Les Maliens votaient dimanche au second tour de législatives devant parachever le retour à l’ordre constitutionnel après le coup d’Etat de 2012, dans un climat alourdi au lendemain d’un attentat jihadiste qui a tué deux soldats sénégalais de l’ONU.
Très peu d’électeurs étaient présents à l’ouverture des bureaux de vote à Bamako, a constaté un correspondant de Maliactu, ce qui fait craindre une faible participation.
Ce correspondant a attendu une demi-heure dans le bureau de vote d’un quartier de Bamako, Hamdallaye, avant de voir arriver le premier électeur. Le même phénomène a été constaté dans d’autres quartiers.
« Concernant l’organisation, tout est prêt mais en ce qui concerne le mouvement, le déplacement des gens, je ne pense pas qu’il y aura beaucoup de monde, comme la dernière fois », lors du premier tour du 24 novembre, a déclaré Badra Traoré, le président du bureau d’Hamdallaye.
« Les gens ne sont pas motivés », selon lui, en raison, affirme-t-il, « du comportement des dirigeants, des autorités de ce pays ».
Au premier tour, le taux de participation avait été nettement plus faible qu’à la présidentielle de l’été – 38,6% contre 48,9% – et risquait de l’être plus encore dimanche, selon les observateurs.
Quelque 6,5 millions de Maliens sont appelés à participer à cette dernière étape d’un processus électoral qui, après la présidentielle remportée le 11 août par Ibrahim Boubacar Keïta, doit sceller le retour à l’ordre constitutionnel interrompu le 22 mars 2012 par un coup d’Eat ayant précipité la chute du nord du pays aux mains de groupes jihadistes.
Ces groupes liés à Al-Qaïda ont été affaiblis par une intervention militaire internationale lancée par la France en janvier et toujours en cours, mais ils restent actifs, comme l’illustre l’attentat à la voiture piégée commis samedi à Kidal (nord-est).
Un véhicule bourré d’explosifs a foncé sur la Banque malienne de solidarité (BMS) gardée par des soldats maliens et d’autres Africains, appatenant à la force de l’ONU au Mali, la Minusma. Deux soldats sénégalais ont été tués, trois autres Casques bleus et deux soldats maliens gravement blessés.
Un jihadiste malien, Sultan Ould Badi, qui a été membre de plusieurs groupes islamistes armés du Sahel, dont Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi) a, « au nom de tous les moujahidine », les combattants de l’islam, revendiqué l’attentat dans un appel téléphonique à l’AFP.
« Cette opération est une réponse aux pays africains qui ont envoyé des militaires pour soutenir le combat de François Hollande (président français) en terre d’islam », a déclaré en français Sultan Ould Badi.
Crainte d’un nouvel attentat
La crainte d’un autre attentat dimanche est donc grande et les forces de l’ONU, de la France et du Mali qui assurent la sécurité du scrutin, sont en état d’alerte maximum, en particulier dans le nord.
L’attentat de Kidal, où les quatre députés de la région ont été élus dès le premier tour, s’est produit alors que l’armée française mène depuis une semaine une grande opération anti-jihadiste au nord de Tombouctou (nord-ouest).
Cette opération, qui vise Aqmi et qu’à Paris l’armée ne souhaite pas commenter, est une « très grosse opération militaire, la plus grosse dans la région de Tombouctou depuis la reprise des principales villes du Nord par les forces alliées » au début de l’année, selon une source africaine à Tombouctou. Une vingtaine de jihadistes ont été tués, selon des sources militaires française et africaines.
A l’issue du premier tour du 24 novembre, seuls 19 sièges avaient été pourvus sur les 147 que compte l’Assemblée nationale.
La faible mobilisation avait inquiété les observateurs du scrutin, dont Louis Michel, chef des observateurs de l’Union européenne (UE), qui avait déclaré que « dans le contexte particulier du Mali, voter n’est pas seulement un droit, c’est un devoir moral ».
L’objectif pour le président Keïta est que son parti, le Rassemblement pour le Mali (RPM), et ses alliés obtiennent une confortable majorité à l’Assemblée nationale.
Soumaïla Cissé, candidat malheureux au second tour de la présidentielle, a été élu dès le premier tour dans sa circonscription de Niafunké, près de Tombouctou. Avec son parti, l’Union pour la République et la démocratie (URD), il ambitionne de devenir le chef de l’opposition parlementaire.
Plusieurs centaines d’observateurs nationaux et internationaux surveillent le scrutin, essentiellement dans le sud et le centre du pays, le Nord étant considéré comme encore trop dangereux pour s’y aventurer.