A quinze jours de la présidentielle malienne du 29 juillet, 4.123.713 cartes d’électeurs ont été enlevées sur 8.000.462 soit un taux de distribution de 51,54%. Notre chroniueur Issa Ndiaye y voit le signe d’une possible désaffection qui pourrait contribuer à la reconduction du président IBK.
On assiste une faible mobilisation des électeurs pour le retrait des cartes d’électeurs à Bamako, épicentre de la campagne. Il en est de même des Maliens de l’extérieur qui sont pourtant parmi les plus actifs sur les réseaux sociaux.
Il faudrait, cependant, se rappeler que les Bamakois ne se sont jamais bousculés pour aller voter, lors des précédentes élections. En dehors de la télé, de la radio et des réseaux sociaux, l’engouement populaire pour la prochaine élection est peu visible.
Discrédit de la classe politique? Ou quête de la survie quotidienne ? Les couches populaires n’ont apparemment pas mordu à l’hameçon des offres des candidats. La criée électorale ne semble pas les attirer, pour le moment.
Une diaspora en retrait
La seconde surprise vient de la diaspora malienne, elle qui a été beaucoup visible dans la campagne contre le referendum constitutionnel rejeté suite au mouvement « An te a banna ». Elle reste aussi bruyante dans la campagne contre le pouvoir. Comment alors expliquer le faible taux d’enlèvement des cartes d’électeurs à son niveau ?
L’agitation électorale perçue un moment à Bamako et au sein de la diaspora, serait-elle finalement une tempête dans un verre d’eau ? Quel sera, en fin de compte, le taux de participation ?
Rien de neuf sous le soleil
Il est vrai que les débats électoraux ont été dès le départ un cocktail d’attaques et d’insultes surtout individuelles. Les débats ont très peu mis en avant les programmes des candidats, par ailleurs peu lisibles et digestibles pour la grande majorité des populations, ce qui semble expliquer leur apathie du moment. Finiront-elles par se réveiller au dernier moment, avec la distribution des billets de banque ? Il est permis d’en douter.
Il faudrait aussi noter que les campagnes ont démarré bien avant la date officielle. Ne sont-elles pas à court de souffle ? A-t-on déjà tout dit ? Les candidats seraient-ils, à présent, à court d’idées ? Ou à court d’argent aussi ? La campagne coûte cher, très cher. D’où viennent tous ces milliards qui circulent dans un pays où les populations ne voient guère le diable passer à plus forte raison lui tirer la queue ?
Du neuf avec de l’ancien
Il est vrai aussi que les candidats les plus visibles sont des vieux routiers de la politique. Leur offre ne parait pas vraiment nouvelle aux yeux des électeurs. Les nouveaux candidats ne semblent pas non plus avoir eu le temps de marquer les esprits. Peut-être se sont-ils laissés entrainer dans les logiques du système en place. Ils ne semblent peut-être pas avoir fait preuve d’innovation dans leur offre politique ?
Plus grave, est-ce finalement l’expression d’un rejet de la classe politique par les populations, rejet perceptible depuis des années, surtout après l’espoir déçu par la gouvernance d’IBK ?
Serait-ce la fin du cycle qui dure depuis la chute de Moussa Traoré et l’avènement de la troisième république ?
Des terroristes discrets
Il reste aussi à crainte que les terroristes n’aient pas dit leur dernier mot. S’ils n’ont pas été capables de perturber lourdement la distribution des cartes d’électeurs dans le centre et le nord du Mali, peut-être, tenteront-ils leur va-tout à la veille ou le jour même de l’élection. Leur capacité de nuisance pèsera-t-il suffisamment pour dissuader les électeurs d’aller voter ?
En l’état actuel des choses, le pouvoir ne serait-il pas en train de gagner son pari ? Les semaines à venir nous édifieront.