«J’ai identifié neuf chefs terroristes. On m’a conseillé de libérer des prisonniers que j’ai directement reçus (après leur libération) au palais de la présidence parce que je cherche la paix » ou encore « Je ne ménage aucun moyen. J’ai libéré sept à huit personnes détenues dans les prisons de Kollo (Sud), de Koutoukalé (prison de haute sécurité) et j’ai plein d’émissaires dans toutes les zones (…) j’ai essayé des réconciliations dans les villages, je me débrouille comme je peux ». C’est par ces mots que le président nigérien, Mohamed Bazoum, a justifié la libération de neuf chefs terroristes, après les avoir reçus au palais présidentiel.
Cette décision n’a certainement un autre but que celui de se sauver la peau, surtout au moment où les attaques terroristes sont devenues de plus en plus récurrentes contre les civils et les forces armées nigériennes avec leurs corollaires de morts. Sinon, il est difficile de comprendre qu’au moment où la force Takuba est annoncée au Niger, le président Mohamed Bazoum libère publiquement ces chefs terroristes. D’ailleurs, une source de la présidence nigérienne a confié à notre confrère ‘’Jeune Afrique’’ que «ces libérations sont les premières du genre publiquement divulguées dans le cadre de la recherche et la restauration de la paix au Niger depuis le début des attaques terroristes en 1995 et elles concernent des membres de mouvements terroristes, dont Boko Haram.»
Il faut le dire, cette démarche est tout à fait contraire aux principes du président français, Emmanuel Macron, qui n’avait jamais donné la chance au Mali de négocier avec ses chefs terroristes. Mieux, il avait inscrit les noms d’Iyad Ag Ghali et Amadou Koufa sur la liste noire et le Mali s’était vu dans l’obligation de suivre cette consigne à la lettre. Sauf que neuf ans après, les mêmes personnes sont toujours vivantes.
Aujourd’hui, si le président nigérien décide de prioriser l’option dialogue avec les groupes terroristes de son pays, cela veut aussi dire que la France doit encore patienter. Seulement à la différence avec le Mali, au Niger, il existe deux fronts qui n’ont pas forcément les mêmes modes opératoires. Dans le Sud-Est proche du Nigeria, c’est le groupe nigérian Boko Haram et l’État islamique en Afrique de l’Ouest qui s’y opèrent et attaquent non seulement les forces armées et de sécurité du pays, mais surtout les populations civiles. Au Sud-Ouest, vers la frontière avec le Mali et le Burkina Faso, il s’agit de l’État islamique (EI) et de l’Al-Qaïda qui ont d’ailleurs recruté beaucoup de jeunes nigériens. Ces deux groupes sont plutôt hostiles aux forces armées et de sécurité nigériennes.
Actuellement, ce sont quelque 12 000 soldats nigériens qui combattent dans une dizaine d’opérations anti-jihadistes dont la dernière s’appelle ‘’Niya’’ (volonté en langue locale). Cette opération a été montée en février 2022 avec environ 2 160 hommes qui opèrent dans le sud-ouest, près du Burkina Faso.
La vérité, c’est qu’un compromis peut être trouvé entre le gouvernement nigérien et les groupes terroristes pour instaurer une accalmie, mais cela ne saurait durer longtemps. Pour la simple raison que l’Etat nigérien pourrait être difficilement en mesure de satisfaire toutes les exigences de l’ensemble des groupes armés terroristes, et quoi qu’il en soit, ces mesures que l’on pourra aussi appelées ‘’trêve’’ ne peuvent que donner le temps et le moyens à ces terroristes de s’organiser et de s’implanter davantage. Donc, le président Bazoum doit également comprendre que négocier avec ces terroristes étant en position de faiblesse peut avoir des conséquences énormes pour son pays.
Ousmane BALLO
Source : Ziré