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L’Algérie a organisé des funérailles de chef d’État pour Gaïd Salah

Exposée durant quatre heures au Palais du peuple, bâtiment d’apparat du centre de la capitale, la dépouille du général Ahmed Gaïd Salah devant laquelle hauts dignitaires et citoyens se sont recueillis a pris, sur un affût de canon tiré par un véhicule de transport de troupes blindé, le chemin du cimetière d’El Alia, à une dizaine de kilomètres. Chef d’état-major depuis 2004 de l’armée algérienne, institution pilier du régime qui dirige l’Algérie depuis son indépendance en 1962, le général Gaïd Salah, décédé lundi à 79 ans d’une crise cardiaque, y sera inhumé peu après la prière de l’après-midi, vers 12 heures GMT, au sein du carré des Martyrs, où reposent les anciens chefs d’État et grandes figures de la lutte contre le pouvoir colonial français.

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Le déroulé de la cérémonie

Des « Allah Akbar » (« Dieu est grand ») et des youyous ont salué le départ du cortège funèbre, ouvert par un camion sur le plateau duquel ont pris place plusieurs officiers en uniforme de cérémonie et encadré par de nombreux motards de la police. Des milliers d’Algériens se sont rassemblés le long du parcours, certains accompagnant à pied le convoi et rejoignant une foule impressionnante rassemblée aux portes du cimetière, selon des images diffusées par la télévision nationale. Le cercueil a d’abord été exposé dès le matin au Palais du peuple, ancienne résidence des gouverneurs ottomans bâtie au XVIIIe siècle et devenue lieu de manifestations et cérémonies officielles de l’État algérien, où les hauts dignitaires de l’État lui ont rendu hommage. Recouvert du drapeau national et porté par plusieurs officiers, le cercueil y a été accueilli par le général Saïd Chengriha, qui assure l’intérim du chef d’état-major depuis son décès, accompagné d’autres responsables militaires. Entré en fonction il y a moins d’une semaine, le président Abdelmadjid Tebboune, élu le 12 décembre lors d’une présidentielle portée à bouts de bras par le général Gaïd Salah mais boudée par les électeurs, s’est recueilli devant le cercueil avant de présenter ses condoléances aux proches du défunt.

L’hommage des hautes personnalités de l’État

Sur le cercueil, entouré de quatre officiers de différents corps d’armée, reposait sur un coussin le collier de « Sadr » dans l’Ordre national du mérite, une dignité réservée habituellement aux chefs de l’État, à laquelle l’avait élevé M. Tebboune, lors de son investiture le 19 décembre, dernière apparition publique du général Gaïd Salah. Abdelkader Bensalah, effacé président par intérim entre la démission de Bouteflika et l’élection de M. Tebboune, et de nombreux autres hauts responsables de l’État se sont également recueillis devant la dépouille de celui qui était apparu ces derniers mois comme le gardien du « système » au pouvoir face au mouvement (hirak) de contestation populaire qui agite l’Algérie depuis fin février. Des citoyens sont ensuite entrés par petits groupes pour se recueillir tour à tour très brièvement devant le cercueil, avant son départ pour le cimetière.

L’illustration de sa puissance pendant ces huit derniers mois

Chef d’état-major de l’armée durant 15 ans – un record – et en outre vice-ministre de la Défense depuis 2013, le général Gaïd Salah a eu le droit à des funérailles que n’ont pas eu ses prédécesseurs. Durant plus de huit mois, il s’est affiché comme le maître du pays, donnant ses instructions à un pouvoir civil éteint depuis la démission du président Abdelaziz Bouteflika, et fut le visage public du haut commandement militaire, plus habitué à exercer son pouvoir en coulisses, derrière une façade civile. Nommé chef d’état-major en 2004 par le président Abdelaziz Bouteflika, le général Gaïd Salah fut jusqu’en avril d’une loyauté sans faille envers celui qui l’avait fait roi, avant de le sacrifier brutalement au mouvement inédit de contestation du régime, né un mois plus tôt. Son nom était conspué ces derniers mois dans les manifestations, pour la répression contre le hirak et pour son acharnement à organiser une présidentielle vue par la contestation comme un artifice permettant la survie du « système » dont elle exige le démantèlement. « Armée et peuple sont frères, et Gaïd Salah est avec les martyrs », a scandé dans la matinée la foule rassemblée devant le Palais du peuple, détournant un slogan du hirak dans lequel le chef d’état-major était traité de « traître ». À la télévision nationale, les commentateurs ont évoqué « un hommage exceptionnel pour un homme exceptionnel » qui a « inscrit son nom en lettres d’or dans l’histoire de l’Algérie ».

Le Point

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