- L’Armée comme reflet de la nation…
La force de l’armée repose sur la confiance que les citoyens portent sur l’institution militaire. Autrefois, cette confiance s’appuyait sur une profonde connaissance du métier de soldat, grâce notamment au service militaire obligatoire. Ceci n’est plus le cas aujourd’hui, mais les citoyens maliens gardent toujours un lien fort affectif avec l’armée qui, comme toutes les autres institutions de l’Etat, est une émanation de la nation. Pendant des décennies, aussi longtemps que le peuple du Mali est resté uni, notre armée a été citée en exemple dans la sous-région ouest africaine. Mais aussitôt que les communautés qui forment la nation sont divisées ou que l’armée elle-même enregistre des scissions à l’interne, elle s’affaiblit et devient incapable de vaincre. Une armée ne pourra jamais vaincre dans un contexte national de division, de rébellion et de guerre civile. Une armée forte est toujours l’attribut d’un Etat fort, capable d’imposer l’autorité de la loi ; le respect de l’ordre public ; le maintien de la cohésion sociale. C’est pour dire que le succès d’une armée dépend de plusieurs facteurs sociologiques dont la confiance des citoyens notamment, qui doivent accompagner les capacités matérielles, humaines et logistiques suffisantes. Ces facteurs combinés déterminent largement la motivation des soldats et favorisent la mobilisation des troupes sur le terrain. Mais pour impulser cette dynamique dans le tout corps social, il faut au préalable un cadre de bonne gouvernance et de transparence dans la gestion des affaires publiques à tous les niveaux de l’Etat.
- L’Armée, l’hypersensible sociale…
L’idée que l’armée est à l’image de la nation renvoie par ailleurs à l’hypersensibilité de l’institution militaire aux réalités sociales. Les dérives sociales liées au cadre global de l’exercice du pouvoir politique affectent inéluctablement l’armée en tant que composante de la société. Ainsi, la corruption ; le népotisme ; le favoritisme ; le non-respect de la loi ou son application sélective sont autant de maux sociaux qui n’épargnent aucun secteur y compris celui de l’armée. Les irrégularités dans la sélection des soldats et les modes non orthodoxes de passation aux concours ont un impact négatif sur le dévouement des soldats et leur engagement sur le terrain. Une armée forte de soldats motivés ; sélectionnés sur des bases d’objectivité et de compétences ; équipés et bien entrainés. Ce sont là des facteurs rationnels qui conditionnent le succès des forces militaires sur le théâtre des opérations. Aux facteurs sociologiques et rationnels, il convient d’ajouter le facteur psychologique. Ce dernier élément renvoie à l’état d’esprit des soldats et à la perception qu’ils ont de la guerre. L’engagement des troupes militaires dans les opérations doit servir un but d’intérêt général et correspondre à une représentation sociale des valeurs défendues par la société. La cohérence des raisons de l’engagement des soldats avec l’intérêt supérieur de la nation est non seulement gage de sécurité pour les militaires et le fondement d’une solidarité inébranlable des citoyens à leurs égards. Ceci donne aux soldats le moral et l’ardeur de vaincre. Aucune ambiguïté ne doit exister sur la mission des soldats ni pour eux-mêmes ni pour les citoyens : c’est le principe de la confiance entre le peuple et son armée. Et cette confiance ne doit en aucun cas être rompue au risque de livrer l’institution militaire à toute sorte d’infortune et de forfait.
Ballan D., Politologue et Khalid D., Economiste.
Source: Bamakonews