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L’évolution de la gouvernance et de la situation du Mali depuis 1968

La régionalisation et l’ethnitisation doivent être gérées avec beaucoup de prudence pour ne pas servir de base à une division irréversible du pays. Sous Modibo Keita le brassage ethnique et régional était une politique nationale. Les Kayesiens étaient mutés à Gao, ceux de Tombouctou à Sikasso, etc. Tout était fait pour que chacun se considère comme malien d’abord avant toute autre chose.

 

Le féodalisme et les castes étaient combattus, car on voulait réaliser l’égalité de tous les Maliens avec les mêmes avantages et les mêmes obligations. L’œuvre prioritaire et la plus importante était la construction d’une nation malienne ; d’où la devise « Un Peuple, Un But, Une foi ». Bâtir une nation était vu comme un processus à long terme qu’il fallait entretenir et enrichir de façon permanente.

Après le coup d’État de 1968, toute cette politique a été abandonnée. Nous sommes depuis rentrés dans une phase de navigation à vue. Le processus de « nation building » a été abandonné au profit de la recherche du gain facile et du pouvoir. La seule chose qui compte c’est avoir de l’argent et le pouvoir et quels que soient les moyens utilisés.

L’enseignement qui était aussi une grande priorité a été relégué au second plan. Les enseignants et les étudiants étaient considérés comme les ennemis des militaires (une sorte de lutte de classes). Il fallait donc les punir. Arrestations et emprisonnements étaient devenus la règle. La construction de classes et l’amélioration de la vie des enseignants ont été réduites ou freinées. La vie des enseignants était devenue si difficile que les parents refusaient de donner leurs filles en mariage aux enseignants. C’est pendant cette période que le Mali a connu la fuite de cerveaux la plus importante. Les bons enseignants ont fui en grand nombre vers la Côte-d’Ivoire et le Gabon notamment.

Du côté de l’Armée, ce sont les critères d’avancements de grade et de recrutements qui ont été changés. Ils ont été politisés, népotisés et rendus plus subjectifs et cela continue encore.

Une politique de libéralisation et de privatisation de l’économie mal conçue et mal appliquée sous la pression des Institutions de Breton Wood est venue aggraver l’affaiblissement de l’État. Un État qui n’arrivait même pas à payer régulièrement les salaires des fonctionnaires.
C’est dans ce contexte qu’est venue la démocratie pluraliste. Avec un État déjà affaibli et qui fait face à de nombreux problèmes, elle n’a pas su non plus jusqu’à maintenant redresser la situation, car les injustices, la corruption et l’impunité ont continué de plus belle. L’éducation et la santé ont continué à se dégrader. Le terrorisme, la rébellion, les influences extérieures, l’insécurité généralisée et la pandémie du Covid-19 sont venus s’ajouter à tous les problèmes précédents que j’ai cités plus haut.

Voilà comment ont commencé les problèmes du Mali. La descente aux enfers a commencé avec le régime de Moussa Traoré et continue toujours. Après Moussa Traoré c’est la corruption, l’impunité et les influences extérieures qui ont succédé.

Depuis 2012 sont venus s’y ajouter le terrorisme, le séparatisme, la mauvaise gouvernance et la pandémie du Covid-19.
Quel parcours difficile pour un pays pauvre comme le Mali. Malgré tout, l’espoir est toujours permis, car le Mali possède de nombreux atouts à commencer par les ressources humaines (population composée en majorité de jeunes très créatifs et très courageux) et s’y ajoute les autres ressources naturelles (soleil, eau, terres fertiles, sous-sol, etc.) Tous les ingrédients pour faire du Mali une économie émergente, très compétitive (en agro-industrie notamment) capable de jouer un rôle majeur dans la sous-région, en Afrique et dans le monde.

HAROUNA NIAMG

Source : Info-Matin

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