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Mali : les écoliers, ces autres victimes de la guerre

À cause de la situation qui prévaut actuellement au Mali, près de mille écoles sont actuellement fermées. De quoi impacter gravement l’éducation de nombreux enfants.

 

L’engrenage de ce qui ressemble désormais à une guerre civile a coûté la vie le 23 mars, dans le village peul d’Ogossagou, à 134 personnes, tuées par de présumés chasseurs dogons, selon les Nations unies. Cinquante-cinq villageois ont été blessés, et plusieurs femmes et enfants sont morts assassinés. C’est l’un des massacres les plus importants de ce début de siècle au Mali. Un pays qui souffre des attaques terroristes où les autorités semblent incapables d’enrayer la spirale de violence entre les communautés. Accusées de soutenir les groupes armés en participant aux attaques des djihadistes contre l’armée et les civils, les populations peules sont devenues la cible des Bambaras et des Dogons, organisés en groupes d’autodéfense. Soupçonnée d’avoir perpétré la tuerie la plus sanglante depuis la fin de l’opération française Serval en 2013, l’association Dan Nan Ambassagou que mettent en cause les associations de défense peules a été dissoute au cours d’un conseil des ministres extraordinaire.

Un fort impact sur l’école…

Près de 1 000 écoles sont fermées dans le centre du pays avec un impact, selon l’Unicef, sur 250 000 enfants qui n’apprennent plus rien. Une génération sacrifiée, à l’avenir condamné, sans espoir de peut-être un jour pouvoir exercer un métier nécessitant des études. En 2018, la représentante de l’Unicef Lucia Elimi annonçait qu’un million d’enfants en âge d’aller à l’école n’étaient pas scolarisés dans le pays. Selon elle, la pression sur les filles est encore plus grande, notamment concernant les mariages précoces. « Dans une situation comme celle-là, certaines familles vont marier leurs filles en pensant que cela les protégera davantage. »

 

Le Mali n’est pas le seul pays touché par ce phénomène. C’est au minimum 2 000 écoles qui sont closes, si on compte le Niger et le Burkina Faso, où 10 500 instituteurs ne travaillent plus. Les écoles de brousse ferment une à une, quand elles ne sont pas incendiées par les terroristes qui exigent la « fermeture des écoles françaises ». Un nouveau malheur pour les populations du Sahel prises entre les feux d’une guerre contre le terrorisme et, maintenant, les affrontements entre les communautés.

… alors que la situation s’aggrave de jour en jour

Avant ces dramatiques événements d’Ogossagou, plus de 500 Maliens ont perdu la vie en 2018 dans des affrontements au Mali. Une guerre entre agriculteurs et nomades dans des régions où l’État est absent mais où prolifèrent les groupes terroristes depuis qu’est apparu il y a quatre ans le prêcheur islamiste Amadou Koufa. L’homme cherche dans ses prêches à enrôler pour le djihad de jeunes Peuls pauvres et illettrés, en leur faisant miroiter le salut et la gloire de leur ancien royaume qui s’étendait jadis jusqu’à Tombouctou. Pour unifier par le glaive une « nation » peule qui habite aussi dans les pays voisins du Mali, Koufa a rallié le « Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans », affilié à Al-Qaïda et dirigé par le chef touareg malien Iyad Ag Ghaly.

En novembre 2018, les chefs de l’armée malienne déclarent mort Amadou Koufa à la suite d’un raid des Mirages 2000 français dans le centre du pays. Une information confirmée à Paris par l’état-major et devant l’Assemblée nationale par la ministre des Armées Florence Parly. Une première fois démentie par le chef d’Al-Qaïda au Maghreb, la disparition d’Amadou Koufa apparaît en fait être erronée quand, fin février, il apparaît bien vivant sur une vidéo mise en ligne sur un site islamiste. Le 17 mars, le camp militaire de Dioura, toujours dans le centre du pays, est attaqué par surprise à l’aube par des terroristes. Le bilan est lourd : 26 morts. À Bamako, l’état-major accuse un ancien déserteur de l’armée malienne, l’ex-colonel Ba Ag Moussa, d’avoir organisé ce coup de main. Une information démentie par le chef touareg Al Ghali. Pour lui, cette opération était des représailles « aux crimes odieux commis par les forces du gouvernement de Bamako et les milices qui le soutiennent contre nos frères peuls » conduite par son allié, le prédicateur Amadou Koufa et ses combattants de la katiba Macina.

Le lendemain de ce communiqué, le massacre d’Ogossagou est commis par des miliciens « vêtus en chasseurs dozo », selon les rescapés. Un nouveau camouflet pour le gouvernement malien, qui perd du terrain dans le centre du pays où les civils sont terrorisés. Le président Ibrahim Boubakar Keïta et son Premier ministre Soumeylou Boubeye Maïga décapitent la tête de l’armée. Le chef d’état-major, celui de l’armée de terre et le chef de l’armée de l’air sont limogés. Mais autour de Mopti, les villages vivent dans la terreur. Les enfants sont les premiers concernés. Ils ne sont pas épargnés par les attaques des djihadistes qui tuent sans discernement pour terroriser la population acquise, selon eux, au pouvoir. Les écoles représentent pour les combattants islamistes des représentations du gouvernement qu’il faut détruire. À leurs yeux, point de salut pour ceux qui reçoivent l’enseignement laïque de l’État « impie ». Idem pour les instituteurs sacrifiés au nom du djihad, car ils ne suivent pas la stricte idéologie religieuse. Ils se terrent chez eux ou fuient dans les grandes villes pour échapper à la mort. Le terrain se vide dangereusement.

Par Patrick Forestier

Lepoint

 

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