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Lette ouverte de son excellence Monsieur Ibrahim Boubacar Keita, président de la République du Mali

Excellence monsieur le Président,
Si la légalité et la légitimité se rencontrent dans certains contextes, la légalité est obligée de faire profil bas. Car le pouvoir appartient au peuple souverain qui décide de le confier ou de le retirer à qui il veut à travers le recours démocratique et républicain (vote).

Excellence monsieur le Président, dans le contexte actuel, la renonciation à un deuxième mandat est plus sage que l’humiliation en sortant par la petite porte. J’aurais été à votre place, je renoncerai à un deuxième mandat pour le bonheur, la dignité et l’honneur des Maliens et des Maliennes, et ce, depuis votre élection à la tête de l’Etat Malien en 2013, votre gouvernance est émaillée de supposés scandales financiers à scandales financiers face au silence anodin d’un peuple meurtri dans la pauvreté, la maladie, la faim, etc. sans aucune alternative de la part de votre pouvoir moribond et agonisant.
Monsieur le Président, vous avez été plébiscité à la magistrature suprême avec plus de 77% des Maliens qui vous ont reporté leurs voix lors du 2ème tour du scrutin présidentiel de 2013 face à l’honorable Soumaila CISSE, candidat malheureux qui s’est illico presto rendu à votre domicile sise au quartier Sébénicoro pour vous féliciter en reconnaissant sa défaite, afin de donner une leçon de démocratie au peuple Malien et à l’Afrique entière. Mais monsieur le Président si les 77% des Maliens et Maliennes vous suivaient encore comme ils l’ont prouvé en 2013, votre projet référendaire mort-né ne serait  pas renvoyé aux calendes grecques. Pour le projet référendaire, nous savons que vous le savez mieux que nous monsieur le Président que dans le projet, la forme n’y était pas. Et au fond, ce n’était pas qu’une question d’harmonisation régionale pour adapter notre constitution aux standards régionaux (des autres pays Ouest-Africains). Car la CEDEAO, est claire là-dessus, on ne doit pas réviser la constitution à une année des élections. Aussi, l’hyper-présidentialisation qui était déjà constatée ne ferait qu’affaiblir notre démocratie avec l’hypothèse de l’instauration d’une monarchie présidentielle au Mali.
Excellence Monsieur le Président vous vous exprimiez en ces termes sur les Antennes de la Télévision d’Etat : «J’ai trop encaissé, je me suis réveillé, je vais sévir». Avez-vous été élu par les 77% des Maliens pour encaisser et dormir pendant quatre (4) ans en donnant seulement des droits de réponse à vos détracteurs au détriment de la recherche de solutions pour la paix, la réconciliation, d’actions concrètes visant à relancer une économie fragile et de mécanismes appropriés pour lutter efficacement contre la corruption comme l’une de vos promesses électorales de 2013? Monsieur le Président êtes-vous devenu Président de la République sans mesurer les responsabilités de la fonction ? Vous vous êtes rendu compte  excellence monsieur le Président que le pays est pris en otage par une certaine élite politique de votre  clan (RPM) et autres alliés de la CMP, face au cri de cœur des Maliens? Dans la même logique de pensée monsieur le Président vous vous exprimiez encore en ces termes sur les antennes de la même Télévision d’Etat : «On donne de l’argent à l’opposition et elle ne fait que insulter et dénigrer tous nos efforts. On n’a pas 500 Millions à jeter par la fenêtre. Ce que la loi y a consacré peut être changé par la loi». On c’est qui ? C’est une menace pour la démocratie ; c’est une insulte pour la démocratie ; c’est un déni de démocratie. Car le trésor public Malien ne vous appartient aucunement, il appartient au peuple Malien. Cet esprit de vengeance de votre part, prouve à suffisance votre manque de volonté et de vision d’un chef d’Etat, qui peine à trouver des solutions et des réponses idoines aux problèmes des Maliens auxquels vous aviez promis l’Eldorado sur terre lors de la campagne présidentielle de 2013. Est-ce une trahison de vos promesses électorales ?
Excellence monsieur le Président, tous les éléments d’appréciation permettent aux observateurs élucidés de se faire une certaine religion sur la scène politique avec l’hypothèse que vous seriez peut être pris en otage au sommet de l’Etat par un clan, c’est-à-dire par des opportunistes, des apatrides, des ennemis de la république, des fainéants,  des machiavels, des spéculateurs et des vendeurs d’illusions qui vous font danser au rythme de leur Tam-Tam, parce qu’ils ne vous diront jamais la vérité, pourvu qu’ils puissent préserver leurs postes avec les nombreux avantages liés aux fonctions. Ce sont des gens déconnectés de toute culture politique, démocratique et républicaine, et qui ne mesurent pas aujourd’hui la situation chaotique dans laquelle le pays se trouve.
Monsieur le Président, à moins de quatre (4) ans, cinq (5) premiers ministres et cinq gouvernements, cela voudrait dire que vous êtes en incapacité notoire de pouvoir gérer ce pays qui est en crise (sécuritaire, sociale, économique, etc.). Monsieur le Président, les situations conjoncture nous obligent souvent à changer de position et de vision quant à l’avenir. Autrement dit, cinq ans de mauvaise gouvernance sans aucune solution aux problèmes des Maliens, il serait sage sinon salutaire que vous renonciez à un deuxième mandat et sortir par la grande porte, et vous inscrire sur le mur de l’histoire des grands hommes du monde. Cette situation vous épargnerait une humiliation sans précédent lors des élections présidentielles de 2018, où le peuple semble être muni d’un esprit de vengeance pour vous faire payer à travers la voix des urnes le tort causé à lui pendant cinq ans de mauvaise gouvernance couronnée par (corruption, clientélisme, népotisme, favoritisme, impunité, détournement de deniers publics…). Cette colère du peuple couplée à celle des activistes, à celle des parents, des veuves, des enfants orphelins de militaires morts sur les théâtres au nord du Mali, sont des situations qui font que la plupart des Maliens ne vous accorderaient plus leur suffrage en 2018 et vous risqueriez de sortir par la petite porte. A vous de choisir entre, sagesse, bravoure et humiliation !
Excellence monsieur le Président, depuis votre accession à la magistrature suprême avec une majorité écrasante en 2013, le peuple a eu l’impression que ça a été « ôte-toi de là que je m’y mette ». Les élites (intellectuelles, politiques, financières, religieuses, militaires) ont toutes œuvré pour se mettre à l’abri du besoin conjurant ainsi le ‘’mauvais sort’’ (pauvreté, humiliations, corruption, clientélisme…) à un peuple dépaysé et abandonné par la république. La nouvelle donne sous IBK, la politique : moyen de sortir de la misère, de la pauvreté s’est substituée au mérite, etc.
Excellence monsieur le Président, vous avez fait assez d’aigris au sein de vos anciens alliés d’hier, et qui souhaiteraient majoritairement vous rendre copieusement la monnaie, ce qui expliquerait cette pluralité de probables candidatures qui pointent à l’horizon 2018. L’exemple le plus frappant est celui de votre ancien allié, le Général démissionnaire Moussa Sinko Coulibaly, qui par faute d’argumentaires valables sous les applaudissements de la foule qui l’acclamait le 20 Janvier 2018, le jour du lancement de son mouvement ‘’Plateforme pour le changement’’ sur le terrain de Magnambougou, disait ceci : «Nous donnons deux choix au Président Keita: soit de démissionner ou de ne pas se représenter aux élections futures sinon…il n’aura que les voix de ses 40 ministres». Par ailleurs, nous avons encore en bonne souvenance, cette phrase que ce même Moussa Sinko Colonel de l’armée en 2013 et le tout puissant Ministre de l’Administration Territoriale  avait laissé entendre, suscitant la colère de vos adversaires lors de la proclamation des résultats du 1er tour du scrutin Présidentiel de 2013 : « Si on s’en tient aux résultats, le Candidat Ibrahim Boubacar Keita (IBK) pourrait largement dépasser les autres et il n’y aurait pas de second tour.». Ça voudrait dire ce que ça dire et chacun l’avait interprété à sa façon.
Excellence d’autres aigris et victimes de votre régime seraient devenus des écrivains ou de potentiels candidats en 2018, sans être sûrs de gagner la présidentielle, mais juste pour vous barrer la route de Koulouba. D’ailleurs, ils se  positionnent en revanchards bien armés d’argumentaires valables et de moyens financiers pour se laver l’affront infligé à eux par votre personne et votre clan, malgré, leur engagement et leur bonne volonté à changer les choses au sommet de l’Etat. Malheureusement, les vautours qui vous entourent ont eu raison sur eux en poussant certains à la démission et d’autres aussi ont été démis de leurs fonctions. Par ailleurs, vos anciens alliés leaders religieux sont en train de prendre leur distance vis-à-vis de vous, parce que les résultats de votre gestion des affaires publiques seraient jugés mitigés et insatisfaisants par bon nombre des Maliens. Cet état de fait expliquerait votre abandon par vos anciens amis leaders religieux à la recherche d’un candidat sauveur pour le Mali. Autant de facteurs qui laissent entrevoir que vous êtes en mauvaise posture pour gagner les élections présidentielles de 2018. Excellence à vous de réfléchir et mesurer le positionnement actuel de vos anciens alliés d’hier en colère contre vous!
Faut-il aller aux élections à la date du 29 Juillet 2018 au Mali?
Excellence monsieur le Président, sauvons le Mali d’abord qui est la finalité de toutes nos hypothèses et rêves de lendemains meilleurs. Un pays en crise où vos supporters tiennent mordicus, vaille que vaille, contre vents et marées qu’on aille aux élections ; rien que les élections pour leur permettre d’asseoir leur dynastie et profiter plus des deniers publics de l’Etat pendant les cinq années à venir. Est-ce un abandon de la république et dans la république pour nos ambitions personnelles et égoïstes ? Avez-vous été élu pour servir le Mali ou pour servir un clan ? Cette situation mérite d’être interrogée ; car elle cacherait des facteurs sous-jacents et latents dans la tenue des échéances électorales à venir. Monsieur le Président, si on va aux élections dans ces conditions quel que soit celui qui va gagner les élections, il ne gérera pas seul, si le Mali n’est pas mis ensemble. Nous n’allons jamais remettre en cause que les élections sont importantes pour une démocratie plurielle. Car elles bouchent un processus démocratique et ouvrent un autre processus démocratique ; conditions pour sortir de la crise. Vous avez la responsabilité de mettre ensemble tous les protagonistes pour leur permettre de se prononcer autour d’une même table pour discuter du Mali, dans l’optique de mutualisation et d’homogénéisation des efforts de sortie de crise, si vous aimez le Mali comme vous le dites. Toutes les élections comportent des risques potentiels, mais il faut les identifier et les gérer. Mais les meilleures élections au monde, sont celles dont les résultats sont acceptés par toutes les parties prenantes et les protagonistes. Les 70% de l’organisation des élections seraient liés à la qualité de la logistique, parce que le Mali est un pays vaste, enclavé, habitats dispersés. Tout doit être mis en œuvre pour que tous les gens puissent voter pendant les élections à venir pour éviter les frustrations, les émeutes, les crises électorales et post-électorales.
Le gouvernement doit ouvrir le dialogue, rencontrer tous les protagonistes et toutes les parties prenantes pour expliquer le pourquoi aller aux élections ? Il doit créer les conditions pour des ‘’élections justes, démocratiques…’’ en créant aussi toutes les conditions (cadre de concertation, de consultation) pour que les résultats soient acceptés par tous. Les risques potentiels pourraient éventuellement découler des incompétences des institutions chargées de l’organisation des élections sur toute l’étendue du territoire national et aussi par rapport au retard et à la qualité de la logistique qui joue un rôle important dans la tenue d’une telle élection dans un climat délétère.
Le Mali a 49 cercles administratifs non maîtrisés par l’Etat central aujourd’hui avec la crise sécuritaire. Absence de l’administration dans certaines localités où l’administration est concentrée au niveau région ou cercle. Par ailleurs, le déplacement des populations pour rejoindre leurs bureaux de vote avec les mines et la présence des groupes armés qu’on ne contrôle pas, qui s’adonnent à des attaques sporadiques constituent des risques exacerbés pour le déroulement du premier tour du scrutin présidentiel à la date du 29 Juillet 2018.
La transition doit être un impératif, comment passer du Mali ancien au Mali nouveau ? Le Mali nouveau doit se structurer comme suit: réformes institutionnelles ; réformes politiques ; réformes judiciaires ; réformes économiques ; réformes sociales ; réformes administratives ; réformes de la décentralisation poussée pour donner plus de pouvoir aux régions et cercles, etc. Cela doit se faire dans le cadre d’un large engagement des maliens pour régler cette situation.
Il le faut excellence, parce que notre modèle de démocratie est genou ; notre économie est à genou ; nos institutions démocratiques sont à genou. Les diplômés sans emplois, une main d’œuvre disponible pour les Djihadistes ; un déni de la réalité sociale par les hommes politiques. Par exemple, excellence monsieur le Président, comment voulez que ce même Etat qui a abandonné ses enfants de Gao, de Kidal, de Tombouctou…revienne sous ses anciennes formes de gouvernance dans lesdites régions qu’il avait abandonné en 2012, sous les balles des groupes armés et des mouvements Djihadistes ? Il faut repenser le modèle de gouvernance pour passer du Mali ancien au Mali nouveau.
Qu’est-ce que les élections du 29 Juillet doivent apporter au Mali ?
Excellence monsieur le Président, si on part aux élections sans un dialogue social et politique fécond en faisant un dialogue sourd, le Mali serait mis en deux chaos, c’est-à-dire l’organisation des élections dans des conditions inacceptables. Ce qui engendrait un chaos. Ce chaos peut déboucher sur toute aventure, soit des religieux ou la rue dans une perspective de récupération du pouvoir Etatique. L’autre danger, les activistes qui sont des critiques sinon des négationnistes, mais sont majoritairement dans des débats stériles, de spéculation, de la haine, de destruction massive. Ces activistes et autres groupes spontanéistes ou spontanés ne sont pas à négliger dans le contexte actuel où l’Etat est en insuffisance de capacités opératoires et opérationnelles pour pouvoir sécuriser les personnes et de leurs biens même au niveau de la capitale (Bamako), où existent toutes les Institutions Démocratiques et Républicaines. Ce climat laisse entrevoir que le Mali n’est pas loin des événements (scénarios) de mars 1991, semant la haine viscérale entre population et le régime ‘’Dictatorial’’ conduisant au chaos (renversement du Dictateur Moussa Traoré). Cette révolution populaire récupérée par les hommes politiques qui s’est retournée contre ce même peuple meurtri dans la pauvreté, le chômage, la faim…Ce peuple serait muni aujourd’hui d’un esprit revanchard pour faire payer à certains le tort qu’on lui a causé pendant plus de 20 ans de règne avec la corruption, le népotisme, le clientélisme, le favoritisme à ciel ouvert.
C’est vrai si on ne va pas aux élections, on sort de la loi fondamentale du Mali. Mais la démocratie c’est aussi la réflexion et l’anticipation dans la gestion des risques. Il faut un mouvement d’ensemble, des chaînes de solidarité pour mettre le Mali au cœur de nos objectifs et non de nos ambitions personnelles ou égoïstes. Le Mali constitue un danger pour les autres pays du Sahel. Il est un danger pour l’Europe dans la résolution de leurs problèmes de Djihadistes, de terrorisme et de gestion des flux migratoires. Si on va aux élections en cas d’un autre chaos, le Mali serait complètement mise sous tutelle par l’ONU, à travers une résolution formelle pour gérer ces questions sous l’impulsion de la France impérialiste, et même notre armée régalienne pourrait éventuellement être remplacée par les forces étrangères dans les régions du septentrion Malien.
Vive la république !
Vive la démocratie !
Bréhima Mamadou KONE dit Patrice Emérite Lumumba, Chercheur

Source : L’Oeil du Peon

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