont pas inventé l’eau chaude, tout comme certains dirigeants de la CEDEAO, ces velléitaires qui sont acharnés contre le Mali et “oublient” superbement d’autres coups d’État. Les sanctions ne sont pas les mêmes lorsqu’un ancien légionnaire (mercenaire) prend le contrôle de la Guinée. Et ça réclame la tenue d’élections en février 2022 ! Et ça veut rendre gorge à la junte au pouvoir ! Et ça veut faire le Mali à la place des Maliens. Ces jeunes militaires ont donné des signes exceptionnels de patriotisme en très peu de temps : lancement d’un mandat d’arrêt international contre ce criminel de Karim Keïta ; arrestations de personnes qui se prenaient pour de grands vizirs… Dans certaines capitales, on ne veut pas d’Africains panafricanistes et patriotes, on veut du mufle, du lombric… Bazoum ose parler du Mali comme du pays qui met le Niger en danger oubliant que les armes mettant la totalité du Sahel à feu et à sang sont arrivées avec l’assassinat de Mouammar Kadhafi et le largage d’armes en Libye, et par qui ? Ces mêmes qui s’autoproclament “sauveurs” du Sahel. Notre Bazoum n’y voit que du feu, il nous soliloque des balivernes contre le Mali et ses dirigeants en feignant d’ignorer que Nicolas Sarkozy, alors président français et David Cameron, premier ministre britannique, sont les responsables du chaos dans le Sahel. Ils ont imité les étasuniens dans le mensonge qu’ils avaient inventé contre Sadam Hussein en 2003 pour envahir l’Irak sans le mandat des Nations Unies. On se souvient que les services secrets étasuniens avaient donné de fausses preuves d’utilisations d’armes de destruction massive à Colin Powell que ce dernier avait brandi devant le conseil de sécurité de l’ONU le 05 février 2003. Des années après le même Colin Powell disait ceci : ” Ce n’était pas un mensonge délibéré de ma part. Je croyais à ce que je disais. Tout le monde, le Président, les membres du gouvernement et le Congrès y croyaient. Le Président m’a choisi parce que j’étais le plus crédible vis-à-vis de la communauté internationale, mais, encore une fois, je ne faisais que transmettre ce que les seize agences de renseignement disaient. Et je pense que si vous aviez été à ma place et que vous aviez vu les documents que l’on m’a présentés vous auriez cru à tout cela, vous aussi.” Vincent Jauvert, « Colin Powell : comment la CIA m’a trompé », entretien accordé à L’Obs, 1er mars 2013.” Les dirigeants français, anglais et de l’OTAN ont utilisé le même type d’arguments contre Mouammar Kadhafi pour justicier le largage d’armes et l’invasion de son pays en 2011 alors qu’au niveau de l’indice du développement humain (IDH) la Libye était un des tout premiers pays africains. La population libyenne disposait de la gratuité dans bon nombre de services publics, plus que dans des pays développés. Mais les visées panafricanistes, notamment sur une monnaie africaine, de Mouammar Kadhafi étaient intolérables, il fallait l’éliminer d’autant plus qu’il menaçait aussi de dévoiler des secrets sur le financement de la campagne présidentielle en France. Thomas Sankara avait connu le même sort au Burkina Faso suite à ses annonces. Voilà ce qu’en disait Philippe Gélie dans le “Figaro” du 28 juin 2011: ” Constatant, au début du mois de mai, le risque d’impasse militaire, la France a décidé de procéder directement à des parachutages d’armes dans le Djebel Nefousa : lance-roquettes, fusils d’assaut, mitrailleuses et surtout missiles antichars Milan. Jusque-là, les armes acheminées aux rebelles provenaient du Qatar et d’autres émirats du Golfe. Elles étaient convoyées par avion à Benghazi, siège du Conseil national de transition (CNT) à l’Est, puis par bateau jusqu’au port de Misrata, ville côtière prise en étau par les forces loyales au régime. Si l’armée française a décidé de s’impliquer sans intermédiaires – et sans la coopération de ses alliés, même britanniques – dans l’armement des rebelles au Sud, c’est «parce qu’il n’y avait aucune autre façon de procéder», confie une source haut placée. Notamment, les Français sont équipés d’un système unique de largage : amarrée à un petit parachute, la cargaison tombe exactement à l’endroit visé ; à 200 m du sol, une plus grande toile se déploie pour amortir l’atterrissage. Deux aérodromes de fortune Grâce à ces renforts en armement, les rebelles sont parvenus à sécuriser une vaste zone qui va de la frontière tunisienne jusqu’aux abords de Gharian, verrou stratégique à une soixantaine de kilomètres au sud de Tripoli. Le Figaro a pu consulter une carte estampillée «DGSE Confidentiel défense», qui montre les localités de Nalout, Tiji, al-Jawsh, Shakshuk et Yafran comme autant de conquêtes passées aux mains des forces insurgées. Dans ce territoire, les Berbères ont pu aménager deux pistes d’atterrissage de fortune, permettant à de petits appareils venus du Golfe arabique de prendre le relais des livraisons d’armes françaises…” Alors Monsieur Bazoum, il serait souhaitable que vous vous départissiez de cette vision tronquée que l’on vous demande de réciter et que psalmodie aussi votre ministre des affaires étrangères. Ce réflexe de servilité est une marque de fabrique africaine que vous perpétuez de façon grotesque. Depuis l’annonce de tractations entre les dirigeants maliens et la Russie, certaines capitales sont en effervescence. Encore heureux que la compagnie paramilitaire russe annoncée s’appelle “Wagner”, on n’ose pas imaginer les réactions si elle se nommait “Lénine” ou “Staline”. Il ne s’agit pas d’accorder un blanc seing à l’armée russe, mais elle a montré son efficacité et ne s’est imposée à aucun pays. Ce qui est loin d’être le cas des armées qui paradent au Mali depuis 8 ans. Et, de plus, la France a des mercenaires appelés légionnaires dont certains faisaient des coups d’État comme Bob Denard aux Comores et au Bénin. Les USA ont utilisé des mercenaires de sociétés privées en Irak et ailleurs. Lorsque le Mali coopérait militairement avec l’ex Union Soviétique, dans les années 1960 à 1980, l’armée malienne était performante. Aujourd’hui, nous avons des “amis” venus nous aider pour recouvrer la souveraineté sur l’ensemble du pays. L’insécurité se propage, certaines zones du pays sont annexées par ces “amis” avec le consentement de traitres maliens, cette IBKratie et son aréopage d’aigrefins qui tournoyaient autour de Karim Keïta. L’actuel premier ministre du Mali, Choguel Kokalla Maïga a bien annoncé que les avions militaires maliens sont empêchés d’aller au secours de populations attaqués par des assassins au prétexte qu’il s’agit d’un espace d’entrainement de l’armée française. L’opinion internationale l’a entendu. Mais qui a pipé mot? La vie d’un Malien n’est rien pour ces gens qui ne sont là que pour d’autres desseins. Le peuple malien, doit, plus que jamais, soutenir son armée et ces jeunes qui sont au pouvoir pour instaurer la justice sociale, la sécurité des Maliens. Des femmes, enfants et hommes du Mali, du Burkina Faso, du Niger, du Tchad, du Cameroun, du Nigeria tombent sous les armes d’assassins tout le temps, nous n’avons encore entendu aucun dirigeant s’en émouvoir hors du champ africain. A croire que la chose pourrait répondre à une certaine attente, des dessous des cartes. S’agirait-il de préparatifs de prétextes pour une invasion globale? Parfois, la réalité dépasse la fiction, certaines puissances sont capables d’ourdir des stratégies qui effraieraient le diable lui-même. Aux Africains de comprendre et d’éviter de retomber dans les mêmes erreurs. Mohamed Bazoum, parfois quand on comprend nos erreurs, il est trop tard. Les nouveaux dirigeants du Mali ne sont et ne seront jamais les ennemis du Niger. Bien au contraire, votre comportement actuel, de facto, vous réduit à un ennemi de votre peuple. En Afrique de l’ouest, les Burkinabè, Maliens et Nigériens doivent garder une solidarité sans faille et éviter d’écouter les forces centrifuges qui les instrumentalisent.
Yamadou Traoré
Analyste politique
Source: L’Aube