Le mardi 22 avril dernier aux environs de trois heures du matin, des centaines de femmes regroupées dans une association dénommée « Femmes de la cité », soutenues par des jeunes, ont occupé la route reliant le site de la mine d’or de Syama au village de Fourou. Les femmes déchainées ont érigé des barricades pour empêcher les travailleurs de la mine d’accéder à leur lieu de travail.
Informés, le sous-préfet de la commune rurale de Fourou Tiefily Sangaré, le maire Salif Koné et certains leaders villageois, sont allés échanger avec les femmes en leur faisant comprendre qu’une journée d’arrêt de travail coûte à la Société des mines d’or de Syama (SOMISY-SA) au minimum une perte de 100.000 dollars (environ 50 millions de Fcfa).
Joints par téléphone, l’administrateur civil et l’édile ont expliqué qu’ils ne sont pas parvenus à faire fléchir les femmes, bien décidées à perturber les activités de la mine d’or de Syama jusqu’à ce qu’elles aient de l’eau potable. Le sous-préfet a alors informé son supérieur hiérarchique, le préfet du cercle de Kadiolo Lassana Sékou Camara. Le chef de l’exécutif local a, à son tour, tenté de négocier avec les femmes en joignant par téléphone leurs leaders. Mais peine perdue.
Malgré les offerts d’apaisement des autorités locales, les activités de la mine d’or sont restées paralysées durant la journée du mercredi. C’est ainsi que le jeudi, après avoir constaté que les femmes ne voulaient pas arrêter leur mouvement de protestation, le préfet Camara, accompagné du président du Conseil de cercle de Kadiolo Moulaye Diabaté et d’une force de maintien de l’ordre composée des éléments de la police, de la gendarmerie, de la garde nationale, s’est rendu à Fourou.
Une réunion a regroupé le préfet et sa délégation et les leaders des femmes protestataires. Les membres du comité de gestion de l’eau, les responsables de la jeunesse, les représentants de la société civile et les responsables villageois étaient également présents.
Les responsables de mine d’or devraient participer à cette rencontre de gestion de crise mais ceux-ci n’ont pas pu accéder au village de Fourou car les femmes n’ont pas voulu dégager la route.
A l’issue des échanges, le préfet Camara a condamné le comportement des femmes et les personnes qui les encouragent avant de leur expliquer que la Somisy est leur partenaire au développement. Il a indiqué aux habitants du village que c’est le maire qui est le premier responsable des actions de développement de la commune. « On ne demande pas l’aide d’un partenaire à travers la violence », a martelé le chef de l’exécutif local.
Le président du Conseil de cercle de Kadiolo a joint sa voix à celle du préfet Camara pour expliquer aux femmes les missions assignées aux membres du comité de gestion de l’eau. Les deux responsables ont exhorté les femmes à faire preuve de sagesse en libérant la route pour permettre à la Société des mines d’or de Syama (SOMISY-SA) de mener ses acticités d’exploitation du métal jaune. Les représentantes des femmes ont alors donné l’assurance de leur engagement ferme à libérer les voies d’accès à la mine.
A la fin de la réunion, le préfet Camara et sa délégation se sont donc rendus sur les lieux pour constater si les femmes ont respecté leur engagement. Mais quelle ne fut leur surprise ! Ils ont été violemment pris à partie par les manifestantes. Face à cet acte d’incivisme, le maire Salif Koné en sa qualité d’officier de police judiciaire et premier responsable de la commune, a aussitôt ordonné le rétablissement de l’ordre.
Les éléments des force de l’ordre, commandés conjointement par le major de gendarmerie Yaya Diarra et le commissaire de police Yaya Traoré, sont alors entrés en action pour, à l’aide de matraques et grenade lacrymogène, chasser les manifestants. Mécontents de l’usage de la force, ceux-ci sont allés incendier une partie du domicile du maire. L’un d’entre eux a été arrêté. D’autres manifestants qui tentaient de saccager la mairie, ont été repoussés par les forces de l’ordre. Le calme n’est revenu dans le village qu’aux environs de 2 heures du matin de ce vendredi 24 avril.
Nos enquêtes sur place nous ont permis d’apprendre que la SOMISY-SA, à demande de la population de Fourou, a réalisé 22 forages équipés de pompes manuelles et 2 châteaux d’eau. L’un est équipé d’une pompe électrique et l’autre d’une pompe solaire pour ravitailler le village de Fourou en eau potable.
La gestion de toutes ces infrastructures est confiée à la mairie de la commune rurale de Fourou à travers un comité local de gestion de l’eau.
La SOMISY-SA assure qu’à travers son département du développement communautaire, elle a mené beaucoup de démarches de sensibilisation et de soutien auprès des autorités communales et du comité local de gestion de l’eau pour la bonne et équitable gestion de l’eau dans le village de Fourou où réside la majeure partie des travailleurs de la mine de Syama, mais sans succès.
Les responsables de la mine déplorent le fait que pour tout problème de développement du village, la mairie et la population locale somment la SOMISY-SA de trouver la solution. Le directeur adjoint de la SOMISY-SA Adama Bakayoko nous a confié par téléphone que la mine d’or de Syama est perçue par les populations comme ‘‘l’oiseau de la bonne providence’’ qui apporte des solutions à tous les problèmes.
Il faut dire que chaque année, à partir du mois de mars, la pénurie d’eau s’installe dans la contrée qui est pourtant abondamment arrosée par les pluies pendant l’hivernage. Les forages peinent à satisfaire les besoins en eau de la population. La proximité des sites d’orpaillage augmente le volume de consommation de l’eau.
Le mouvement d’humeur n’est pas compris par tout le monde dans le village où un habitant nous a glissé sous le couvert de l’anonymat que les femmes auraient dû s’en prendre plutôt à la mairie.
Après le grabuge, les activités ont repris à la mine d’or de Syama et le calme est revenu dans le village de Fourou.
C. BATHILY
Amap-Kadiolo
source : L Essor