Selon le classement de Reporters sans frontières (RSF) de 2014, le Mali a fortement régressé dans le cadre de la liberté de la presse. Le pays occupe la 122ème place sur 180.
Lors du classement de 2013, le Mali a perdu en un an 74 places et est passé du 25e au 99e rang. Cette année, il perd 23 places. Cette chute est due à la situation dans laquelle le pays a sombré depuis 2012. Le conflit au nord du pays s’enlise et empêche une véritable reprise des médias estime RSF. Les journalistes ont éprouvé de grandes difficultés à accéder à l’information, notamment en zone de combats, depuis le début de l’intervention militaire en janvier 2013. C’est pour cela que RSF avait appelé les autorités maliennes et françaises à autoriser les journalistes à couvrir librement les opérations militaires. “’Zéro image’, objectif médiatique atteint pour l’opération Serval”, avait déclaré Christophe Deloire, secrétaire général de Reporters sans frontières. “En période de conflit, c’est aux journalistes et à leurs médias, et non aux militaires, de déterminer les risques qu’ils sont prêts à prendre dans la collecte de l’information”, a souligné l’ONG. L’organisation a précisé que le public ne peut se satisfaire des informations et images récoltées sous contrôle militaire ou directement transmises par l’armée”.
Interpellation et arrestation
Reporters sans frontières a également dénoncé les interpellations de plusieurs journalistes étrangers et l’agression de l’un d’entre eux, le 8 février 2013, à Bamako. Les “bérets verts”, les gendarmes et la garde nationale ont délibérément mis à l’écart les journalistes, témoins gênants, pour empêcher la circulation d’images compromettantes pour les nouvelles autorités. Le 31 janvier, deux journalistes de la chaine française France 24 avaient vu leur matériel saisi par les renseignements militaires alors qu’ils couvraient une manifestation de “bérets rouges” demandant leur réintégration dans l’armée malienne.
En mars 2013, le directeur de publication du quotidien privé « Le Républicain », Boukary Daou a été emprisonné près d’un mois pour avoir publié une lettre attribuée à des soldats, dénonçant les avantages financiers accordés par le président de la transition Dioncounda Traoré au capitaine Sanogo, à l’origine du coup d’Etat du 22 mars 2012.
Assassinat
Ghislaine Dupont et Claude Verlon étaient venus au Mali dans le cadre de la grande opération spéciale que préparait Radio France Internationale les 7 et 8 novembre 2013 à Bamako. Le samedi 2 novembre, au sortir d’un entretien au domicile d’Ambéry Ag Ghissa, membre du MNLA, ils ont été enlevés par des hommes armés. Leurs corps sans vie ont été retrouvés à 12 kilomètres du lieu du rapt. La date du 2 novembre a été décrétée par les Nations Unies, Journée internationale pour la protection des journalistes.
Le Classement mondial de la liberté de la presse 2014 publié par Reporters sans frontières révèle une dégradation importante de la situation dans des pays aussi divers que les États-Unis, la République centrafricaine et le Guatemala, et à l’inverse des améliorations sensibles en Equateur, en Bolivie et en Afrique du Sud. Si la Finlande, les Pays-Bas et la Norvège constituent une fois encore le trio de tête, le Turkménistan, la Corée du Nord et l’Érythrée demeurent les pires trous noirs de l’information.
Un classement qui s’articule autour de sept indicateurs
“Outil de référence, le Classement mondial de la liberté de la presse de RSF s’articule autour de sept indicateurs : le niveau des exactions, l’étendue du pluralisme, l’indépendance des médias, l’environnement et l’autocensure, le cadre légal, la transparence et les infrastructures. Il place les gouvernements face à leurs responsabilités en permettant à la société civile de se saisir d’une mesure objective et fournit aux instances internationales un indicateur de bonne gouvernance pour orienter leurs décisions”, observe Christophe Deloire.
Le classement de cette année d’après RSF, souligne la corrélation négative entre les conflits armés et la liberté de l’information. En contexte d’instabilité, les médias constituent des objectifs et des cibles stratégiques pour les groupes ou individus qui tentent de contrôler l’information en violation des garanties apportées par les textes internationaux.