Dans la nuit du mercredi au jeudi dernier, neuf candidats à l’élection présidentielle dernière, réunis au sein d’un nouveau collectif, ont rendu public un communiqué sur les difficultés liées à la tenue des élections législatives prévues pour le mois de novembre prochain selon le calendrier du ministère de l’Administration territoriale. Un report est plus que jamais nécessaire afin que celles-ci ne soient pas aussi instigatrices d’autres tensions comme celles de la présidentielle ayant engendré la contestation par les ¾ des candidats.
Ledit communiqué est signé par Oumar Mariko du parti SADI, Choguel Kokala Maïga du MPR, Dramane Dembélé de l’ARDEMA, Mamadou Traoré, Mohamed Ali Bathily de la plateforme Faso YI WELE, Mountaga Tall du CNID, Général Moussa Sinko Coulibaly de la Plateforme pour le Changement, Soumaïla Cissé de la plateforme Ensemble Restaurons l’Espoir et Daba Diawara ; tous candidats à l’élection présidentielle dont les deux tours se sont tenus respectivement les 29 juillet et 12 août derniers.
Vu les graves irrégularités et les fraudes massives qui ont émaillé les deux tours de la présidentielle dernière et l’impossibilité de tenir des élections législatives de façon transparente dans ces conditions d’organisation, le Gouvernement de Soumeylou Boubèye Maïga II devrait : « prendre la courageuse décision de les reporter et d’organiser des concertations » plutôt que de chercher à « obtenir la caution de la Cour Constitutionnelle pour un report », se sont indignés les candidats dans une déclaration commune, rendue publique le 26 septembre dernier.
En effet, dans la demande d’avis n° 884/PM-CAB du 10 septembre 2018, le Premier Ministre Soumeylou Boubèye Maïga avait saisi la Cour Constitutionnelle afin qu’elle donne son avis sur la prorogation du mandat des Députés , vu « les difficultés contextuelles d’ordre administratif et politique consécutives à l’opérationnalisation des nouvelles Régions administratives, notamment leur représentation à l’Assemblée Nationale et la nécessité de conduire les réformes qui s’imposent désormais». Une demande d’avis qui a été répondue, mais, comme pour « gêner l’opposition qui avait engagé des poursuites contre elle». La Cour n’a pas donné un « avis positif », apprend-on dans les écrits des neuf candidats susnommés. Selon eux, des solutions idoines doivent être d’abord envisagées pour les difficultés reconnues et soumises à la Cour Constitutionnelle, celles découlant de l’élection présidentielle contestée, celles ayant empêché la tenue des communales dans plusieurs dizaines de circonscriptions et de la présidentielle dans plusieurs centaines de Bureaux de vote et, enfin, celles relatives aux multiples reports des élections locales et régionales qui n’ont toujours pas pu se tenir. « Toutes ces difficultés et l’impossibilité de les surmonter sont connues », affirment-ils.
Face à l’attitude du Gouvernement et la Cour Constitutionnelle qu’il qualifie de « dérisoires », le collectif y soupçonne un énième complot au sommet de l’État officieusement cautionné par les neuf sages qui, en 2012, avaient pourtant prorogé le mandat des Députés à l’Assemblée Nationale à la base d’un consensus politique des acteurs maliens consacré par l’article 7 de l’Accord-cadre du 6 avril 2012 relatif à la mise en œuvre de l’engagement solennel du 1er avril 2012.
En outre, la Cour Constitutionnelle avait, sur saisine du Premier Ministre et par avis n° 2012-003/CC du 31 mai 2012, également prorogé le délai de l’intérim présidentiel (prévu par la Constitution pour 40 jours maximum) jusqu’à l’élection d’un nouveau Président de la République lors de la Transition de 2012. Les candidats se sont dits « curieux » de voir la même Cour dans ce refus alors que les dispositions de la Constitution du Mali n’ont pas été modifiées.
Ensuite, dans ledit communiqué, le collectif a rappelé que le mandat du Haut Conseil des Collectivités du Mali a expiré depuis le 25 mars 2012 et que la Cour Constitutionnelle, elle-même, a fermé les yeux et validé ce fait en permettant à ses membres non réélus et d’autres conseillers municipaux de parrainer des candidats à l’élection présidentielle avant d’ajouter que « des élections communales n’ont pas pu encore se tenir dans de nombreuses communes. Un gage de la possible tenue de l’élection législative sur l’ensemble du territoire national aurait été le couplage des législatives avec les communales dans les localités où celles-ci n’ont pas pu encore se tenir». Le collectif a, aussi, déploré la «pleine illégalité» dans la mesure où les candidats n’ont pas pu et ne peuvent pas, selon les organisateurs de la consultation électorale, déposer leurs dossiers dans l’intégralité du temps imparti pour ce faire. Ce, en raison de la grève illimitée des Magistrats en cours.
La mise en garde
La précipitation de la tenue de ce scrutin législatif alors que les tensions s’amplifient du jour au lendemain après la présidentielle qui s’est tenue sur fond de forfaitures des organes en charge notamment le Gouvernement et la Cour Constitutionnelle n’est pas fortuite. Il y aurait bien-là une énième mascarade électorale. C’est du moins les grandes lignes dudit communiqué qui a fait aussi une mise en garde sévère contre toutes les surenchères liées à l’impatience des futurs « Députés nommés », car ces Législatives ne seront que pour la forme. « Nous savons que des amis, parents, alliés et soutiens ont négocié des sièges parlementaires en échange de leur soutien à la présidentielle. Nous savons de façon très précise quels sont les quotas de Députés attribués à tel ou tel soutien dont certains évoluent d’ailleurs en dehors de toute sphère politique », ont-ils entonné avant d’inviter tous ceux qui ont en souci la consolidation de la démocratie au Mali, le confort de nos Institutions, la paix et la stabilité du Mali d’amener les organisateurs de l‘élection législative à surseoir à leur tentative de passer en force, de leur demander de dire aux Maliennes et aux Maliens la vérité sur l’impossibilité de respecter les dates annoncées.
Seydou Konaté : LE COMBAT