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Mali : une société en décadence ?

Voilà un si beau pays qui se désagrège petit à petit à vue d’œil. Aujourd’hui, le Mali est atteint aussi bien « physiquement » que « moralement ». Un grand malade qui s’ignore ou rechigne paradoxalement à la moindre thérapie. Dun côté, le risque de partition avec un territoire national fortement menacé dans sa partie nord malgré cette vraie fausse accalmie, le tout saupoudré d’une bonne dose d’hypocrisie, et de l’autre, l’homme Malien d’aujourd’hui, méconnaissable dans le mauvais sens du terme et en  totale rupture des valeurs qui  jadis faisaient sa fierté et sa dignité.  Pour une fois, arrêtons cette fierté mal placée et ce déni mal à propos et reconnaissons en toute humilité que le Mali est dans la nasse depuis un moment déjà. Ses fondements en tant qu’Etat nation  sont sérieusement entamés, le pays va à vau l’eau et l’avenir de ses enfants est plus que jamais menacé.

drapeau mali vert jaune or rouge couleur flotte

Tout s’est véritablement révélé en 2012 même si avant de sérieux problèmes couvaient. L’échafaudage s’est affaissé à la première secousse : Invasion djihadiste et rébellion touarègue dans le septentrion, (avec pour objectifs  Islamisation du Mali pour les uns, et pour les autres, création d’un Etat autonome), coup d’Etat inqualifiable avec son lot d’exactions, de crimes etc. Le pays divisé en deux, pris en étau par les bidasses voyous et assassins dans sa partie sud et les criminels des mouvements rebelles armés et leurs acolytes djihadistes dans le nord, a failli disparaitre à jamais.  Il a fallu l’aide de la communauté internationale pour « calmer le jeu » dans le nord, mettre hors-jeu les militaires assassins qui comme des charognards s’étaient jetés sur le peu qui restait du Mali pour l’achever à jamais.

L’ordre constitutionnel fut rétabli, les institutions républicaines remises en place et au final l’élection de IBK comme Président de la république. Avec ce que le Mali a subi, arriver à un tel résultat en si peu de temps fut une véritable prouesse et augurait de lendemains meilleurs. Mais hélas, c’était sans compter que le ciel malien n’avait pas encore fini de s’assombrir. Les difficultés s’amoncelèrent à notre grand désarroi, et de solutions, nada !

Aujourd’hui, les choses vont de mal en pis. Le mal Malien est d’une profondeur abyssale. C’est une lapalissade que de dire qu’il y a  problèmes au Mali. Ce qu’il faudrait peut-être ajouter pour ceux qui ne le savent peut être pas,  c’est que le Malien lui-même, est déjà en soi, un gros problème ! Un vrai problème sans jeu de mots, pour pouvoir faire face aux multiples défis qui assaillent le Mali. Corrigeons-nous d’abord !

Une introspection préalable

Autant une bonne équipe en toute chose peut faire des merveilles, autant le miracle ne viendra jamais des bras cassés. Avec de bons Maliens, certainement  un Mali meilleur est possible. Aujourd’hui, le Mali est malade de ses fils. Ce qui arrive à notre pays, est consubstantiel à l’homme Malien, à sa nature, ses agissements. Une constance toute banale est là et qui donne à réfléchir quant à la complexité du problème. Partout où vous passez ou  discutez, les Maliens sont unanimes sur une chose et le disent sans ambages : le Malien est mauvais ou le Malien est capable de tout dans le mauvais sens du terme bien sûr. En langue vernaculaire bambara « Malien magni »  ou  « Malien be son kobèma ». On entend fréquemment  ça partout au Mali et dans n’importe quelle « bouche » sans que ça n’émeuve qui que ce soit, finalement on ne prête même plus attention au sens profond des mots.

Le mensonge, le vol, la corruption, l’inconscience, l’irresponsabilité, la luxure, la méchanceté, l’hypocrisie, l’égoïsme, l’argent-roi, la course effrénée pour le lucre par tous les moyens possibles et inimaginables, les comportements ostentatoires, l’anarchie, le désordre etc. On peut toujours continuer dans l’énumération des maux qui minent notre société actuelle tellement la liste est longue.

Avons-nous cherché à savoir les raisons d’une telle décadence afin d’apporter les meilleures réponses ?  Comment et pourquoi, un pays qui se distinguait par ses vertus, un pays dont les ressortissants étaient reconnus pour leur sens de la dignité, de la bravoure, de la justice, de l’honneur, de l’humanisme se retrouve au bas fond de la déchéance humaine ?

Il est bien connu qu’en sociologie, les évènements impactent très souvent sur le mode de vie d’une société donnée à un moment donné de son histoire ou que le sujet social soit tributaire des influences positives ou négatives qui l’environnent.

Le Mali de ces vingt dernières années a connu un changement de paradigmes dans son évolution politico-socio-économique qui n’a pas toujours été sans conséquences sur son devenir. L’homme dans sa dimension d’être doué de raison et d’intelligence, doit pouvoir s’élever contre toutes formes d’asservissement, d’assujettissement ou d’avilissement susceptibles de lui ôter son statut d’être social libre et détenteur de valeurs immuables.

Le Malien pour sa part, n’a pas su ou pu résister à cette « bourrasque » deshumanisante et destructrice, en porte à faux avec sa tradition et à sa culture multiséculaire. Les conséquences sont là : la société malienne se pervertie, l’homme malien emprunte le chemin tortueux de la déchéance, de la décadence comme si la géhenne s’abattait sur lui. Tout le corps social est atteint comme une métastase. Tout est consommable aujourd’hui au Mali en terme de déviance, et à tous les niveaux : jeunes et vieux, hommes et femmes, riches et pauvres, parents et enfants, patrons et subalternes, civils et militaires, ruraux et citadins, musulmans et non musulmans, dirigeants et citoyens lambda etc. le mal est partout et aucune couche n’est épargnée.

Tant que nous nous comportons de la sorte, tant que nous n’observons pas ce minimum qui veut que l’homme s’autolimite et s’abstient de tomber dans l’infamie, dans le déshonneur, la vilénie, l’indignité, la honte etc. nous resterons toujours dans cette gadoue. L’éducation au sens large du terme ou la rééducation, voilà ce dont le Mali et les Maliens ont urgemment et nécessairement besoin aujourd’hui !

Revenir aux fondamentaux

L’éducation, c’est le socle du développement. Une nation éduquée, c’est la garantie d’un meilleur devenir ! Le Mali a une histoire, une histoire très riche. Le Mali est un pays de culture et il fut un temps, les vertus cardinales liées à l’humain étaient une réalité chez nous. Que ce temps est lointain ! Aujourd’hui, les choses sont tout autres, et le risque d’une déperdition  n’est pas à écarter.

L’ancrage dans la tradition, le respect des valeurs fondatrices de notre société, le savant dosage entre ce qui est, ce que nous avons et ce qui vient d’ailleurs, le tout empreint d’une conscience éclairée quant aux legs faits pour la génération future et même pour notre propre survie, doivent nous habiter en permanence.

Nous sommes tous interpellés chacun en ce qui le concerne. Ce n’est pas seulement l’autre. Interrogeons-nous intérieurement, Suis-je probe ? En quoi je suis mauvais, et que faut-il faire pour m’améliorer ? « bolo ko ni kelen te doni ta » « un seul doigt ne peut pas soulever une charge ». Ce combat est commun et ne nous leurrons pas, tant que la volonté n’y est pas, tant que l’hypocrisie règne, rien de potable ne sera fait !

L’Etat est interpellé et doit insuffler une vraie dynamique de refondation dans le sens d’une réappropriation de nos valeurs d’antan. Mais a-t-il les moyens de sa politique avec ce que nous voyons aujourd’hui ? Le doute est permis. Comme on dit kami ba nièmoko de ton filè. « Les pintades suivent celle qui les guide » Nos responsables doivent au préalable prendre conscience de leur responsabilité et se remettre en question, car il faut le dire, ils ne sont pas sans reproches. Un homme vertueux peut, mais quelqu’un de moralité douteuse, qui n’est pas un modèle d’exemple ne saurait en imposer ! Puisse la grâce divine, toucher nos dirigeants afin que le leadership s’opère !

L’Etat doit initier une véritable stratégie nationale pour un réarmement moral du Malien. Il faut, de façon méthodique et bien ciblée, corriger les failles d’un échec commun. En cela, l’Ecole de la république avec ses démembrements et surtout la famille, cellule de base où l’individu se « façonne » sont les deux piliers sur lesquels toute initiative pérenne doit pouvoir  s’appuyer.

Les parents d’aujourd’hui sont fortement interpellés. N’ont-ils pas reçu une bonne éducation pour laisser leurs progénitures se détruire sans réagir ?  Il y a une trentaine d’années, les choses étaient tout autres. L’éducation était sans faille, donc voir aujourd’hui cette démission collective des parents est affligeante. Aucune excuse possible ne saurait expliquer leur inaction, sauf à repréciser qu’un parent se doit d’être un modèle, un exemple à suivre !

L’école de la république, véritable relais après la famille, constitue l’essence du processus d’éducation de l’enfant. Elle représente l’Etat et avec la famille, constituent la clé de voute dans le parachèvement de la formation intellectuelle et morale du citoyen de demain.

Nos enseignants qui ne font plus rêver tellement leurs comportements jurent avec le principe éducationnel, doivent se ressaisir et revenir aux fondamentaux. Leur rôle est central dans la  « fabrique » du futur citoyen. Un bon enseignant est une chance pour l’apprenant.

Le Mali sera, ce que nous les Maliens voudrons qu’il soit ! Un Mali nouveau est possible pourvu que chacun y mette du sien.

 

Makan DIALLO

Docteur en Droit Privé

 

Avocat inscrit aux Barreaux de Paris et du Mali

 

La rédaction 

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