Au plan du contentieux électoral , par ce récent Arrêt censé fonder une rationalité dans la (dis) qualification des candidats à l’exercice du pouvoir législatif, la Cour Constitutionnelle impose à elle-même, aux professionnels du droit- magistrats, avocats, notaires, professeurs, juristes etc. , aux commentateurs de la presse et aux citoyens d’une manière générale une autre décision ( de plus, serait-on tenté de dire) dont on ne perçoit pas le réel effort de structuration et d’harmonisation. En consultant les « considérants » qui sont, pour ainsi dire présentés en vrac, au stade ultime de la désignation, certains flottements et des discordances certaines consacrent gravement des déséquilibres.
Après le long processus d’agrégation enclenché par le système de l’engagement personnel et les tris partisans, vient devant l’Auguste Cour le temps du partage des individus : c’est une vertu « héroïque « (définition ecclésiale de la sainteté) que les candidats aux élections démocratiques et apaisées exigent des Défenseurs institutionnels de la Constitution. La mémoire des sentences, sous l’impulsion d’un corps de » sages « , généralisera un droit électoral unifié qui fixera des règles juridiques, afin qu’il soit loisible à chacun d’être adéquatement informé avant de s’engager dans la curée, puis, éventuellement, d’engager une procédure. Les décisions de la Cour Constitutionnelle doivent ainsi consacrer une sorte de pré-règlement des situations conflictuelles, car à la différence des autres cours, ni les conditions économiques générales de l’organisation sociale, ni les formes juridiques et politiques variables, entraînant la succession accrue de concepts juridiques pouvant entraîner des spéculations et des interprétations multiples, ne fondent devant elle une mobilité excessive de la motivation des décisions. La constitution, la loi électorale (seule variable avec l’opportunité politique, aux assauts limités à la configuration de la CENI), la loi organique relative à la procédure suivie devant l’Auguste Cour s’inscrivent le plus souvent à un compte en devises fixes.
Signaler dans l’Arrêt numéro 2013-09/CC-EL, à propos de la recevabilité des requêtes et des moyens développés le tracé : des zones fixées par la loi organique ; des zones relevant des Principes Généraux du Droit ; démarquer certaines franges d’interférence entre les concepts procéduraux ; mettre en exergue certaines formulations prêtant à confusion, tel est le propos.
I De la recevabilité des recours : des critères mouvants.
Ce qui donne de la valeur aux pratiques de la Cour Constitutionnelle, c’est l’existence d’autres pratiques, qu’elles soient théoriques comme les commentaires, la doctrine, ou juridiques, comme la procédure, ou techniques, comme la publication et l’informatisation des arrêts. Par quel raffinement de précaution le juriste n’assure t-il pas la constance ? On le comprend ; car c’est par la constance des étalons de mesure que les chiffres en mesurant les quantités sont justes, et peuvent être mis mathématiquement en équations. Parler de la variabilité d’un étalon de mesure, n’est ce pas en nier l’existence ? A quoi serviraient le mètre et le gramme, si la longueur de l’un, le poids de l’autre, n’étaient pas constants !
Le développement ne portera pas sur un tout, déjà constitué, mais sur des éléments qui ne prennent sens que dans un système d’oppositions. L’identification de ces formes précèdera les combinaisons différentes des éléments qui entrent dans la configuration de la pratique jurisprudentielle de la Cour Constitutionnelle.
A. Une pratique fondée sur l’accumulation
C’est de la rencontre de formations et de sensibilités différentes (juristes de droit public, de droit privé, anciens ministres, anciens parlementaires, universitaires, « grands commis « ) que les décisions de la Cour Constitutionnelle, institution récente, devraient tirer le meilleur, même si celui-ci n’était pas parfait. Son statut ne lui donne pas la qualité d’une Cour Suprême, mais celle d’un juge d’attribution, souverain il est vrai dans son domaine de compétence, mais non pas supérieur hiérarchique des autres juridictions de droit privé ou de droit public. A cette évidence juridique s’ajoute le souci d’éviter le ridicule qui s’attache toujours au nègre nouveau venu (Bernard A. Dadié) qui découvre Paris. Une loi organique (numéro 97-010 du 11Février 1997) détermine la procédure suivie devant la Cour; par Délibération en sa séance du 28 Août 2002, elle a adopté un Règlement Intérieur qui abroge et remplace celui en date du 21 Décembre 1994. A chacune des étapes de sa jurisprudence, elle a modulé un certain nombre de concepts qui agencent le raisonnement mais n’assurent pas toujours la cohérence de ses décisions.
« Dans la Section 3 de la loi organique relative à la procédure en matière d’élection des députés, l’article 34 stipule notamment : « La Cour Constitutionnelle est saisie par requête écrite, datée et signée, adressée à son Président « . L’article 35 ajoute : » La requête doit contenir les nom, prénoms, adresse et qualité du requérant, les noms des élus dont l’élection est contestée ainsi que les moyens d’annulation invoqués. Le requérant doit annexer à la requête les pièces produites au soutien de ses moyens et faire élection de domicile au siège de la Cour. Il peut également désigner un mandataire… « .
Selon les termes de l’article 38, « Lorsque la requête ne contient pas les indications visées à l’article 28 (reprises dans l’article 35 pour l’élection des députés) ci-dessus, sauf en ce qui concerne le délai, la Cour par arrêt motivé constate son irrecevabilité « .
« En matière d’élections législatives, la Cour Constitutionnelle joue un rôle essentiel dans toutes les phases, qu’il s’agisse des opérations préliminaires, du déroulement des opérations et de la proclamation des résultats. En vertu de la loi électorale, elle vérifie si les frais de participation ont été versés, s’assure du consentement des candidats et des partis et examine si les conditions de présentation (nombre, validité, origine) sont réunies. C’est elle qui, dans une décision, arrête la liste des candidats.
Sa compétence juridictionnelle dans les opérations préliminaires (décision arrêtant la liste provisoire et définitive) a donné lieu à la présente décision diversement critiquée.
B : Une pratique déroutante : des décisions de complaisance
Les décisions relatives aux liste retenues ou non dans les circonscriptions électorales de Banamba et de Barouéli illustrent parfaitement – parmi tant d’autres- ce que plusieurs candidats ont considéré comme une sorte de détournement de procédure pour les écarter ou éliminer leur liste.
a) A Banamba : Le candidat Lassana Diarra, démissionnaire de l’ADEMA et présenté sur la liste RPM / ADEMA-PASJ à Banamba, a vu sa liste invalidée au motif que son nom figurait sur une liste de conseillers communaux émanant du Ministère de l’Administration Territoriale, comme élu sous la bannière de l’ADEMA. Or, selon l’arrêt, l’ADEMA-PASJ présente également une liste de candidats dans la circonscription électorale de Banamba.
– A première vue, cette interprétation de la Haute Instance semblerait autorisée d’autant plus qu’elle pourrait découler de principes, de lois, ou traduire son attachement à sa propre pratique ou à l’équité. En effet, la technique lui permet de faire d’une pierre deux coups : l’intéressé n’aurait pas démissionné, et se présente contre une liste de son parti dans la même circonscription, ce qui de toute évidence, établit l’existence d’une liste ADEMA-PASJ dans la compétition électorale au sein de la localité.
– Dans la même localité et par le même Arrêt, l’Auguste Cour a rejeté un recours de la liste ADEMA introduit contre le Maire actuel et Conseiller ADEMA-PASJ non démissionnaire de son poste électif, qui s’est présenté à la fois sur une liste ASMA-CFP/ADP-Maliba et sur une liste ASMA, au motif que (page24) : » l’ADEMA-PASJ n’a pas présenté de candidat dans la circonscription électorale de Banamba ; qu’il ne se présente pas contre son parti l’ADEMA-PASJ ; que la requête doit être rejetée « . Et voici pourquoi votre fille est muette.
– Dans la même localité et par la 1ere proclamation des candidatures validées pour le scrutin du 24 Novembre 2013, l’Auguste Cour, » considérant que les listes de candidature suivantes n’ont pas acquitté les frais de participation à l’élection des députés et que par conséquent il y a lieu de les invalider, procède au rejet dans la Circonscription électorale de Banamba de la liste ASMA-CFP / ADP- Maliba portant les deux noms qui sont aussi ceux de la liste ASMA (Page 7) ;
-A supposer décisif que sur la liste ASMA-CFP/ADP- Maliba, l’un des deux candidats portât le prénom de Aliou et celui de Ali sur liste ASMA, il est constant que le second candidat garde les mêmes prénom et nom sur les listes et se présente donc sur deux listes différentes ; un tel acte est régulièrement retoqué par plusieurs décisions de la Cour Constitutionnelle, dont celle-ci d’ailleurs.
– L’Auguste cour a validé tant dans la première proclamation que dans la seconde la liste de candidats ADEMA-PASJ à Banamba et ne saurait disconvenir qu’elle en avait nié l’existence pour rejeter un recours et valider une autre liste. Le recours de la liste ADEMA – PASJ, liste validée par la Cour, a été rejetée par la même Cour, parce que » l’ADEMA ne présente pas de liste à Banamba » ! Cher ami Malet DIAKITE de la Cour constitutionnelle, qui a donné l’ordre de tirer… sur la logique et le droit ?
– La liste RPM – ADEMA n’a jamais été informée du recours exercé contre sa validité pour être en situation de faire valoir ses moyens de défense, ce qui fait dire, d’une manière sportive par les candidats, qu’un match de football joué par une seule équipe informée seule de la date et du lieu n’en est pas un. Leur liste ayant été validée lors de la première proclamation, ils avaient engagé la campagne et les moyens multiples et variés de la compétition électorale. En effet, dite de manière triviale, » il n’y a pas match « .
-Cette liste RPM – ADEMA, validée lors de la première proclamation, a été rejetée lors de la seconde proclamation, pour ainsi dire en cause d’Appel, sans avoir été examinée en 1ere instance au mépris du double degré. C’est tout comme si par exemple une requête en divorce était portée pour la première fois devant les Chambres réunies de la Cour Suprême du Mali (au lieu de la justice de Kolokani) à l’insu de l’épouse, pour le seul bénéfice du conjoint, fort de surcroît de l’inexistence de voie de recours.
b) A Barouéli
– Les mêmes observations relatives à la non-information sur l’existence d’un recours exercé contre la liste, la non communication de pièces et arguments, l’inobservation des conditions de recevabilité du recours, la validation de la liste lors de la première proclamation et sa remise en cause pour la première fois lors de la proclamation définitive, sont identiques à celles esquissées pour la circonscription de Banamba.
-Pour la première fois depuis qu’elle existe, la Cour Constitutionnelle vient de faire recours à » l’examen de la liste nominative actualisée des Conseillers communaux transmise par la Ministère de l’Administration Territoriale « . Irruption foudroyante, ce concept ne tient pas compte de la démission du parti d’origine dans les délais requis. Le candidat Oumar Barou SYLLA ayant démissionné de l’URD depuis le 12 Janvier 2012, par lettre remise contre décharge au Secrétaire Général du parti, il peut figurer sur la liste des conseillers au niveau du Ministère, par la négligence, la diversion ou le confort du parti , qui se sera abstenu de s’en vanter, mais toujours est-il que l’intéressé n’a pas été appelé pour se défendre, alors qu’il n’est plus membre de l’URD, et que cette fameuse liste ne lui a jamais été présentée pour ses observations éventuelles. La Cour a donc statué comme législateur : en effet, en l’absence de toute loi, elle sanctionne le » nomadisme » des élus. Cependant des députés élus sous la bannière d’un parti » émigrent » vers une autre crèmerie sans perdre qualité et mandat. En outre cette démission entraine ipso facto le changement de groupe parlementaire sans que l’on n’excipe d’une quelconque liste actualisée. La Haute Instance légifère et s’autorise le maniement de nouvelles notions. Pour des raisons de morale ou d’éthique, l’on peut se réjouir ou non du » nomadisme » mais on ne peut le condamner juridiquement aujourd’hui en l’absence d’une loi. Le pouvoir législatif ne peut être exercé par l’Auguste Cour.
-De l’examen de ces deux cas d’espèce, il ne semble pas qu’il y ait une très grande convergence entre les techniques juridictionnelles de la Cour Constitutionnelle et les principes Généraux du Droit.
II. Appréciation-Critique de l’Arrêt.
Ce titre est sans doute trop ambitieux pour nos modestes visées : un bref examen de la jurisprudence relative à la validation de candidatures telle qu’elle apparaît à travers deux rapports que cette jurisprudence électorale va susciter sinon mettre en évidence : le rapport de « non-mise en cause « et le rapport de « non-dénaturation « .
L’on pourrait cependant comprendre que la Haute Instance, toute jeune dans un pays qui a connu depuis des temps immémoriaux le droit sous d’autres formes et qui puise très largement dans le gisement de l’ancienne Métropole, ait interprété ou non les textes en se reconnaissant une nature juridictionnelle autonome ; son choix en la matière va-t-il finir par s’imposer ? Interpréter est-il légiférer ? N’est-il pas interdit aux juges » de statuer par voie de dispositions réglementaires » ? (Article 4 du Code Civil).
A. Le Principe de » non -mise en cause « .
Par une pratique constante et non équivoque, depuis sa première Délibération en date du 21 Décembre 1994 abrogée et remplacée en sa séance du 28 Août 2002, sur son Règlement Intérieur, l’Auguste Cour s’impose une » auto-juridictionnalisation » (puisque c’est de cela qu’il s’agit) qui doit produire des effets spécifiques au regard de ses attributions ; encore faut-il qu’elle soit partagée par tous ses » partenaires » (les pouvoirs publics) et ses destinataires (les citoyens). Il est loisible de constater que la Haute Instance statue » par dérogation aux règles du droit commun « .
Le principe du contradictoire, principe naturel de la justice, implique que chaque partie à une instance soit citée, soit informée, soit en mesure de discuter les prétentions, les arguments et les preuves de son adversaire, afin de produire les siens, » pour une saine application du droit « . Ce principe qui tombe sous le sens constitue un principe constitutionnel, un Principe général du Droit, un principe de procédure judiciaire et administrative, admis pour des motifs supérieurs d’équité, afin d’assurer la sauvegarde des droits et libertés essentiels de l’individu. En effet, ce principe et le suivant sont indispensables pour le cadre juridique dans lequel doit évoluer la nation, pour éviter toute discrimination. La Cour Constitutionnelle utilise au demeurant un formulaire à en tête » demandant de produire un mémoire en défense au plus tard le … « . Le principe d’égalité, principe fondamental reconnu par les lois de la République et » particulièrement nécessaire à notre temps, » au nom duquel le Conseil Constitutionnel français a rendu sa décision » Liberté d’association » que d’aucuns n’ont pas hésité à rapprocher de la célèbre affaire « Marbury V. Madison » de la Cour Suprême des Etats-Unis a un caractère éminemment » purificateur « .
Sur la recevabilité des requêtes, malgré la précision et la clarté des textes, la Cour Constitutionnelle, reprenant d’une main ce qu’elle a donné de l’autre, semble neutraliser ici un autre principe majeur du droit et de la procédure.
En effet, par un grand Arrêt CC-EL97-014,l’Auguste Cour statue ainsi : « Considérant que si les partis politiques ont qualité pour contester la régularité des opérations de l’élection des députés , leurs requêtes doivent sous peine d’irrecevabilité être signées par les responsables politiques habilités à ester en justice en leurs noms ; que dans le cas d’espèce aucun des partis politiques requérants n’a signé la requête ; Par ces motifs : déclare la requête des saisissants irrecevable » .
Mais c’est aussitôt pour se contredire dans un autre arrêt CC-EL97-032 : « Considérant que l’alinéa 3 de l’article 57 de la loi électorale fait de la déclaration revêtue « de la signature de chaque candidat dûment légalisée » non une opération facultative mais une exigence juridique expliquant non seulement la volonté du candidat mais son accord pour se présenter effectivement et sans contrainte au nom du parti représenté par son mandataire ; rejette la requête de l’USRDA « .
Dans le présent arrêt, sur 59 requêtes, seules 3 sont signées par le Président du parti (n°- 4-PDS C/. PDES rejetée toutefois pour non désignation d’une liste de candidature ??? ; N°26 Bara et n°49 PCR).
Les autres requêtes sont introduites par mandataire : avocat (mandataire légal) ou mandataire du parti. A s’en tenir à des décisions antérieures, dont certaines ayant opposé Maître M.G.et Maître H.B. (amis , confrères, ancien député et ancien Ministre) la Cour Constitutionnelle a déclaré irrecevables toutes les requêtes présentées par des avocats non munis d’un pouvoir spécial, et à bon droit, nous semble t-il : le droit de saisir la cour Constitutionnelle est rigoureusement personnel : nul ne peut y renoncer par avance et aucun parti, syndicat ou association ne saurait prétendre l’exercer à la place du candidat. Ceci tient au caractère objectif du droit du suffrage qui a pour effet de conférer au parlementaire un mandat s’exerçant au nom de la collectivité entière. La représentation ou l’assistance des parties par une tierce personne, bien que prévue par la loi organique, n’est possible qu’à condition que celle-ci soit munie d’un mandat exprès et écrit. Par une requête (arrêt » CC – EL 98 – 064) un sieur Mohamed TOURE n’affirme t-il pas contre son parti n’avoir introduit aucun recours ? Les avocats et autres auxiliaires de justice ne bénéficient donc d’aucun monopole de défense et ne peuvent agir sans pouvoir exprès et écrit. Selon la Cour (Arrêt CC-EL 98-101) : » Vu la requête présentée par Maître H.B. et tendant à l’annulation des élections législatives du 2eme tour dans la circonscription électorale de Koutiala ;
Vu le mémoire en réplique de Maitre M.G agissant au nom et pour le compte des députés élus de koutiala (cet avocat avait un mandat exprès et écrit de tous les candidats)…
Après en avoir délibéré… ;
Considérant (les stipulations de l’article 35 : nom, adresse, etc.) ; considérant que l’article 25 spécifie de façon péremptoire que le Conseil (l’avocat) ne peut intervenir qu’au cours de l’instruction ; qu’il dispose en effet que » les parties intéressées peuvent demander à être entendues. Elles peuvent se faire assister d’un conseil de leur choix au cours de l’instruction de l’affaire » ; Considérant qu’en application de ces dispositions, une jurisprudence solidement établie, consacre le principe selon lequel les requêtes doivent sous peine d’irrecevabilité être signées de leurs auteurs (CF Arrêt CC-EL97 -14 du 14 Février 1997) ; Considérant que la requête introductive d’instance devait être signée de Monsieur Balla Coulibaly ou tout membre du Bureau ayant qualité pour agir au nom du parti, que cela n’a pas été fait ;
Considérant au surplus que si les parties jouissent du droit de se faire représenter ou assister d’un conseil de leur choix, le mandataire ou le conseil ne peut intervenir qu’à la condition qu’il soit muni d’un mandat express et écrit ; que Maître H.B. n’est pas porteur d’un tel pouvoir ; Déclare irrecevable la requête susvisée « .
Il s’agit là d’un arrêt de principe, qui devrait entrainer l’irrecevabilité de la quasi-totalité des requêtes reprises par la décision commentée ici. On y reconnaîtra en effet les éléments qui, dans le procès et le jugement, portent une virtualité de généralisation, c’est à dire sont susceptibles de servir de fondement à un raisonnement inductif, à une aptitude générale à l’abstraction dans la sphère juridique et à son utilisation comme source de régulation. Pour permettre aux parties à un litige de participer de l’intérieur de l’action procédurale particulière à la fonction juridique, il est nécessaire de définir une fois pour toutes dans l’esprit des lois, l’étendue de leurs obligations et de leurs droits relativement au jeu des règles. Sur la recevabilité des recours toujours, il existe à la fois le texte de la loi organique et des arrêts de principe qui annihilent ou relativisent la totalité des décisions rendues depuis 1997 en matière électorale : c’est l’élection de domicile prévue à la fin des articles 28 et 35 de la loi organique, dont l’omission a été sanctionnée par des dizaines de décisions.
Les arrêts numéros 98-102 à 98- 117 notamment déclarent irrecevables tous les recours au motif que le requérant « devait faire élection de domicile au siège de la Cour Constitutionnelle ; qu’il ne l’a pas fait ; que dès lors la requête ne répond pas aux prescriptions de l’article 35 susvisé et doit être déclarée irrecevable « .
L’on serait en peine de retrouver des requêtes ayant observé cette formalité depuis lors et tout aussi en peine de retrouver depuis plus de quinze ans des arrêts ayant sanctionné l’absence de cette formalité d’ordre public. D’ou la nécessité de commentaires et de publications.
La jurisprudence s’accommoderait elle d’un simple rapport de commodité, le principe de Constitutionnalité exigeant un rapport de conformité au sens strict ?
La notion de « mise en cause » recourt à des techniques connues dont la plus élaborée est celle du » critère de l’état de la législation antérieure « . Il en résulte que s’affranchissant de ce concept, l’Auguste Cour procède à une « sectorisation » des domaines respectifs d’intervention de la loi et du Règlement Intérieur, et les requêtes se trouvent « cadastrées » parcelle par parcelle, rapporteur par rapporteur. Est-ce pour parer au plus pressé en raison des délais très brefs qui lui sont impartis, ou parce qu’il s’agit d’un organe collégial dont les décisions sont le fruit d’un compromis difficile à retrouver ? Ou une volonté de se montrer pédagogue en attendant un ensemble de décisions convergentes ? Ou, pour éviter » des susceptibilités « , une liberté d’appréciation est elle laissée à chacun des rapporteurs ?
B. Le principe de « non dénaturation »
Le professeur Auby définit ce principe en ces termes : » la norme qui met en œuvre les principes ou les règles posées par une norme supérieure doit non seulement ne pas contredire ces principes et ces règles, mais encore ne pas les remettre indirectement en cause, par exemple en rendant pratiquement impossible leur application « . Il est évident que le contenu d’une telle notion implique que « tout est question de cas d’espèce « , et répond à une nécessité de » sécurité juridique « , contraignant l’Auguste cour à expliquer, dans certaines décisions, à quoi répondrait éventuellement cette dénaturation.
On assiste à » l’émancipation « d’une doctrine de la Cour Constitutionnelle, par sa volonté d’inscrire délibérément sa jurisprudence propre, hors du sillage du droit administratif et du droit privé. Venue tard dans un monde juridique déjà peuplé, elle semble avoir très tôt senti, à travers les attributions qui lui ont été parcimonieusement accordées par le constituant, que le droit commun n’est pas son domaine, et la dynamique de ses fonctions de séparateur des pouvoirs aidant, elle n’a pas cherché non plus à s’y imposer. Ainsi s’explique que tantôt elle exclut ou admet « l’autosaisine « , procède à des investigations par les rapporteurs, accueille des listes actualisées dont nul ne connait ni ne mentionne l’autorité de révision régulière (partis ou membres), annule des candidatures à la demande de leurs partis d’origine (arrêt CC-EL 97-019 du 22 Mars 1997 relatif à l’invalidation de la déclaration de candidature du RDT pour les élections du 13 Avril 1997. Il en est aussi de pittoresques : comme l’arrêt CC-EL 97-052 relatif à l’invalidation de toutes les listes de candidature du parti RDP pour les élections législatives du 20 Juillet 1997 avec requête et mémoire étoffés opposant le Président et le Vice-président de cette formation. Le Coppo, il est vrai, se positionnait.
On peut noter et regretter une perméabilité par le politique, révélée par les observations de membres anciens ou d’administrateurs, mais aussi à travers des arrêts improbables de proclamations Présidentielles ; à retenir cependant le mémorable Arrêt CC-EL 97-046 du 25 Avril 1997 qui a annulé les opérations électorales du premier tour des législatives sur toute l’étendue du territoire du Mali.
Source: L’Indépendant