Les dirigeants africains ont condamné hier les quatre coups d’État sur le continent, lors du sommet annuel de l’Union africaine (UA), où les discussions sur l’accréditation controversée d’Israël à l’organisation ont été reportées.
Les coups d’État qui ont secoué le continent durant l’année écoulée – le dernier au Burkina Faso il y a deux semaines – étaient un des sujets incontournables de l’agenda chargé de ce sommet, organisé dans la capitale éthiopienne Addis-Abeba.
La réunion du Conseil de paix et de sécurité de l’UA a été l’occasion pour les dirigeants africains de « condamner sans équivoque (…) la vague de changements anticonstitutionnels de gouvernements », a déclaré dimanche son responsable Bankole Adeoye. L’UA « ne tolérera aucun coup d’État militaire sous quelque forme que ce soit », a-t-il ajouté, soulignant qu’« à aucun moment dans l’histoire de l’Union africaine, nous n’avons eu quatre pays suspendus en 12 mois : le Mali, la Guinée, le Soudan et le Burkina Faso ».
Dans un discours samedi, le président de la Commission de l’UA, Moussa Faki Mahamat, avait également évoqué la « funeste vague » de coups d’État et pointé des « liens de causalité connus » avec le terrorisme.
Controverse repoussée
L’UA a en revanche choisi de ne pas afficher ses dissensions sur le sujet hautement sensible de l’accréditation d’Israël. Cette décision prise en juillet par Moussa Faki divise l’organisation. Plusieurs pays membres, dont l’Afrique du Sud et l’Algérie, s’en sont indignés, estimant que ce choix va à l’encontre des déclarations de l’organisation soutenant les territoires palestiniens. Les deux pays ont fait pression pour inscrire ce sujet à l’ordre du jour du sommet. Un débat prévu dimanche après-midi a été « suspendu », ont indiqué des sources diplomatiques, et un comité va être créé « pour étudier la question ». Ce comité comprendra l’Afrique du Sud et l’Algérie, mais aussi le Rwanda et la République démocratique du Congo, qui soutiennent la décision de M. Faki, ainsi que le Cameroun et le Nigeria, selon les diplomates interrogés.
Le ministère israélien des Affaires étrangères a estimé de son côté que l’UA « a rejeté les tentatives de l’Algérie et de l’Afrique du Sud de révoquer l’acceptation de l’État d’Israël en tant qu’observateur », dans un communiqué indiquant que les conclusions du nouveau comité seront connues lors du prochain sommet de l’UA en 2023. Ce report repousse l’éventualité d’un vote qui, selon de nombreux analystes, aurait pu provoquer une scission sans précédent dans l’histoire de l’UA, qui fête ses 20 ans. Dans un discours samedi, le Premier ministre palestinien Mohammad Shtayeh avait demandé aux dirigeants africains de retirer cette accréditation. Moussa Faki avait, lui, défendu son choix et appelé à « un débat serein ». Il a assuré que l’engagement de l’UA dans la « quête d’indépendance » des Palestiniens était « immuable et ne peut que continuer à se renforcer ». Mais l’accréditation d’Israël peut constituer, selon lui, « un instrument au service de la paix ».
Efforts de paix en Éthiopie
Il n’est pas clair si le sommet, dont la plupart des sessions se sont déroulées à huis clos, a abordé la question de la guerre qui fait rage dans le pays hôte. Le nord de l’Éthiopie est ravagé depuis 15 mois par un conflit entre forces progouvernementales et rebelles du Front de libération du peuple du Tigré (TPLF), qui a fait des milliers de morts et, selon l’ONU, mené des centaines de milliers de personnes au bord de la famine. Bankole Adeoye a assuré que « toutes les situations de conflit étaient à l’agenda du sommet ». L’UA, dont le siège se trouve dans la capitale éthiopienne, se trouve dans une position particulièrement délicate. M. Faki a attendu août dernier – soit neuf mois après le début des combats – pour nommer l’ancien président nigérian Olusegun Obasanjo comme envoyé spécial chargé d’obtenir un cessez-le-feu. L’Éthiopie a également continué à siéger au Conseil de paix et de sécurité de l’UA durant le conflit. Elle n’a pas toutefois été reconduite pour un nouveau mandat, ont indiqué des diplomates. M. Adeoye a estimé hier qu’il n’était « pas vrai » que l’UA a été lente à réagir. « Il était impossible que l’UA ne s’engage pas dans une telle situation, étant donné précisément sa situation en Éthiopie », a-t-il affirmé, soulignant le rôle de « la diplomatie discrète, des navettes diplomatiques, qui ne peuvent généralement pas être rapportées ».
Source : AFP