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La transition dans la gadoue

Assurément la transition malienne va dans la mauvaise direction. Son volet politique est dans l’impasse à cause du conflit ouvert entre le premier ministre Choguel Kokalla Maïga, porte-étendard des idéaux du M5-RFP et le Cadre d’Echange des Partis et Regroupements politiques pour une Transition Réussie au Mali, autour de la tenue des Assises nationales de refondation de l’Etat et de la mise en place d’un organe unique pour la gestion des élections devant conduire à la normalité constitutionnelle.

 

Le chef du gouvernement est inflexible dans sa volonté de matérialiser ces deux projets inscrits dans le plan d’action gouvernemental adopté à une majorité écrasante par le Conseil National de la Transition (CNT), début août dernier. En face de lui la nouvelle coalition, constituée par tous ceux qui se sentent exclus ou laissés-pour-compte, ne démord pas de sa double décision de ne pas participer aux Assises nationales de refondation de l’Etat et de rejet de l’organe unique de gestion des élections.

Dans ces conditions le consensus devant marquer les réformes politiques et institutionnelles, indispensables à des élections apaisées et tous les autres actes de la transition pour en garantir la réussite, n’est pas réalisable.

Pire le chef du gouvernement n’exclut plus désormais une prorogation de la durée de 18 mois de la transition. Une disposition centrale de la charte issue des Concertations nationales de septembre 2020,  validée par la communauté internationale. Arguant qu’il appartiendra aux Assises, projetées pour octobre et dont les résolutions sont exécutoires, de décider s’il y a lieu de maintenir cette durée ou de la rallonger. Du coup il conforte les insuniations du Cadre d’Echange à son égard, selon lesquelles la tenue des Assises n’est qu’une manœuvre pour rester le plus longtemps possible à la primature et jouir des délices qui y sont rattachés. Il devra donc compter avec sa détermination  à ne pas le laisser faire et celle de nos partenaires stratégiques en Afrique et ailleurs dans le monde.

A cet égard la déclaration issue du sommet de la CEDEAO du jeudi 16 septembre est sans ambiguïté. Elle rappelle les autorités de la transition « au respect strict du calendrier devant conduire à la tenue effective des élections à l’échéance non négociable de février 2022« . Faute de quoi  » des sanctions ciblées seront prises contre tous ceux dont l’action impacte négativement sur le calendrier de la transition « .

Déjà le 31 août dernier, le Conseil de Sécurité de l’ONU avait exhorté, une fois de plus, les autorités de la transition à l’observance du calendrier électoral fixant la présidentielle au 27 février 2022.

Le volet sécuritaire de la transition n’est guère plus rassurant. En réaction au réaménagement annoncé du dispositif sécuritaire français au Sahel devant se traduire par un allègement des effectifs de Barkhane et subséquemment la fermeture des bases de Tessalit, Kidal et Tombouctou, « au premier semestre 2022« , indique-t-on, les autorités de la transition ont cru trouver le salut dans le recrutement de mercenaires russes. Lesquels – il importe de le relever- seraient payés en partie grâce à des concessions minières. Un choix surprenant au regard de la réputation sulfureuse de la société privée Wagner qui fournit ces mercenaires. Encore plus surprenant quand on sait les rapports entre les pays occidentaux, spécialement ceux de l’OTAN et la Russie ( le promoteur de Wagner serait un proche de Poutine). Le temps n’est assurément pas venu où l’on verrait des forces régulières françaises, européennes voire américaines évoluer en symbiose avec des paramilitaires russes sur un théâtre d’opération fût-il contre des terroristes. D’où le désaveu aussi prompt que tranchant venu de Paris, Berlin, Washington contre cette nouvelle dérive du partenaire malien après son incompréhensible penchant au dialogue avec ceux qui tuent les alliés venus à son secours et après ce deuxième coup d’Etat en neuf mois pour deux officiers non reconduits à des postes ministériels.

Ce fâcheux épisode est illustratif de la légèreté avec laquelle les décisions sont prises à une échelle élevée de l’Etat. Il n’est pas concevable, en effet, que l’on nourrisse l’idée de faire venir des mercenaires dans le pays sans que cela soit débattu au sein du CNT tenant lieu de représentation nationale, eu égard à la gravité du sujet et ses implications éventuelles.  Il est tout aussi inconvenant de concocter un tel dessein à l’insu de nos alliés stratégiques que sont le G5 Sahel, la France, la MINUSMA, la Task Force Takuba. Ils payent, à des degrés divers, un tribut à la lutte contre le terrorisme, ce monstre hideux qui a désarticulé le Mali, l’a plongé dans l’horreur, la misère, la détresse et posé une lourde hypothèque sur son développement. Une telle démarche participe à la fois de la traîtrise et de l’irresponsabilité. Et enfonce, un peu plus, la transition dans la gadoue, à six mois de son terme irrévocable.

Saouti HAIDARA

Source : l’Indépendant

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