Qui pour nous administrer. Qui vont diriger les autorités intérimaires. Ils viendront de quelle communauté ? Telle semble être la préoccupation fondamentale des populations des régions de Gao, Tombouctou, Kidal, Ménaka et Taoudéni. A la lumière de ces inquiétudes on peut dire sans risque de se tromper que le choix des hommes devant conduire cette période transitoire va poser des problèmes.
En éclipsant le fait de tenir compte des préoccupations des populations dans le choix des hommes, en oubliant de tenir compte des spécificités régionales, locales entre autres, il y a un sérieux risque de rejet synonyme d’un retour à la case de départ.
«Pour éviter les troubles, il serait sage que le représentant du gouvernement qui est le président de l’autorité intérimaire soit un natif de la région avec des relations très solides au sein de la communauté. A Gao on tenterait d’avoir les services de quelqu’un qui connaît la région, qui a la confiance des populations locales. A Kidal, l’Amenokal doit être placé à la tête de cette autorité si les populations n’y voient pas d’inconvénients. A Tombouctou, on peut trouver un arabe très patriote pour diriger l’autorité. Si le gouvernement joue correctement ses cartes et trouve une personnalité forte et respectée dans chaque région pour présider l’autorité régionale, nous ne devons point nous inquiéter. », nous a confié un connaisseur des régions du Mali.
« La mise en place des autorités intérimaires est une façon de légitimer l’autorité des bandits armés qui ont pris les armes contre leur pays. Les populations de Gao et Tombouctou peuvent exprimer leur colère mais elles ne seront pas entendues. D’autant plus qu’elles ne sont pas armées, le gouvernement ne tiendra pas compte de leurs remontrances. Elles verront cette horde de criminels revenir sous un autre label et prendre la place des élus et des administrateurs. Ainsi, les régions du Nord peuvent revivre le martyre, pourvu que l’on ne soit pas inquiété du côté de Bamako.», dénonce un cadre de la région de Gao très en colère contre la façon dont la question les autorités intérimaires est menée.
Pour des raisons de sécurité, les syndicats nationaux ne doivent pas accepter d’envoyer les travailleurs des différents services techniques à Kidal sans la présence effective des forces armées et de sécurité du Mali. Personne ne doit avoir confiance aux rebelles qui écument Kidal. Ce ne sont pas des hommes de parole.
Inutile d’évoquer les postes juteux réservés aux groupes armés à travers les autorités intérimaires. Mais quels postes juteux doivent-ils encore chercher s’ils ont honte après avoir livré des centaines de milliers de nos citoyens à la famine, à la désolation la plus absolue, à la mort ? Les rebelles de la CMA vont mal finir à cause des nombreux crimes contre les innocentes populations. Les autorités maliennes peuvent leur donner tout ce dont ils ont besoin en terme de pourvoir, de privilèges etc. Mais Dieu va punir ces malfaiteurs un jour.
Tout le monde sauf les populations des cinq régions qui se voient imposer ses propres bourreaux au nom d’une réconciliation qui, plus que la guerre, fait des mécontents, des frustrés, des citoyens de seconde zone. Elle tue souvent la réconciliation. Les populations du Nord doivent une fois encore payer le prix du confort du fauteuil présidentiel. Leurs élus seraient plus efficaces que leurs bourreaux pour les gouverner.
S’ils avaient honte ils auraient demandé pardon aux populations des régions nord du Mali et se mettre au travail pour trouver les solutions aux maux qu’ils ont déversés sur elles depuis 2012. Malheureusement, ils veulent toujours plus d’argent et plus de pouvoir à travers le chantage et autres manœuvres politiques.
« Durant ce temps transitoire, toutes les dispositions prévues dans l’accord seront appliquées: le retour des réfugiés, la sécurité, la disposition relative au règlement des lois et voies constitutionnelles doivent être mis en place. Et donc les autorités viennent de remplir maintenant ce vide qui existait depuis 2012. C’est un pas, mais l’application reste encore un autre pas, parce qu’il ne s’agit pas seulement de trouver un texte consensuel, mais il s’agit aussi de pouvoir l’appliquer sur le terrain. », a confié à un média international, Sidi Brahim Ould Sidat, un des responsables de la CMA. Et de reconnaître avec résignation parce qu’il est de mauvaise foi que : « L’application pratique est beaucoup plus difficile que la conception du document. »
De toutes les façons, les populations sont sur leurs pieds de guerre. Elles annoncent s’imposer à la désignation d’anciens chefs rebelles, leurs hommes de mains ou des gens qui n’ont aucun lien avec leurs régions.
Moussa Mamadou Bagayoko
Source : L’Humanité