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LEVEE DE LA SUSPENSION DES ATTRIBUTIONS FONCIERES : La voie ouverte à la spéculation

Les attributions foncières suspendues depuis 3 ans ont été levées au conseil des ministres du mercredi 10 août 2016. Si les agences immobilières, les géomètres, les mairies et des particuliers ont poussé un ouf de soulagement, la levée n’est pas sans conséquence. A cause de la nouvelle mesure d’augmentation des prix de cessions de parcelles qui ont tout simplement pris l’ascenseur, la spéculation foncière a de beaux jours devant elle.

mohamed aly bathily ministre Domaines etat Affaires foncieres apm conference

En plus des douanes et des impôts, le service des domaines fait partie des services de l’assiette. Même s’ils ne contribuent pas à la même hauteur que les deux premiers cités, son apport au trésor public n’est pas à négliger.

Les trois ans de suspension n’ont visiblement pas créé des émois que dans les rangs des principales cibles que sont les spéculateurs fonciers. L’Etat, à travers ses caisses, a subi de graves dommages. Pour les réparer, les domaines misent sur une rentrée d’argent à travers deux nouveaux décrets fixant les prix de cession et d’attribution de terrains urbains et ruraux du domaine privé immobilier de l’Etat. Ils concernent les terrains à usage commercial, industriel artisanal, scolaire, de bureau, d’habitation et assimilés. Il s’agit du décret n°2015-0537/P-RM du 6 août 2016 portant fixation des barèmes généraux de base de cession, des redevances des terrains ruraux appartenant à l’Etat et la détermination de la procédure d’estimation des barèmes spécifiques et celui n°2015-0538/P-RM du 6 août 2015 fixant le prix de cession et de redevance qui abroge le décret n°02-114/P-RM du 6 mars 2002.

Pour se rendre compte de l’augmentation effrénée des prix de cession, il est loisible de constater les changements intervenus au niveau du prix de cession des concessions rurales.

De 0,25 ha à 05 ha, le prix de cession pour le titre foncier passe de 300 000 F CFA/ha à 3 000 000 de F CFA l’ha. Bamako et Kati, deux zones en vue en matière foncière n’échappent pas à la nouvelle donne. A Bamako, une parcelle à usage commercial passe de 10 600 F CFA/m2 à 21 200 F CFA/m2, le terrain à usage d’habitation ordinaire qui était de 1 060 F CFA/m2 est désormais de 5 000F CFA/m2. Dans le cercle de Kati, les mêmes parcelles passent respectivement de 2,985 F CFA/m2 à 5 970 F CFA/m2 et de 320 F CFA/m2 à 5 000 F CFA/m2.

Ces deux décrets pris pour renflouer les caisses de l’Etat ne vont pas dans le sens de la lutte contre la spéculation. Si l’on prend le cas du foncier rural, à l’ancien prix (300 000 F CFA/ha), les paysans avaient du mal à transformer leurs parcelles en TF. Ils étaient contraints de morceler leurs propriétés et de les brader aux plus nantis. Ce n’est pas à 3 millions de F CFA l’ha pour quelqu’un qui en possède 100, qu’il peut faire face à ces dépenses. De même, la spéculation foncière a pris de l’ampleur parce que le foncier, devenu ces derniers temps un bien rare, rapporte gros. De telles augmentations de prix ne sont pas sans conséquences.

Les activités de nouvelles attributions qui étaient gelées sur toute l’étendue du territoire national, l’argent généré à cet effet se faisait désirer. Après une première suspension de 6 mois décrétée le 6 août 2014 et prorogée le 2 mars 2015 par arrêté interministériel n°2015-0205, le conseil des ministres a levé la mesure, qui avait été dénoncée en son temps par des corporations dont l’Ordre national des géomètres agréés du Mali qui voyait ses activités menacées de disparition.

Alors que le ministère des Domaines de l’Etat et des Affaires foncières a été incapable de faire le bilan de ces 3 années de suspension bien que cela avait été demandé par le Premier ministre, le constat est loin d’être reluisant. La suspension d’attribution de terrain du domaine immobilier de l’Etat et des Collectivités territoriales en plus d’avoir appauvri l’Etat, est loin de freiner la spéculation foncière pour laquelle elle avait été initiée. Elle a au contraire créé une nouvelle race de spéculateurs fonciers jusque dans des zones rurales. Certains jeunes ruraux en ont fait une activité lucrative. Encouragés en cela par le ministre des Domaines de l’Etat, Me Mohamed Aly Bathily, qui crie sous tous les toits d’avoir annulé des titres fonciers (sur fonds de campagne et de règlements de comptes personnels), des villageois s’en prennent à des titres fonciers régulièrement acquis qu’ils morcellent et vendent sous prétexte de propriétés coutumières.

De nombreux litiges y afférents ayant fait morts d’hommes sont pendants devant les tribunaux. La suspension qui a exacerbé les conflits domaniaux met l’Etat devant ses responsabilités.

A.Dicko

 

Source: lesechos

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