Décidément la question touarègue demeure l’énigme de tous les rebondissements au Mali. L’on aura tout vu et tout entendu, au point que l’on serait aujourd’hui tenté de qualifier cette question de véritable film hollywoodien et dans lequel la contradiction, la médisance, l’irresponsabilité et le narcissisme sont devenus des valeurs pour les différents acteurs. Et comme si l’on n’en avait pas marre du MNLA, d’ANSARDINE, du MIA, du HCA…s’ajoute aujourd’hui le dernier né du caprice azawadien : le Haut Conseil pour l’Unité de l’Azawad.
Nul besoin d’être dans le secret des Dieux pour voir derrière cette énième tentative de restructuration de la rébellion touarègue la main cachée de certains de ses parrains historiques dont la France et la crédulité de certains observateurs notamment les autorités de transition qui y voient une opportunité pour neutraliser le MNLA. Ce nouveau mouvement peut être une alternative pour résoudre la situation actuelle de Kidal tout en y rendant possible la tenue des élections ; mais il est loin d’être une solution définitive. Et tenter aujourd’hui de s’appuyer sur ce mouvement pour neutraliser le MNLA par le biais du dialogue, reviendrait tout simplement à déplacer le problème touareg et donner au MNLA ce qu’il n’a pas pu obtenir par les armes. Deux arguments pourraient justifier cette position à savoir les hommes qui incarnent ce nouveau mouvement et éventuellement les répercussions historiques qui pourront en résulter.
Les patrons de ce haut conseil pour l’unité de l’Azawad ne sont autres que des dissidents du MNLA et d’ANSARDINE. Et cette initiative du chef traditionnel Inttala Ag Attaher n’est ni plus ni moins qu’un repositionnement stratégique et une restructuration terminologique du MNLA étant donné que ce dernier est fini tant politiquement, militairement que moralement. S’il est donc établi que le chien ne change jamais sa manière de s’asseoir, il revient au gouvernement malien de comprendre que le MNLA, le MIA, le HCA et le HCUA demeurent identiques et ne visent que le même intérêt : le monopole de ce qu’ils appellent outrageusement l’Azawad pour assouvir leurs intérêts mafieux, claniques et identitaires.
Par ailleurs, et pour ne pas commettre les mêmes erreurs du passé, les autorités de transition ont intérêt à aller sur la base de la transparence, de l’équité entre différentes tribus du Nord, de la justice qui implique la traduction devant les tribunaux des coupables de meurtres, viols et autres forfaits et surtout de l’objectivité en dialoguant sur des bases claires et sans ambigüité. L’objectif de ces mesures de précaution est de ne pas aller vers un deal politique, ayant pour seule vocation de déplacer le problème et, susceptible de compromettre le Mali comme ce fut le cas avec les gouvernements précédents.
L’enjeu aujourd’hui pour le Mali ne devrait seulement pas reposer sur la nécessité d’organiser des élections à Kidal, mais éviter d’aller vers un compromis contre nature avec des groupes peu crédibles au nom de la tenue d’élections qui ne se sont jamais d’ailleurs déroulées dans les règles de l’art dans cette partie du territoire. Ceci n’est qu’un secret de polichinelle. L’autre enjeu et non moins négligeable est que les autorités de la transition donnent l’impression de plus vouloir déplacer le problème que de le résoudre, en voulant plus ou moins satisfaire tout le monde à la fois.
Fousseyni MAIGA