Cette logique a été défendue becs et ongles par des officiels maliens devant la représentation nationale. Pas dans le cadre d’une interpellation du gouvernement mais à la faveur des traditionnelles écoutes préparatrices de la loi de Finances en pleine procédure législative aux niveaux des différentes commissions parlementaires. Interrogés sur la situation de la pauvreté au Mali, des responsables en charge du développement durable ont pu affirmer sans ciller que les familles maliennes du septentrion malien sont plus riches que celles du Sud. De quoi intriguer nombre de leurs interlocuteurs convaincus que la crise au nord-Mali devrait plutôt avoir exacerbé la situation de concitoyens défavorisées par la nature et, par voie de conséquence, très affectées par les sécheresses, les disettes, les faibles rendements agricoles ainsi que par le difficile accès aux soins de santé, à l’éducation, etc.Il est loisible d’imaginer que la thèse repose probablement sur une conception relativiste de la pauvreté. Il n’en demeure pas moins qu’elle est de nature à alimenter une polémique de plus en plus répandue quant à une répartition inéquitable des ressources nationales entre le nord et le sud du Mali. Elle conforte notamment la position de ceux qui estiment, certainement plus à tort qu’à raison, que le septentrion malien est constamment bombardé de privilèges et de priorités pour si peu de contribution à la richesse nationale. Quoi qu’il en soit, il résulte naturellement de l’absence de l’Etat l’émergence de classes favorisées par une activité commerciale déloyale susceptibles de profiter à l’ensemble.
Le niveau des eaux va-t-il plomber la croissance : La croissance fera-t-elle bon ménage avec la sécheresse ?
La question mérite d’être posée avec le contraste de certains indices. Tandis que l’Hôtel des Finances continue de rêver d’une croissance à deux chiffres en dépit d’un contexte de crise et de résilience, le monde rural est plutôt très préoccupé par un phénomène inédit depuis plus de 30 années : l’affectation plus que probable des cultures et de la productivité agricole par un bas niveau des eaux. De source désormais officielle, en effet, une telle tendance baissière des eaux remonte à 1984, soit 33 ans auparavant. On se retient de dire, en revanche, que c’est l’année où le Mali a connu sa dernière grande sécheresse avec sa cohorte de disette alimentaire pour les hommes et les animaux. On en est peut-être loin et très loin, mais les paysans ne se nourrissent pas non plus d’illusions : ils redoutent en clair une récolte largement en deçà des attentes pour une campagne agricole annoncée comme l’une des meilleures mais finalement contrariée par un brusque arrêt des pluies vers la dernière ligne droite de la fin de l’hivernage. Alors question : la donne sera-t-elle prise en compte dans les indicateurs macroéconomiques qui affichent du vert tout au long du quinquennat ? Rien de moins sûr car il est de notoriété publique au Mali que la croissance économique a toujours maintenu une cadence parallèle à la croisière de la pauvreté.
La Rédaction
Par Le Témoin