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MAMADOU NABOMBO A PROPOS DE SON RECUEIL DE POEME, UNE SECONDE CHANCE : « Toute chose qu’on entreprend et qui échoue peut-être soumise à un second essai »

La jeunesse malienne s’engage de plus en plus dans la poésie et devient de ce fait une héritière des grands poètes d’antan. Mamadou Nabombo est ce jeune poète qui ne manque aucunement des qualités requises pour être qualifié de sage, à travers ses poésies engagées pour le changement en Afrique. Nous avons été cette semaine à sa rencontre pour qu’il nous parle de son nouveau-né, un recueil de poème, Une Seconde chance. Lisez l’entretien !

Le Pays : Qui est Mamadou Nabombo ?

Mamadou Nabombo : Je suis Mamadou Nabombo à l’état-civil. Natif de Mopti en cinquième région du Mali et diplômé d’une maîtrise en sociologie que j’ai obtenue à l’Université des Lettres et des Sciences Humaines de Bamako, (U.L.S.H.B), j’évolue dans le domaine de la littérature depuis plus de 3 ans. En outre, je suis préfacier et co-auteur de deux ouvrages déjà parus à savoir Nous sommes tous africains (Les Éditions de la Fleuvitude) au Congo et Nous sommes Bouba (Gnk Editions) en Côte d’Ivoire.

En parlant de votre recueil de poèmes intitulé « Une Seconde Chance » pouvez-vous nous dire ce qui vous a motivé à l’écrire ?

Les sources de mon inspiration sont diverses. D’une part, j’ai hérité de deux grandes pensées qui m’ont rapidement permis de prendre conscience de la situation chaotique de l’Afrique, à savoir celle de Aimé Césaire selon laquelle : « Ma bouche sera la bouche des malheurs qui n’ont point de bouche, ma voix la liberté de celles qui s’affaissent au cachot du désespoir » et celle du jeune congolais Florian Amaru Kémite, selon laquelle : «Beaucoup se disent fiers d’être africains mais combien font de leur mieux pour que l’Afrique soit fière d’eux ? ». D’aucuns disent que c’est de la pensée de ces deux auteurs que vient mon inspiration. Je suis de leur avis, mais ce serait minime si l’on s’arrêtait là.

D’autre part, de mes observations du quotidien des Africains ressort ce que bon nombre d’entre nous ignorent presque. Et c’est aussi surprenant que les thématiques abordées dans mon recueil de poèmes puissent paraitre en ce siècle où le matérialisme né de la mondialisation et de l’industrialisation fait son parcours écrasant.

Le sous-développement dans lequel nous vivons demande beaucoup de réflexions et doit impérativement avoir des bases aussi bien du côté des oppresseurs que du côté des oppressés que nous sommes. Malgré les énormes potentialités dont regorge le continent africain, la misère, les guerres de successions, politico-militaires et tant d’autres fléaux continuent de nous menacer. Et ce, depuis l’ère des avènements de l’indépendance que l’on croyait libératrice. Les dettes et les aides au développement ne font que gonfler mais jusque-là, les initiatives salvatrices ne sont que des secrets de polichinelle. C’est au vu de ce qui précède que j’ai jugé nécessaire de me mettre dans la peau de mon peuple muselé pour enfin mettre à nu ce que l’autre refuse de dire en face du monde entier d’où mon engagement à aspirer l’émancipation et la liberté du continent africain. Enfin, comme le disait l’ex-président malien Alpha Oumar Konaré » Aux vrais problèmes politiques, il faut de vraies solutions politiques » et il n’y a que les Africains pour résoudre les problèmes de l’Afrique.

Pourquoi le titre » Une Seconde Chance » ?

Ce fameux titre m’était proposé par un aîné de la poésie dont je préfère taire le nom. Après plusieurs consultations, j’ai fini par l’accepter puisqu’il en dit long. Il est assez significatif tout comme l’illustration sur la couverture [La porte d’une maison que l’on s’apprête à ouvrir avec une clef]. L’Afrique n’est pas ce contient qui a connu des moments paisibles dans son existence. Il faut sans prétention aucune se dire que les flétrissures laissées par l’impérialisme ont porté un coup dur à la conscience des Africains. Et c’est à partir des années 60 qu’un vent libérateur qui serait appelé » indépendance » s’abat sur ce continent et qui devait permettre à chaque État africain de voler de ses propres ailes. Mais depuis la soufflée de ce vent libérateur jusqu’à nos jours, il s’est révélé de part et d’autre que l’Afrique est devenue à nouveau un champ de bataille où plus d’âmes crèvent encore. C’est en ce sens que je me suis dit que toute chose qu’on entreprend et qui échoue peut-être soumise à un second essai. Bien qu’on ait eu des remords, j’ai la ferme conviction qu’il est possible d’avoir une Afrique a laquelle nous aspirons aujourd’hui. Il suffit juste de mettre en place de nouvelles stratégies en ce qui concerne notre manière de gouverner nos nations. Et cette seconde chance, l’Afrique en a vachement besoin pour sortir de l’ornière.

Parmi vos poèmes, certains sont dédiés aux grandes figures emblématiques qui ont marqué l’histoire africaine. C’est le cas du poème « Lettre à Madiba ». Quelles sont les raisons qui expliquent votre intéressement à Madiba ?

Je rappelle ici que Nelson Mandela m’a beaucoup marqué de par ses actes. Son héroïsme m’a poussé à lui dédier un poème à titre posthume. Accepter d’être hué et aller en geôle pour toute une nation n’est pas chose aisée. Et lui, malgré que le chemin à parcourir soit long et parsemé d’épines, a su se transcender contre le régime de ségrégation systématique qui existait, en Afrique du Sud, entre les Blancs et les Noirs. Je tiens également à préciser que les bonnes actions menées par un homme qui ne vit plus doivent susciter en nous cet amour de continuer sur sa lancée. Nelson Mandela s’est éteint et la bonne manière d’éveiller les esprits vers la conquête du bonheur tant recherché est de mettre à nu ses bienfaits pour tout un continent entier. Pour moi, Madiba demeure une référence continentale, voire mondiale.

Votre douzième poème « Je le tiens ! Le flambeau », de quoi parle-t-il ?

Mes sentiments personnels à l’égard de ma patrie sont ceux d’un vrai patriote conscient de ses devoirs et prêt à les assumer. Et le poème « Je le tiens ! Le flambeau » en est la parfaite illustration. Dans ce poème, il est question du patriotisme et de la construction nationale. Si les premières heures, c’est-à-dire les années qui ont suivi celles des indépendances ont apporté une certaine tristesse dans le fort intérieur des africains, il faut se dire que ce continent a besoin d’un combat commun, surtout pas de faux fuyants, pour avoir un avenir radieux. Et pour que cet avenir radieux soit une conviction et d’une réalité tangible, tous les citoyens doivent participer de toutes leurs forces à œuvrer pour la construction nationale.

Ce poème est l’incitation à une prise de conscience car aimer sa patrie, c’est veiller sur elle nuit et jour, c’est la défendre contre ses ennemis intérieurs et extérieurs, contre les politiciens démagogues obsédés du pouvoir, contre ceux qui sont prêts à la trahir pour leurs propres intérêts, contre les détourneurs de deniers publics.

Votre poème « Oraison funèbre à toi mon géant ! » est-il adressé à Madiba ? Si non, a qui s’adresse-t-il exactement dans ce recueil de poèmes ?

À travers ce poème, je rends un vibrant hommage aux pères fondateurs tel que Sékou Touré de la Guinée, Thomas sankara du Burkina, Félix Houphouët-Boigny de la Côte d’Ivoire, Modibo Keïta du Mali et j’en passe. Leur mort a laissé un énorme vide au sein des nations africaines. Pour moi, ces illustres hommes restent des modèles à suivre. Et comme la mort les a emportés loin de nous, nous sommes appelés à continuer de semer les douces fleurs qu’ils nous ont léguées en des sentiers poussiéreux. En d’autres termes, ce poème n’est pas une prière en tant que telle, mais plutôt un hommage et un grand espoir en leurs idéaux qui manquent tant aux peuples africains.

À la lecture de ce recueil de poèmes, pouvons-nous nous permettre de croire que vous ne vous désespérez par du destin de l’Afrique ?

« Mon monde d’un demi-siècle », « Le couloir de l’enfer » sont, entre autres, les quelques textes à travers lesquels le désespoir est étalé au monde entier et vous n’êtes pas aussi sans savoir que l’espoir y est également chanté. Vous savez, je ne suis pas cet individu qui croit que rien ne va et que tout est perdu d’avance. Mon optimisme l’emporte toujours. Ainsi, je me suis toujours dit que le destin de l’Afrique est là, tout juste devant nous, fleurissant comme nulle part. J’ose aussi croire que la naissance de cette nouvelle cité est le lieu par excellence de l’oubli des offenses encaissées dans le passé, l’acceptation de l’autre dans sa diversité ethnique, culturelle et religieuse. C’est dans ce sens qu’à travers quelques-uns de mes poèmes tels que « Doux est mon vœu », « Congé d’esprit », « Les retrouvailles » et bien d’autres, j’essaie de concilier les Africains qui se sont créés des torts de part et d’autre.

Quel est l’appel que vous lancez à la jeunesse africaine ?

Je souhaiterais par cet entretien lancer un appel à l’endroit de la jeunesse malienne en particulier et africaine en général. Jeunesse d’ici et d’ailleurs, mais du continent africain, prenons conscience de notre sort qui ne nous honore pas. Nos prédécesseurs se sont battus corps et âme pour que nos nations accèdent à l’indépendance. Et de nos jours, les initiatives salvatrices n’ont pas répondu à toutes nos espérances réelles certes, mais ont permis de lever quelques obstacles majeurs à notre épanouissement. Les vrais défis qui attendent l’Afrique, seule la jeunesse peut les relever. Alors, il est temps, grand temps d’ailleurs pour que cette même jeunesse accepte les sacrifices quelle que soit la manière, mais la plus pacifique par laquelle elle doit passer pour obtenir la totale liberté : indépendance économique, sociale, culturelle, religieuse, militaire et j’en passe. N’acceptons plus d’être les esclaves longuement muselés, aspirons à une meilleure gouvernance basée sur l’alternance, l’équité, la légalité, la justice… Pour finir, je dirai que quand toute une jeunesse se donne la main, il est fort probable qu’une nouvelle lueur s’ouvre à elle.

Propos recueillis par

Fousseni TOGOLA

Source: Le Pays

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