Investi le 04 septembre 2013 comme président de la République, Ibrahim Boubacar Keïta (IBK) vient de franchir le cap des 100 jours à la tête de notre pays. Si, le lendemain de son investiture, ses premiers actes avaient déçu plusieurs de ses compatriotes, ceux qu’il a posés ces derniers jours suscitent une lueur d’espoir.
A la présidentielle avortée d’avril 2012, personne ne prévoyait l’élection d’Ibrahim Boubacar Keïta à la présidence du Mali. Mais, depuis l’agression du Mali par les rebelles, le 17 janvier 2012, joints dans leur forfaiture par les terroristes d’Ançardine, du Mujao et de Boko Haram, aggravée par le coup d’Etat du 22 mars 2012, les choses ont tourné en sa faveur. Les Maliens ont, dans leur grande majorité, estimé qu’IBK était le seul homme politique à même de gérer la situation. Ainsi, tout au long de la campagne présidentielle, aidé par la junte, le peuple était fou d’IBK et ne parlait pratiquement que de lui. Ainsi, à l’issue du second tour du scrutin, le 11 août 2013, il a été plébiscité avec 77,6%.
Dès son investiture officielle en qualité de président de la République du Mali, le 4 septembre, puis intronisé le 19 du même mois, en présence du président de France et d’autres chefs d’Etat africains, les Maliens l’attendaient pour la résolution définitive de la question de Kidal et du cas du Général Amadou Haya Sanogo, accusé d’être l’auteur d’un charnier découvert récemment à Diago. Au lieu de s’attaquer à ceux-ci, comme l’attendait le peuple, IBK a commencé par libérer une première vague de 12 rebelles, prisonniers de guerre, vers la fin du mois de septembre. Puis une deuxième vague de 23, tous arrêtés « sur le théâtre des opérations » militaires dans le nord, le mercredi 2 octobre à Bamako. Cela, en application de l’accord de Ouagadougou, signé le 18 juin par le gouvernement malien de transition et trois groupes armés ayant leurs bases dans le nord du Mali : le Mouvement national de libération de l’Azawad (Mnla), le Haut conseil pour l’unité de l’Azawad (Hcua) et le Mouvement arabe de l’Azawad (MAA). Ensuite, il a procédé à la levée des mandats d’arrêt internationaux émis à l’encontre des présumés auteurs des atrocités commises dans le septentrion du pays, courant 2012, en application du même accord. Alors même qu’il a été élu pour rompre avec ce genre d’accord. Comme si cela ne suffisait pas, le parti présidentiel a autorisé certains «rebelles» concernés par ces mandats d’arrêt à se présenter, sous sa bannière, aux législatives. Ces décisions jugées impopulaires avaient semé le doute chez des compatriotes qui doutaient de plus en plus de sa capacité à pouvoir répondre à ses aspirations. D’où leur désespoir.
Au même moment, IBK a tenté de redorer son blason. Il a laissé la justice faire son travail librement dans le dossier des exécutions extrajudiciaires des soldats, après la tentative de contre coup d’Etat mené le 30 avril 2012 par les bérets rouges, et la mutinerie du 30 septembre qui a opposé des putschistes mécontents à leur mentor, Amadou Haya Sanogo.
En toute liberté, la justice a mis le grappin sur Sanogo, supposé être très proche d’IBK. Car il aurait pesé de tout son poids pour l’élection de ce dernier. Contre toute attente, IBK a lâché le supposé coupable, le Général 4 étoiles, pour qu’il réponde des actes à lui reprochés. Ainsi, le 27 novembre, il a été arrêté, inculpé et mis sous mandat de dépôt. Car, avait-il dit, personne n’est au dessus de la loi. Même si les personnes concernées par les mandats d’arrêt sont des «hommes supérieurs». Cet acte a permis à des Maliens de se réjouir et de commencer à croire en la justice du régime IBK. Dans la foulée, d’autres responsables militaires proches de Sanogo ont été placés sous les verrous.
Quelques jours plus tard, les Maliens ont assisté à un scénario inédit. Six magistrats et trois auxiliaires de justice ont été placés sous mandat de dépôt pour concussion, escroquerie, faux et usage de faux. Bien que n’émanant pas directement du Président IBK, cette action est considérée comme un message fort à tous ceux qui se croiraient «intouchables» de part leur fonction.
Après les aveux d’impuissance, en octobre, au sujet de la gestion de la situation de Kidal, il est passé à la vitesse supérieure. Durant sa tournée européenne de 10 jours, comme il en a l’habitude, IBK a craché la vérité aux parlementaires et journalistes européens. «Il n’est pas question que l’on traite le Mali comme un pays sujet, ce n’est pas le cas ! Il n’y aura pas d’autonomie, pas d’indépendance du Nord-Mali, je suis clair là-dessus ». Que cessent les interférences et le romantisme vis à vis des Touaregs», a-t-il affirmé. Ces insinuations faites à la France pour son attitude à l’égard du Mnla ont abouti à un changement de discours du Président François Hollande qui dévient de plus en plus dur avec ses anciens amis, pardon, ses forces auxiliaires du Mnla.
En conclusion, même si ces quelques actions ne suffisent pas à IBK pour redorer son blason, il y a une lueur d’espoir qui apparaît sur les visages des Maliens.
Oumar KONATE