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Malick Sidibé : LA DISPARITION D’UN GRAND MAÎTRE DE LA PHOTOGRAPHIE

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Mondialement connu pour la qualité de ses photos, il a reçu de nombreuses distinctions prestigieuses

Le grand photographe Malik Sidibé est décédé à l’âge de 80 ans dans la nuit du jeudi 14 avril des suites d’une longue maladie. Un dernier hommage lui a été rendu samedi au cours d’une cérémonie qui s’est déroulée sur la place publique de Daoudabougou, son quartier de résidence en Commune V du District de Bamako. C’était sous présidence de Mme Ndiaye Ramatoulaye Diallo, ministre de la Culture, de l’artisanat et du tourisme, en présence de nombreuses personnalités dont le ministre des Affaires religieuse et du Culture Thierno Hass Diallo, de l’ancien Premier ministre Modibo Sidibé, et d’une foule nombreuse de photographes, de parents, d’amis.

Titulaire de la médaille de commandeur de l’ordre national du Mali depuis janvier 2015, hommage lui a été rendu par le colonel Djinguiray Maïga, le grand chancelier.

« Ton œuvre n’est pas à conter, elle est à voir. Ton art n’est plus à contempler, il est à apprendre. Ton nom, ainsi que celui de ton mythique studio de Bagadadji, ne sont plus à découvrir, ils sont à écrire en lettre de noblesse pour la postérité », a souligné Mme Ndiaye Ramatoulaye Diallo pour saluer la mémoire de l’illustre disparu auquel le monde des arts, celui de la photographie en particulier a reconnu le grand talent et lui a rendu les honneurs dus à son rang.

C’est en 1994 que son destin va basculer à l’occasion des premières Rencontres africaines de la photographie de Bamako qui mettent en lumière son travail extraordinaire. La manifestation a aussi permis de révéler Seydou Kéïta qui décédera en 2001. Il a donc fallu attendre près 40 ans pour qu’une bonne partie de l’œuvre de Malick Sidibé soit connue en Europe, aux USA et au Japon. Pour le photographe lui-même, c’était comme une sorte de « rêve éveillé ».

Celui qui a vu le jour en 1936 à Soloba, dans l’actuelle commune urbaine de Yanfolila, a multiplié les trophées et distinctions au point de devenir une star internationale. L’adresse de son studio (Angle 19 de la Rue 30), ouvert dans le plus grand anonymat à Bagadadji en 1962, figure dans les carnets de toutes les grandes galeries et musées du monde. Pourtant, Malik Sidibé n’a fait que des portraits et des images de manifestations de joie au début de l’indépendance. Ces photos sont vendues aujourd’hui comme des œuvres d’art majeures au même titre que les toiles des plus grands peintres du monde.

Malick Sidibé se prédestinait pourtant au dessin et à la bijouterie, deux métiers auxquels il a été formé, de 1952 à 1955, à l’École des arts du Soudan, l’actuel Institut national des arts (INA) de Bamako. La photographie qu’il a choisie par intuition lui a permis d’être consacré comme le premier Africain à remporter le Lion d’or de la Biennale de Venise en Italie en 2007, l’une des plus hautes distinctions en art plastique. Auparavant, il avait reçu le prix international Hasselblad en 2003. En 2009, le prix « Photo España Baume & Mercier » lui était décerné pour son travail de portraitiste. La même année, il remportait le World press photo dans la catégorie « Arts and Entertainment ».

Malick Sidibé s’est impliqué dans la vie culturelle et sociale de la capitale, en pleine effervescence depuis l’indépendance. Devenue une figure incontournable très appréciée par la jeunesse, il était présent dans toutes les soirées où les jeunes découvraient les danses venues d’Europe et de Cuba, s’habillaient à la mode occidentale et rivalisaient d’élégance. En 1957, il était le seul reporter de Bamako à couvrir tous les événements, fêtes et surprises-parties. Le samedi, ces soirées duraient jusqu’à l’aube et se poursuivaient le lendemain au bord du fleuve Niger. De ses reportages de proximité, Malick Sidibé a rapporté des images simples, pleines de vérité et de complicité. Une insouciance et une spontanéité, une ambiance de fête, de jeux, de rires, de vie se dégagent de ses photos.

« Je crois que la photo est la meilleure façon de vivre longtemps après la mort. Tout artiste souhaite communiquer son oeuvre, c’est le propre de l’homme d’être reconnu pour ce qu’il fait », témoignait Malick Sidibé qui développait les photographies de ses sorties nocturnes, puis collait les petits tirages sur des chemises cartonnées pastel. Une fois les références de la soirée annotées à la main, les chemises étaient exposées dans la vitrine de son studio. Les joyeux noctambules passaient ensuite durant la semaine pour s’admirer, faire leur choix et commander des photographies souvenirs.

Plus tard, c’est le portrait commercial en studio qui va constituer la majeure partie du travail de Malick Sidibé. Sa clientèle reste jeune et vient en grande partie de Bagadadji, quartier populaire dans lequel est installé son studio. De nombreux clients passent au studio le soir avant de se rendre dans des clubs du centre ville. Cherchant leur place dans cette nouvelle société malienne, ils veulent, pour la postérité, s’afficher avec leur nouveau costume, leur montre ou leur moto dernier cri, etc. Ils se construisent par la photographie une autre image d’eux-mêmes, inspirée des posters et pochettes de chanteurs à la mode.

Les portraits de studio de Malick Sidibé gardent la spontanéité des reportages qui ont fait sa renommée dans toute la capitale. Ils sont très éloignés des portraits photographiques occidentaux très statiques de la même époque. Plutôt que de poser assis ou de se faire représenter en buste, le modèle semble jouer un rôle, incarner un personnage. Une grande part de liberté semble lui avoir été accordée par le photographe. L’insolite surgit alors parfois de poses incongrues, de postures artificielles.

La lecture et l’interprétation de certaines images sont parfois difficiles. On ne connait aujourd’hui ni l’intention, ni les motivations toutes personnelles des protagonistes. Les légendes attribuées récemment par Malick Sidibé à ces images : « les faux fumeurs », « Avec mon soutien-gorge et mon slip », n’apportent aucun éclairage direct.

Le grand photographe doit être inhumé dans son village natal à une date qui n’a pas encore été déterminée par sa famille.

Y. DOUMBIA

 

Source : Essor

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