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L’échec de la politique nigérienne de la CEDEAO

Les tentatives de la Communauté Économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) d’infliger une défaite aux militaires nigériens dans le conflit qui les oppose afin d’instaurer l’ancien président du pays ont complètement raté leur objectif alors que Niamey continue de tenir bon face à la menace de force hésitante de l’organisation sous régionale et ses sanctions imposées aux nigériens ordinaires.

Il est temps de mettre de côté les évaluations optimistes alimentées par une propagande de guerre superficielle et assourdissante par les médias occidentaux et ceux des pays va-t-en guerre de la CEDEAO. Le problème est que la CEDEAO est devenue victime de sa propre propagande. Au début des événements du Niger, elle s’est persuadée qu’elle pourrait convaincre l’Afrique et le reste du monde d’envoyer des troupes au Niger pour affronter les forces militaires nigériennes. Or, elle rencontra plutôt une hostilité populaire à travers le Niger et le continent où le sentiment qu’une bonne partie des dirigeants africains sont redevables à des forces extérieures est déjà profondément ancré dans l’opinion publique.

La stratégie du bloc économique dirigé par le Nigeria et la Côte d’Ivoire, qui repose jusqu’à présent sur des sanctions massives et sur la logique de l’escalade, n’a pas réussi à provoquer la restitution de l’ancien président au pouvoir tant espérée de la CEDEAO et de ses partenaires occidentaux. Pendant ce temps, les sanctions sévères téléguidées par la France au Niger ne l’ont pas mise en faillite ni paralysé son économie, et l’objectif d’isoler Niamey n’a en aucun cas été atteint. Leurs sanctions inhumaines dont les objectifs sont mal définis ne fonctionnent pas comme prévu et n’arrivent toujours pas à changer le comportement de leurs supposées cibles ; au contraire, elles sont non seulement entrain de nuire inutilement aux pauvres innocentes et vulnérables populations nigériennes, mais aussi et surtout, saper les efforts diplomatiques visant à promouvoir la paix et le retour à une vie constitutionnelle normale. Elles ont aussi miné l’économie régionale et nuiront sans doute aux futures perspectives d’investissement d’intégration eu égard à la gestion de la distribution de l’électricité par le Nigeria durant cette même crise. Eneffet, ces sanctions visant à réintégrerl’ancienprésident déclaré vainqueurd’une élection présidentielle simulée au Niger incitent plutôt à la défiance et au mépris. Force est de reconnaitre que les mesures punitives illimitées et ambitieuses pour évincer les militaires n’ont eu que l’effet inverse à présent. Les espoirs occidentaux de troubles politiques intérieurs dans le pays ne se sont pas non plus concrétisés.

En outre, le coup d’état au Niger a davantage révélé l’incapacité de la CEDEAO à développer une stratégie commune efficace et à exprimer un leadership politique et économique autonome. Au lieu de cela, c’est devenu un autre indicateur de la courbure du bloc économique envers les Occidentaux. Et, certains dirigeants de la CEDEAO semblent s’adonner à un jeu de rivalités géopolitiques qui polarise davantage et risque de coutertrès cher à toute la sous-région. De plus, les événements au Tchad et au Gabon ont mis un autre projecteur sur les relations dysfonctionnelles des pays occidentaux et particulièrement de la France avec ses anciennes colonies en Afrique et sur la manière dont le soutien occidental à certains élites et leaders africains, toujours liés au cordon ombilical occidental, est tout aussi corrosif pour la gouvernance démocratique que les coups d’État militaires auxquels les leaders occidentaux prétendent s’opposer. Il n’est pas une illusion naïve de se poser la question de savoir s’il y a encore l’éthique et la morale dans le politique de nos jours.

Il faut un sérieux changement de conscience politique africaine. Il faut accepter que l’occident ne changera pas ses politiques africaines de son propre gré. Ce n’est pas non plus un président français qui va décréter la fin de la françafrique. C’est à l’Afrique de redresser les leaders occidentaux en matière de paternalisme et leur donner une nouvelle perspective. Cela commence d’abord en mettant fin à la saisonsombre du leadershipafricain. Nous devons mettre fin aux régimes de dirigeants africains sans conscience d’indépendance pour défendre la souveraineté de leurs pays ou protéger les libertés et le développement social et économique de leurs peuples en raison du libéralisme néocolonial, de l’avidité politique et de la corruption.

De même, il peut sembler incompréhensible pour beaucoup d’entre nous ; mais, la réalité est que certains dirigeants occidentaux comme leurs alliés africains, qui ont été en dessous de tout ces temps-ci, continuent de croire à leurs affabulations en ce qui concerne leurs politiques africaines. Ces leaders occidentaux et leurs soutenus partenaires de la CEDEAO feront mieux de reconnaitre en toute honnêteté que leurs politiques qui étaient jusqu’ici uniquement et exclusivement fondées sur les sanctions zombies et la belligérance ont échoué et qu’il faut peut-être accepter de procéder autrement et notamment d’opter pour une politique de dialogue constructif dans le but de résoudre cette crise et surtout d’opérer une transition opportune et ordonnée. Malheureusement, il semble que leur morgue ne leur permet pas d’être sages et bâtisseurs du futur mais des destructeurs de sociétés et de nations.

Cheick Boucadry Traore

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