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Mamadou Sinsy Coulibaly, patron des patrons au Mali sur la gestion de la sortie de crise au Mali : « il faut une action vigoureuse pour sortir de la crise au Mali »

C’est un doux euphémisme de dire qu’il se sent concerné par la crise au Mali. Elle l’affecte tout en affectant sa vocation : le privé. Vous l’avez peut-être deviné, sinon, qu’il s’agit de Mamadou Sinsiy Coulibaly, président du Conseil national du patronat au Mali (CNPM) et professionnel du secteur privé. Son engagement pour le pays est connu et son ambition à faire du secteur privé un lévrier crédible à la croissance nationale est saluée et appréciée par d’autres. Mais comment mener à bien de tels nobles actes pour un pays en situation d’insécurité ?

Il faut, dit-il, une action vigoureuse, portée par un élan patriotique de sortie de crise, sur la base d’une analyse sans complaisance des difficultés de gestion de cette  crise. Une démarche  qui aboutira à un Mali émergent  avec un Etat efficace  et propre, sur une unité nationale fraternelle et confiante. Et cela au grand bonheur de la promotion du secteur privé afin que le business continue toujours au Mali. Car pour ce professionnel du secteur privé, au début de la crise malienne, il n’y avait aucune revendication politique ; aucune volonté de séparation avec la République.

Dans ses somptueux bureaux au siège du Conseil national du patronat, sis à ACI Hamdallaye, en marge des journées de l’entreprise, où le maître mot était à la compétitivité et la croissance, Mamadou Sinsy Coulibaly, a bien voulu nous accorder cette interview-vérité sur la gestion de la crise malienne. Fidèle à sa réputation ; dire ce qu’il pense, l’homme  étonne par la pertinence de ses analyses sur la gestion de la crise sécuritaire  et la cohérence des choix d’actions pour une sortie réussie de la crise au Mali.

La rédaction: Bonjour monsieur le président. Quelles  sont, selon vous, les difficultés de la gestion de cette crise sécuritaire  qui perdure au Mali ?

Mamadou Sinsy Coulibaly (MSC) : Ecoutez, la crise malienne est  inquiétante et trop sérieuse pour être confiée aux seuls spécialistes. Il me parait évident  que  la gestion de la sortie de la crise en cours au Mali se heurte à de nombreuses difficultés qui, additionnées, concourent à déstructurer profondément l’Etat. La prise de conscience, à leur juste mesure, de ces multiples causes négatives est impérative pour qui prétend  porter un remède à cette crise.

 

Justement quelles sont ces multiples causes négatives sur la sortie de crise au Mali ? 

Il s’agit en fait de l’absence d’un consensus national pour la paix, d’un déficit de  volonté politique pour s’approprier de la gestion de la sortie de crise, le manque de coordination des acteurs de la paix, le choix risqué de la recherche du consensus politique et la dimension économique de la crise.

L’un des aspects négatifs de ces multiples causes, qui a très négativement impacté la crise, se traduit bien évidemment par la non fréquentation de la population, entre elle ; du sud au nord du pays. Ni les pouvoirs publics, ni le privé ne peuvent forcément amener ce type d’interaction entre les populations. Ce sont elles-mêmes, de part et d’autres, qui doivent se fréquenter d’autant qu’elles constituent le même segment solide d’une même entité nationale. Et cela, pour ne pas apparaître comme des voisins de paliers, en France notamment, qui entrent en ébullition, dès les moindres disputes circonstancielles.

Nous devons se fréquenter les uns des autres puisque nous sommes les populations d’un même pays.

 

Vous parlez également de l’absence d’un consensus national pour la paix au Mali… ?

L’impossibilité à trouver un consensus national pour la paix du fait du comportement de certains acteurs. On observe volontiers que le comportement de ces acteurs change au fil du temps et des intérêts. On en déduit qu’ils s’activent à autre chose que la recherche de la paix au Mali et donc leur préoccupation est ailleurs alors que la menace terroriste d’inspiration religieuse  pesante s’impose au cœur de la crise sécuritaire au Mali. Voilà une réalité, une évidence qui affecte la sortie de la crise au Mali. Elle est manifestée par une grave insécurité régnant dans le Nord, le Centre  et qui gagne progressivement le Sud. Face à la crise, jamais l’objectif d’unité nationale n’a semblé aussi inaccessible. La priorité numéro un dans la recherche de la paix est avant tout la quête de ce consensus national. Il est fondamental.

 

Qu’en est-il du déficit de la volonté politique pour une sortie réussie de la crise  au Mali ?

On remarque d’abord que le leadership de la sortie de la crise  est entre les mains de la communauté internationale. Pour un Etat souverain, cela pose problème. Si on ajoute  l’absence  d’appropriation nationale de la gestion de la crise, en observant que  les populations se sentent peu concernées, le dialogue devient difficile entre les acteurs nationaux. Dès lors, le déficit de la volonté politique est criard. Ce portage politique, qui devra faciliter l’appropriation de la gestion de la crise, la restauration de la confiance et  l’établissement d’un dialogue constructif, manque à l’appel pour une sortie réussie de la crise.

 

Pourtant, un Accord de Paix a été signé et des mécanismes pour son application ont été élaborés et adoptés !

Justement, le problème de sortie de la crise est l’Accord de paix. Je suis entrepreneur ; pour nous,  toute stratégie qui peine à être appliquée est mal conçue. Je ne suis pas le seul à le relever même certaines  parties prenantes reconnaissent les difficultés d’application de cet AccordOn observe volontiers que  l’inexistence  de la coordination des acteurs de la paix fait engendrer une méfiance entre certains acteurs ; si bien que les relations de collaboration entre les différents acteurs sont difficiles. Quant au choix risqué de la recherche de la paix au Mali, il émane de l’esprit d’Accord d’Alger.

 

Pouvez –vous vous expliquez ?

Oui, dès le départ de la recherche de solution pour la paix au Mali, il a été considéré que la résolution de tous les différends de nature politique soit un incontournable préalable à toute action concrète sur le terrain. Autrement dit, pas d’actions tant que le consensus politique n’est pas trouvé. Dès lors, difficile de réaliser de progrès quand l’Accord de paix  peine à être appliqué. Imaginez qu’au Mali, le terme Azawad, dès qu’il est employé par certains, cristallise les débordements chez d’autres.

Or en fait l’Azawad, comme tel, ne doit poser aucun problème, dès lors qu’il ne vise pas des revendications séparatistes. Dans ma ferme Kledu, je garde des vaches de la race Azawad aussi bien que les vaches Dama, toutes des races prisées pour leur qualité. Des contrées géographiques et culturelles, il en existe partout au Mali, telles que Banico, le Bélédougou, le Khasso, le Ganadougou, le Kénédougou, le Djitoumou, etc. Ces espaces géographiques constituent des aires culturelles, propres à la société malienne et qui renforcent la cohésion sociale, bien souvent facteur de plaisanterie entre les ressortissants des différentes contrées.

 

La question du financement de la gestion de la crise est également une autre difficulté ?

Non, notre pays bénéficie dans son malheur de l’accompagnement de la communauté internationale qui peut être soutenu à travers une capacité réelle d’agir, soutenue par un plan de sortie de crise soutenable par les partenaires et le privé national. La question économique est fondamentale dans l’appréciation de toute solution à la crise d’autant qu’au tout début, les revendications n’étaient pas politiques. Bien au contraire, elles étaient économiques et ne visaient aucune volonté de séparation avec l’Etat.

 

Quel est à ce sujet votre constat ?

En termes de bilan sur la gestion actuelle de la crise au Mali, je pense que, loin de s’atténuer, les contentieux se sont affirmés et multipliés. Le bilan est déjà lourd, la méfiance généralisée a gagné tous les acteurs, et dans ce contexte, le déficit de l’Etat demeure le problème majeur. Aujourd’hui, deux sentiments générateurs  de fortes inquiétudes prédominent au sein  de la population : insécurité et incertitude. Il est urgent de restaurer la confiance à tous les niveaux.

 

Avez-vous un schéma de sortie de crise au Mali ?

Il est important de restaurer la confiance et assurer le volet social pour  tout schéma de  sortie de crise. Voyez-vous, le contexte actuel au Mali constitue un terreau idéal pour les recruteurs des opérations d’insécurité. Une jeunesse oisive, vulnérable ; la femme malienne, en marge de la société et de tout système économique, sont facilement manipulables. Il s’agit alors, d’offrir à cette jeunesse et à cette femme, en situation de fragilité, un environnement sécuritaire sensible qui projette un avenir réel  en termes d’insertion ou de réinsertion.

 

C’est là une possibilité d’intervention du secteur privé… ?

Le secteur privé peut être, dans ce cas, d’un apport vital à condition que sa perception de la crise sécuritaire au Mali soit appropriée ; un des vecteurs de son application dans la recherche de la solution de la crise. Une perception  qui découle déjà sur des pistes stratégiques d’actions, à base de confiance retrouvée dans un climat où le Mali sera au cœur de toutes les activités.

 

Plus précisément, que peut comporter une intervention du  secteur privé dans la gestion de la crise sécuritaire au Mali ?

Le secteur privé peut assurer une mission d’appui de la formation professionnelle, d’insertion ou de réinsertion dans le cadre du défi sécuritaire au Mali. Mais, mener à bien cette mission, indique que les règles du jeu soient clairement définies dans un climat de confiance mutuelle entre l’Etat et les professionnels du secteur privé, sur fond  d’une volonté politique réelle affirmée.

 

Est- ce que les professionnels du secteur privé sont disposés à cela ?

Du côté du secteur privé, la volonté de jouer sa partition dans le défi sécuritaire est manifeste. On est convaincu que la crise, tous comme ses schémas de solution, offre de réelles opportunités de développement du secteur privé. A l’évidence, le patronat, dans sa vision stratégique, ambitionne de mobiliser les efforts internes et externes pour la création de niches  de développement économiques. Des activités qui participeront à la création d’emploi et donc à la lutte contre le chômage de cette jeunesse en situation de fragilité. La mise en œuvre d’une telle vision stratégique indique nécessairement l’accompagnement de l’Etat et l’appui technique des  partenaires et autres experts  mobilisés dans le cadre de la résolution de la question sécuritaire au Mali.

 

Où peut- on vraiment estimer l’apport du secteur privé dans la gestion de la crise au Mali ?

L’apport du secteur privé sera plus judicieux dans le cadre du processus de désarmement,  démobilisation,  réintégration et le cantonnement. Sur ces différents volets,  le secteur privé peut être un acteur stratégique de la solution de la crise sécuritaire au Mali. Par des exemples réussis  ailleurs dans ce domaine, il faut pour cela établir un partenariat  public-privé devant mobiliser le secteur privé pour participer à la sortie de la crise au Mali  avec une mission de formation ou de réintégration.

 

Les ex-combattants seront parties prenantes de ce partenariat ?

Je pense que  l’intervention du secteur privé, pour être efficace, doit être portée par un climat de dialogue pouvant concilier les intérêts : Etat, ex-combattants et entreprise. Le secteur privé  au Mali offre de domaines réels à travers les secteurs de génie civil, le secteur minier, les travaux publics, les services et aussi les secteurs plus traditionnels  comme l’agropastoral ou la pèche. La mobilisation du secteur privé au Mali est possible.

 

Comment peut-on mobiliser le secteur privé, comme acteur stratégique de la gestion de la sortie de la crise au Mali ?

Je parlais de partenariat. Oui, c’est de cela qu’il faut. Un partenariat, à condition de mettre au cœur de l’intervention du secteur privé dans la gestion de la crise au Mali, cette  règle sacrée : la productivité économique, gage de survie de toute entreprise. Aujourd’hui, c’est l’entreprise qui assure avec efficacité la formation professionnelle. On doit se convaincre, qu’ici ou ailleurs, la formation professionnelle a désormais changé de visage. Cela est une réalité du monde moderne, en ce sens de plus en plus, l’entreprise est au cœur de l’apprentissage. Ce n’est plus par le circuit traditionnel ; instituts et autres centres, qu’on assurera la formation professionnelle qui est forcément aujourd’hui l’apanage de l’entreprise.

 

Vous ne pensez pas que cela deviendra plus compliquer ?

Non parce que si le secteur privé doit jouer un rôle dans la  résolution de la crise sécuritaire au Mali, celui-ci doit profiter à son développement, participer à  sa promotion. Il est donc stratégique d’aller à une plus grande implication du secteur privé dans la crise sécuritaire au Mali. Mais, pour cela, il convient que la dimension sociale préserve et renforce la productivité économique et un retour d’investisseur rapide.

 

Que fera alors le secteur  privé une fois cette vision retenue ?

J’engagerai le secteur  privé en tant que président du CNPM. Dans  un élan  pour la patrie en danger. Les chefs d’entreprises pourront ainsi s’engager entre autres sur l’embauche des ex-combattants déjà formés, la formation par apprentissage sur les chantiers en cours, le soutien financier aux programmes spécifiques, l’achat des services fournis par des GIE constitués d’ex-combattants, le conseil ou le parrainage des ex-combattants nouvellement réintégrés.

 

Y a –t-il au niveau du CNPM, un schéma à l’étude pour un tel engagement du secteur privé dans la gestion de la crise au Mali ?

Un schéma est en gestation dans le bureau du patronat du Mali,  il  bénéficie de l’encouragement des partenaires techniques impliqués et de l’intérêt du gouvernement. Nous devons tous œuvrer pour redresser notre pays. Le secteur privé par ma voix s’y est engagé depuis et les chefs d’entreprise sont dans cette dynamique ; convaincus eux que l’insécurité ne sécurise pas l’investissement. Sinon, je persiste et je signe…

 

Pour dire quoi ?

Pour  dire que face au contexte de crise, trois challenges s’offrent au Mali en ce qui concerne le secteur privé. Vaincre sinon éradiquer l’insécurité pour sécuriser l’investissement au Mali. Un challenge ou plutôt un défi pour les politiques, promouvoir et développer le secteur privé pour plus de bien être au Mali, une mission à  nous les professionnels de ce secteur. Des professionnels qui ont appris à relever des défis pour survivre. Ils gardent toujours cette volonté pour le défi sécuritaire au Mali, évitant ainsi  d’accompagner le Mali dans sa disparition inévitable.  Je précise qu’ici le défi est avant  tout national et patriotique.

Il s’agit alors  pour le redressement du Mali suite à une sortie de crise réussie au Mali, une action vigoureuse, portée par un élan patriotique de sortie de crise, sur la base d’une analyse sans complaisance des difficultés de gestion de cette crise. Une démarche qui aboutira à un Mali émergent  avec un Etat efficace  et propre, sur une unité nationale fraternelle et confiante retrouvée dans un climat national sécurisé au grand bonheur de la promotion du secteur privé afin que le business continue toujours au Mali. Une telle action demande une volonté politique dans une vision clairement définie, partagée et appropriée par d’abord les Maliens ; le secteur privé national, les partenaires et la communauté internationale.

 

Une vision qui manque présentement. Autant dire que la paix  au Mali n’est pas pour demain ?

Je ne le dirais pas et je ne désespère pas. Certes, dans le Mali d’aujourd’hui, vivre ensemble est mise à rude épreuve, le contexte social reste fragile. La question sécuritaire persiste, pendant que l’intolérance, la méfiance et le déficit d’écoute demeurent dans un Etat faible, inexistant à certains endroits du pays. Mais, comme dit l’autre, le Mali n’est pas un pays comme les autres, il est retenu et reconnu par tous que, dans quel contexte que ce soit, le Mali a su puiser dans ses valeurs ancestrales pour recoudre le tissu social et retrouver l’entente et la fraternité séculaires très caractéristiques de sa culture.

 

C’est là peut être votre souhait ou plutôt un rêve ?

La prise de conscience collective et individuelle interviendra plus tôt que prévue. Difficile de penser que les Maliens assisteront impuissants le chaos dans leur pays. C’est alors à eux, de prendre rendez-vous avec la paix dans leur pays et pour la paix pour eux.

Entretien réalisé par Gaoussou Kanté

La rédaction

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