La configuration géopolitique de la présence militaire française en Afrique connaît une transformation profonde. Après le Mali, le Burkina Faso et le Niger, qui ont expulsé les forces françaises de leur territoire, la Côte d’Ivoire s’engage à son tour dans cette dynamique en actant le retrait des troupes françaises stationnées sur son sol. Ce mouvement marque une redéfinition majeure des relations entre la France et ses anciennes colonies, dans un contexte où plusieurs nations africaines revendiquent leur souveraineté et leur autonomie stratégique.
La Côte d’Ivoire reprend le contrôle du 43e BIMA
Bamada.net-Le président ivoirien, Alassane Dramane Ouattara, a annoncé, dans son allocution de fin d’année 2024, que la base militaire du 43e Bataillon d’Infanterie de Marine (BIMA) située à Port-Bouët, Abidjan, sera officiellement rétrocédée aux Forces Armées de Côte d’Ivoire (FACI) dès janvier 2025. Cette décision s’inscrit dans une politique de modernisation des forces armées ivoiriennes, saluée par le chef de l’État qui a affirmé : « Nous devons être fiers de l’évolution de notre armée. Dans ce cadre, nous avons décidé d’un retrait concerté et ordonné des forces françaises. »
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Ce transfert symbolique traduit une volonté affirmée de consolider la souveraineté militaire ivoirienne. La base sera rebaptisée en l’honneur du Général Ouattara Thomas d’Aquin, premier chef d’état-major de l’armée nationale ivoirienne.
Un contexte régional en pleine reconfiguration
Cette décision ivoirienne intervient après des annonces similaires au Sénégal et au Tchad, où les gouvernements respectifs ont opté pour une réorganisation des accords militaires avec la France. Le 26 décembre 2024, le camp militaire français de Faya, dans le nord du Tchad, a été officiellement remis aux autorités locales. Ces initiatives suivent une série d’événements marquants au Sahel, où les régimes de transition du Mali, du Burkina Faso et du Niger ont expulsé les forces françaises, dénonçant une ingérence jugée incompatible avec leurs aspirations à une indépendance stratégique accrue.
Une présence française désormais limitée
À terme, la présence militaire permanente de la France sur le continent africain sera réduite à deux bases principales : au Gabon et à Djibouti. Cette réduction drastique témoigne des tensions croissantes entre Paris et ses partenaires africains, dans un contexte où les populations locales expriment de plus en plus leur rejet d’une tutelle militaire perçue comme héritée de l’époque coloniale.
Avec le départ progressif de ses forces, la France voit s’éroder son influence militaire en Afrique. Pourtant, certains analystes estiment que ces retraits offrent également une opportunité aux pays concernés de repenser leurs stratégies de défense, en renforçant leurs capacités nationales et en explorant de nouvelles alliances.
L’ombre d’une dépendance économique
Au-delà de la dimension militaire, la France reste économiquement dépendante de ses relations avec l’Afrique pour l’approvisionnement en matières premières stratégiques et le soutien à certaines industries nationales. Cette situation alimente des débats sur la nécessité pour l’Afrique de diversifier ses partenariats économiques et sécuritaires, tout en exploitant pleinement ses propres ressources.
Une nouvelle ère pour l’Afrique francophone ?
L’exemple de la Côte d’Ivoire illustre une tendance plus large en Afrique francophone, où de nombreux pays aspirent à une rupture avec les modèles de coopération hérités de l’époque coloniale. Si cette transition comporte des défis, notamment en matière de sécurité régionale face à la menace jihadiste, elle ouvre également la voie à une refondation des relations internationales sur des bases plus équitables.
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Alors que le retrait des forces françaises se poursuit, la question reste ouverte : d’autres pays suivront-ils cette dynamique en affirmant, à leur tour, leur autonomie face à l’ancienne puissance coloniale ? Pour l’heure, la Côte d’Ivoire semble avoir choisi son camp : celui de la souveraineté retrouvée et d’une armée nationale renforcée.
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Moussa Keita
Source: Bamada.net