«Je suis blanc comme neige puisque nous avons respecté toutes les procédures. Nous avons versé l’argent au Trésor public”
Pour le maire de la Commune urbaine de Koulikoro, Eli Diarra, la vente du bâtiment abritant le Centre d’état civil secondaire de Koulikoroba à l’Institut national de prévoyance sociale (Inps) à 75 850 000 Fcfa est un faux débat puisque toutes les procédures ont été respectées. Selon lui, l’argent a été versé au Trésor public, qui servira à financer d’autres projets d’investissement au niveau de Koulikoro. D’ores et déjà, la Mairie a entamé la construction d’un nouveau Centre d’état civil secondaire.
Le maire de la Commune urbaine de Koulikoro, Eli Diarra, a finalement réagi suite à notre article intitulé : ” Vive tension à Koulikoro : le Maire Eli Diarra accusé de vente illégale du bâtiment du Centre d’état civil secondaire de Koulikoroba à l’INPS à 75 millions de Fcfa” paru dans le numéro 113 du vendredi 6 avril 2018. Alors que nous avions tenté de le joindre en vain pour prendre sa version des faits, avant la publication de cet article.
C’est dans une atmosphère très tendue que nous nous sommes entretenus avec ce jeune maire (il est élu Urd) dans son bureau en début de soirée de lundi dernier. D’un coup, il a rejeté toutes les accusations portées contre lui par le porte-parole du Collectif des conseillers pour la gestion transparente de la mairie, Sidi Moctar Fofana dit Chérif, notamment sur sa gestion opaque de la vente “illégale” du bâtiment abritant le Centre d’état civil secondaire de Koulikoroba. Pour le maire Eli Diarra, ce bâtiment a été vendu dans la plus transparence totale. “Nous avons respecté toutes les procédures requises pour la vente de ce bâtiment. Nous avons d’abord effectué l’expertise de l’endroit qui nous a donné une valeur de 75 850 000 Fcfa. Après la lettre de manifestation d’intérêt, nous avons procédé à la vente à l’Inps pour un montant de 75 850 000 Fcfaavec l’acte notarié. Et l’argent a été versé au Trésor public. C’est pour vous dire que je suis blanc comme neige concernant cette affaire” nous a confié le maire Eli Diarra, visiblement très à l’aise. Selon lui : “Depuis le 26 septembre 2017, le Conseil a délibéré pour la construction d’un nouveau Centre secondaire à Koulikoroba parce que nous avons estimé que l’utilité de ce centre est nécessaire. L’ancien lieu était un vieux magasin récupéré, qui a été finalement aménagé pour être ériger en Centre d’état civil secondaire. Malheureusement aussi, cet endroit se trouve à l’entrée même du marché. Ce qui fait que l’accès devient très difficile. Les nombreux bruits font que les gens ne fréquentent plus ce Centre. Pour ceux qui connaissent Koulikoro, les dimanches, c’est le jour des foires et des mariages aussi. Donc, toutes les populations de Koulikoroba préfèrent célébrer leur mariage à la mairie centrale. Ce qui créée des embouteillages terribles chaque jour dans la ville. Raison pour laquelle, nous avons décidé de construire ce nouveau centre plus accessible à toute la population près du Stade de football. Cela a été décidé avec 29 votants sur 29”. Avant de préciser que ce projet fait partie d’une promesse de sa campagne électorale.
S’agissant du bâtiment du Centre d’état civil secondaire, Eli Diarra précise : “Ce sont les retraités qui ont demandé à la Direction régionale de l’Inps de leur trouver un guichet à Koulikoroba puisqu’ils parcouraient plus de 10 km pour venir prendre leur pension. C’est pourquoi, depuis 2013, bien avant notre arrivée, la Mairie avait autorisé l’Inps à construire un guichet dans l’enceinte du Centre, qui occupe les ¾. Et si nous devons construire un nouveau centre, il est nécessaire de faire une manifestation d’intérêt à l’Inps pour que le bâtiment ne soit pas utilisé par des privés ou que quelqu’un d’autre ne vienne pas l’utiliser autrement. Ce qui va nuire aux veilles personnes. C’est pour cela que nous avons décidé d’envoyer une lettre à l’Inps pour l’informer qu’il occupe déjà les ¾ du Centre. Et nous avons ensuite demandé à l’Inps s’il est intéressé par la vente. Ils ont répondu favorablement. C’est ainsi que nous avons convoqué une session, le 20 février 2018 pour délibérer sur la vente de ce bâtiment. Sur 29 conseillers, 23 ont approuvé “.
Aux dires du maire Eli Diarra, cette campagne est purement politique puisqu’il est maire Urd. Alors que sa seule ambition est de contribuer au développement de sa commune et à l’amélioration du bien-être de sa population. “C’est devenu une habitude maintenant. A chaque veille des élections, je deviens un homme à abattre” dira-t-il.
Notons que la Mairie est composée de 29 conseillers dont 14 élus du parti l’Urd et 6 du Rpm. “Pour nous, il n’y a pas une question de partis, c’est plutôt une question de développement. Même le Rpm a voté à 100% pour la vente du bâtiment. Et tous les acteurs concernés ont été impliqués. Nous avons même eu l’aval du préfet, ainsi que celui des notabilités. Je ne vois pas où se trouve le problème dans cette affaire puisque l’argent a été versé au Trésor public. Je suis prêt à fournir toutes les preuves à qui de droit. C’est pour vous dire qu’il n’y a pas eu de détournement dans cette affaire. Je suis là pour le développement de ma commune. Malheureusement, quand vous voulez faire la transparence, on vous traite de tous les noms d’oiseau. Je pense que personne ne pourra me défier dans ce dossier”. Parole du maire Eli Diarra !
S’agissant de sa gestion au niveau de la mairie, Eli Diarra estime qu’il est à l’aise aujourd’hui. “Nous avons une gestion transparente. Nous nous battrons pour le développement de notre commune. C’est pour vous dire qu’il n’y a pas de détournement chez nous. Quand nous sommes venus, il n’y avait pas d’électricité, pas d’eau, pas de téléphone à la Mairie. Nous avons trouvé que toute la cour était délabrée, les toilettes étaient salles. Pour la petite histoire, mon propre bureau a été aménagé par moi-même à mes propres frais. Nous avons aménagé les espaces verts au niveau de la ville. Nous avons réalisé des salles de classe, des forages avec le concours du gouvernement. Nous avons dégagé les montages d’ordures au niveau de la ville puisque notre ambition, c’est d’avoir une ville propre pour le bien-être de la population. Aujourd’hui, la vile est nettoyée régulièrement par les femmes de Koulikoro. En tant que natif de Koulikoro, tout ce que je fais pour ma ville, je suis venu trouver que les autres l’ont d’abord fait pour moi. Je suis en train de me battre pour Koulikoro parce que j’ai constaté que les jeunes ne se sentaient plus en confiance dans leur propre commune”.
S’agissant de la santé financière de la mairie, Eli Diarra répond : “La Mairie se porte très bien. Nous ne sommes pas endettés. C’est vrai que nous sommes venus trouver qu’il y a des dettes. Dans nos comptes administratifs, vous ne verrez plus d’arriérés de payement de factures d’électricité. Nous avons établi un budget réaliste estimé à plus d’un milliard. Alors que nous sommes venus trouver que le budget était à 8 milliards Fcfa, mais jamais réalisé. Il ne s’agit plus de masquer les chiffres”. A.B. HAÏDARA
Sidi Moctar Fofana dit Chérif, porte-parole du collectif des conseillers municipaux de koulikoro persiste et signe :
“Il n’y a jamais eu de délibération autorisant le maire d’aller vendre le centre secondaire d’état civil de Koulikoroba”.
Le Conseil a seulement donné l’autorisation au maire d’entreprendre des démarches pour la vente. En effet, après avoir effectué des démarches, le maire devrait convoquer une session extraordinaire pour faire une restitution de sa démarche au Conseil communal, chose qui n’a jamais été faite jusqu’à preuve du contraire. Il a, tout seul, de gré à gré, vendu le bâtiment à l’Inps. Aucun conseiller n’a ni de près ni de loin été impliqué à cette vente. Il a lui seul négocié le prix de la vente. Alors que la vente, à n’importe quel partenaire, doit se faire sur la base de sa restitution au Conseil municipal et avoir l’assentiment dudit conseil. A contrario, un appel d’offre public sur la base d’un prix plancher doit être organisé, en collaboration avec la Direction régionale des marchés publics. Le rôle d’un maire n’est pas de vendre le patrimoine public de la communauté.
De même, le bâtiment faisant partie d’un patrimoine de la communauté doit être cédé avec le consentement de cette communauté. Le chef de quartier de Koulikoroba 2 et ses conseillers nous ont alertés, comme quoi, ils n’ont été ni de près ni de loin impliqués à cette procédure de vente. Personne n’est contre la construction du nouveau centre secondaire d’état civil. Le maire sortant et son Conseil avaient déjà délibéré là-dessus. Ils avaient même demandé le financement auprès du projet Pacum (Programme d’Appui aux communes urbaines du Mali). Par contre, nous sommes formellement contre la vente de l’ancien bâtiment, qui pour nous, représente un symbole, une référence pour la communauté de Koulikoroba, du point de vue de son histoire. C’est la même chose que si on demandait la vente du bâtiment de la Mairie centrale de Koulikoro et le bâtiment de la Préfecture. “Tout n’est pas à vendre”. Le bâtiment de la Mairie secondaire de Koulikoroba peut servir à autre chose et la loi est formelle sur la vente des patrimoines de la commune. Donc que le maire se ressaisisse avant qu’il ne soit trop tard. Quand il parle de manifestation d’intérêt avec l’Inps, cela sous-entend que le contrat de vente aurait déjà été conclu avant la session. Sur d’autres plans, au lieu de faire face au paiement des arriérés de salaire du personnel de la Mairie, avoir un bon système de recouvrement des recettes de sable et gravier, les taxes de sorties de véhicules de transports et d’amener des projets de développement qui peuvent être un facteur de réduction du taux de chômage de la jeunesse de Koulikoro, le maire s’adonne à la vente du patrimoine de sa communauté.
Nous avons aussi constaté avec amertume et étonnement que la construction du nouveau centre secondaire d’état civil a commencé à Sokourani sans que le Conseil ne donne son avis sur le montant, le plan et l’entreprise qui devrait effectuer ce travail. Encore un constat de gré à gré entre le maire et son clan.
Nous sommes responsables de nos propres malheurs en laissant le temps à certains hommes politiques qui n’ont ni foi ni conviction ni repère détourner les ressources de la commune en essayant d’acheter la conscience des citoyens aveugles. Ce n’est pas le maire qui paye l’électricité et l’eau de la Mairie. Elles sont payées par les ressources de la Mairie. Avant l’arrivée du maire actuel, son bureau et ceux de ses adjoints étaient déjà équipés par le maire sortant.
Les personnes honnêtes ne sont plus nombreuses, c’est le courage et l’intelligence qui peut changer les données. Je ne suis pas contre une personne, mais contre un système.
En ma qualité de conseiller municipal, j’ai pour rôle de contrôler la gestion des ressources de ma commune, sans état d’âme, sans affinité, sans appartenance politique”.
Propos recueillis par A.B. HAÏDARA
Aujourd’hui-Mali