Dans quelques jours, plus précisément le vendredi, les Maliens célébreront le premier anniversaire du renversement du régime le plus corrompu que notre pays ait jamais connu depuis son accession à l’indépendance le 22 septembre 1960. Si les jeunes militaires ont, dans leur première déclaration, suscité l’espoir dans le but de jeter les bases d’un nouvel Etat, la bourgeoisie compradore bamakoise n’attendait pas de cette oreille. Elle a combattu les militaires et toutes et tous ceux qui croyaient à un nouveau départ avec l’argent volé à leurs parents, victimes de toutes sortes d’abus des soit- disant démocrates.
Qu’à cela ne tienne. Le courage patriotique des membres du Comité national pour le redressement de la démocratie et la restauration de l’autorité de l’Etat (CNRDRE) doit être salué à sa juste valeur. Ils ont le mérite de débarrasser notre pays de la racaille de politiciens qui s’est emparée du pouvoir au nom de la démocratie en juin 1992.
Arrivés au pouvoir par la voie des élections truquées, les démocrates n’ont cessé de creuser leur propre tombe par les actes de défiance qu’ils posaient à longueur de journée. Il ne passait pas de jour sans qu’ils ne soient cités dans des affaires de corruption, de malversations, de surfacturation, de détournements de deniers publics ou leur entourage immédiat.
Le foncier est devenu une affaire juteuse pour les démocrates sincères et patriotes convaincus. Ils se sont accaparés de toutes les réserves foncières de Bamako et de Kati, privant les paysans de leur seule source de revenus.
Dans cette course effrénée à l’enrichissement illicite, ils ont mis en faillite les sociétés et entreprises d’Etat, avant de les racheter au nom de la privatisation. Conséquences : des milliers de chefs de famille se retrouvent dans la rue sans travail. Ensuite, ils ont mis le grappin sur les bâtiments administratifs, achetés à vil prix, les espaces verts, les emprises du fleuve Niger et les rivières qui l’alimentent. Les quartiers des pauvres sont démolis au nom de «Sauvons notre quartier» et redistribués aux membres des clans qui n’ont qu’un seul souci : l’argent facile.
Le summum de cette recherche de l’argent facile sera atteint par la création d’une bourgeoisie locale parmi laquelle on comptait déjà en 1999, vingt et un (21) milliardaires dont 16 fonctionnaires. Cette information de taille est consignée dans un rapport de la Banque mondiale intitulé «Les lignes de travail dans la lutte contre la corruption». Cette mission de la Banque mondiale, dirigée par Jacke Tistwork, a séjourné dans notre pays du 14 mars au 5 avril 1999.
Les démocrates ont contribué à leur chute
Pire, les vingt (20) de gestion démocratique dans notre pays n’ont servi qu’à fabriquer des mythes. Des gens sortis de nulle part sont parachutés à des postes à responsabilité dont ils n’ont aucune compétence pour donner une lueur d’espoir au peuple. Les démocrates, transformés en héros de la lutte contre la dictature, sont pour la plupart des hommes qui ont été sanctionnés administrativement par le général Moussa Traoré ou limogés parce que trempés dans des affaires de malversations (certains d’entre eux n’ont même pas fait six mois à leur poste).
Mais il a fallu que Moussa tombe pour qu’on chante les louanges de ces prédateurs de notre économie. L’arrivée d’une telle pourriture au pouvoir ne pouvait qu’enfoncer le pays dans le gouffre.
Ils n’ont rien entrepris pour que le peuple malien puisse aspirer au bonheur. Les programmes et projets de développement sont conçus pour ne pas survivre après un premier directeur. L’école est l’exemple le plus édifiant.
En 20 ans, elle a été le laboratoire d’expérimentation de plus de dix systèmes. Chaque ministre élabore un système pour se faire les poches. Ainsi, ils ont sacrifié la qualité de l’enseignement sur l’autel des ambitions égoïstes.
N’en parlons pas de l’armée. Les démocrates avaient dans leur projet la dissolution de notre armée. Raison pour laquelle, ils n’ont acheté aucune arme. Par contre, ils ont détruit les armes qui faisaient la fierté de notre armée. La Flamme de la paix, la poudrière de Kati sont passés par là.
En un mot, ils ont bafoué la souveraineté de notre pays. Et le pot aux roses a été découvert par l’envahissement des 2/3 de notre pays par des étrangers et des apatrides maliens avec lesquels les autorités issues des urnes faisaient le trafic de drogue (Air Cocaïne) et se partageaient les rançons que les Européens payaient pour la libération de leurs otages.
22 mars 2012, un nouveau départ pour le Mali
Si un coup d’Etat intervient dans ce contexte, il est à saluer et doit être applaudi des deux mains. Ceux qui ont osé les 21 et 22 mars 2012, ont agi pour les intérêts supérieurs du peuple malien. N’en déplaise aux détracteurs des militaires du 22 mars qui continuent encore de bénéficier des privilèges de l’Etat. Le coup d’Etat du 22 mars 2012 a été un tournant dans l’histoire politique de notre pays. Il a contribué à un éveil de conscience chez bon nombre de Maliens, désespérés par le comportement crapuleux de leurs dirigeants. Et le peuple malien ne cessera de remercier les militaires qui ont mis à nu le système de corruption hissée en mode de gouvernance. Vos noms resteront gravés en lettre d’or sur les pages politiques de notre histoire.
Qu’on ne se trompe pas de combat, s’il ya eu coup d’Etat que les Maliens sachent que notre démocratie n’en était pas une. C’était un mirage dont on ne cessait de qualifier de modèle en Afrique. La démocratie malienne ne reposait sur aucun ressort qui pouvait empêcher la prise du pouvoir par les armes. La tension politique au Sénégal à la même date était plus vive qu’au Mali. Mais c’est par les urnes que les électeurs sénégalais ont chassé Me Wade du pouvoir.
En tout cas, ce coup d’Etat est un avertissement pour les dirigeants qui seront issus des urnes en juillet prochain.
Yoro SOW
Source: Inter de Bamako