L’Ukraine accentue son offensive diplomatique pour la création d’un tribunal international spécial sur le crime d’agression, seul moyen, selon Kiev, de voir Vladimir Poutine personnellement et rapidement inquiété par la justice internationale. Le président russe peut, en théorie, être visé par les enquêtes de la Cour pénale internationale (CPI) pour crimes de guerre, crimes contre l’humanité et crimes de génocide. Mais, outre que ces enquêtes s’inscrivent généralement dans des durées courant sur de longues années, l’Ukraine craint que le procureur de cette juridiction internationale ne trouve pas de preuves d’ordres directs reliant le sommet de l’Etat russe aux crimes commis par les soldats dans les villes ukrainiennes occupées.

Le président ukrainien, Volodymyr Zelensky, a consacré une partie de son discours prononcé par visioconférence devant l’Assemblée générale des Nations unies, le 21 septembre, au projet de tribunal sur le crime d’agression. Estimant que la Russie « doit payer pour cette guerre », il considère que la création d’un tel tribunal ad hoc « enverra un message à tous les agresseurs potentiels pour leur montrer qu’ils doivent respecter la paix ». Le lendemain, le 22 septembre, il annonçait la constitution d’un groupe de travail à Kiev destiné à aboutir à la « création rapide » de ce tribunal, avec notamment les ministres des affaires étrangères, Dmytro Kuleba, et de la justice, Denys Malyuska, ainsi que l’ambassadeur ukrainien pour le droit international humanitaire, Anton Korynevytch.

Soutien occidental

L’annonce présidentielle ukrainienne n’est en fait que l’officialisation d’une cellule mise en place dès les premiers jours de la guerre, après que l’avocat franco-britannique Philippe Sands a proposé la création d’un tribunal spécial sur le crime d’agression, le 28 février, dans une tribune publiée dans Financial Times. Estimant que Vladimir Poutine « pose le défi le plus grave à l’ordre international post-1945 », M. Sands proposait d’instaurer, sur le modèle du tribunal de Nuremberg, et par le biais d’un traité multilatéral, une cour « pour enquêter sur Poutine et ses acolytes » sur le crime d’agression, baptisé « crime contre la paix » à l’époque du procès des dignitaires nazis.

Le plan diplomatique et le dispositif juridique ont ensuite été préparés pendant six mois par les diplomates et les juristes de Kiev, avec l’aide de leurs conseillers étrangers. Le discours et l’annonce de M. Zelensky sont désormais liés au fait que l’Ukraine veut tenter d’obtenir le soutien de quatre capitales occidentales, Washington, Londres, Berlin et celle qu’elle considère comme la plus réticente, Paris.

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Source: Le Monde