C’est au nom de l’ensemble des pays francophones que l’Ambassadeur du Mali, Abdoul Kader TOURÉ, s’est adressé aux participants aux Journées de la Francophonie à La Havane et à Santiago de Cuba. Très sollicité durant les assises, il a été, à plusieurs occasions, désigné par ses pairs pour coordonner les activités du Groupe des ambassadeurs africains. L’on apprend qu’il a été désigné Coordinateur du Groupe africain pour la 17e Conférence internationale annuelle de Santiago de Cuba sur la culture africaine et afro-américaine prévue du 11 au 16 de ce mois à Santiago de Cuba.
Les journées de la Francophonie à Cuba se sont déroulées du 1er au 23 mars 2018 à La Havane, à Matanzas et à Santiago de Cuba sur le thème central de la promotion de la langue française et la diversité culturelle et linguistique.
Organisées par l’Alliance française en collaboration avec les Ambassades des pays membres de l’OIF et plusieurs institutions culturelles cubaines, ces journées ont été marquées par de nombreuses activités artistiques, éducatives et socioculturelles, notamment : des expositions de photos et d’objets d’art, des projections de films, des ateliers, des panels, des conférences-débats, des conférences de presse, des récitals de poèmes, des défilés de mode et des concours.
Le temps fort de ces journées aura, sans doute, été le discours prononcé par S.E.M. l’Ambassadeur Abdoul Kader TOURÉ, au nom de l’ensemble des pays de la Francophonie accrédités à Cuba. C’était à l’occasion de la clôture du mois de la Francophonie, en présence de ses homologues francophones, des autorités et personnalités cubaines du monde des arts et de la culture.
Dans son allocution, l’Ambassadeur TOURE a traité de l’arrimage des pays africains à la langue française et des apports multidimensionnels de leurs langues et cultures au rayonnement de cette langue. Il a conclu que c’est en Afrique, terre de naissance de l’ACCT – ancêtre de l’OIF – que se situe l’avenir de la langue française.
Nous vous livrons, in extenso, le discours de l’ambassadeur TOURE.
Discours de l’Ambassadeur du Mali à la clôture des Journées de la Francophonie, La Havane 2018
« Chers amis de la Francophonie,
En ce mois de la Francophonie, c’est, pour moi, un honneur et un plaisir de prendre la parole pour parler des liens qu’a créés et que continue de sous-tendre notre adhésion commune – celle de l’Afrique, en particulier – à la langue française et aux valeurs de dignité humaine qu’elle véhicule.
Pour les millions de ses locuteurs que nous sommes, ici et ailleurs sur les cinq continents, la langue française est, à tous égards, un outil de communication, de réflexion, de création et d’échanges ; une langue qui se veut poreuse à tous les souffles du monde, une langue riche de son histoire, vibrante de son présent et de son avenir qu’enrichissent, au quotidien, les apports de toutes les cultures de tout un monde pluriel et divers. Et c’est à cela qu’elle doit son rayonnement et sa place au nombre des langues internationales ! Et aussi à l’engagement et au leadership des hommes et des femmes, gardiens du temple, qui ont dirigé et continuent de diriger l’OIF.
Pour nous autres Africains, l’arrimage à la langue française a, il est vrai, procédé de contacts divers, pas toujours apaisés ou civilisés, car c’est « dans les décombres du colonialisme que nous avons trouvé cet outil précieux, la langue française », avait dit L.S. Senghor. Et si, pour certains d’entre nous, celle-ci s’assimile à un « butin de guerre », pour beaucoup, il s’agit de la langue apprise à l’école coloniale où nous sommes allés pour, selon C.H. Kane, « apprendre à vaincre sans avoir raison ».
Lorsque, le 20 mars 1970, sur les berges du fleuve Niger, les fondateurs de l’ACCT ont jeté les bases de l’actuelle OIF, ils n’avaient aucun doute qu’ils s’engageaient dans une aventure humaine, une aventure à hauteur d’homme, pour porter l’ambition francophone en matière de culture et d’éducation, car « la Francophonie, a dit L.S. Senghor, c’est cet Humanisme intégral, qui se tisse autour de la terre ».
Un des principes cardinaux de l’entreprise francophone porte sur le dialogue des cultures, des civilisations, loin des affrontements et des dogmes, dans le respect de l’altérité, pour contribuer à la civilisation de l’universel, la « seule et même civilisation globale ». A cet égard, et parlant de ce dialogue qui porte la notion de multiculturalisme, de cultures plurielles, je voudrais ici dire nos liens avec la langue dite de Molière, qui est aussi celle de Chicaya U’Tamsi et de Yambo Ouologuem.
Se doutait-on seulement, en 1970, que l’avenir de la Francophonie et de la langue française se situerait si vite en Afrique ? Aujourd’hui, plus du tiers des 84 États et gouvernements de l’OIF sont africains. Pour 13 d’entre ceux-ci, elle est langue d’enseignement, donc d’accès au savoir et au savoir-faire. A ce titre, elle se doit aussi de porter l’accès de l’Afrique à la modernité, dans le respect du foisonnement de ses contextes nationaux multilingues et multiculturels.
En raison de projections démographiques connues et admises, il se dit qu’en 2050, plus de 85% des francophones du monde seront en Afrique. Alors, qui mieux que le Président Abdou Diouf, ancien Secrétaire général de l’OIF, aurait su dire nos liens, lui qui, en 2014, proclamait que « c’est l’Afrique qui sera l’axe central d’une francophonie à la mesure de la mondialisation… et qui sera le creuset d’une langue vivace, charnelle et poétique, juridique et scientifique, intellectuelle et économique ».
Bon vent au Sommet d’Erevan pour que vive notre prochaine rencontre en terre africaine de Tunis !
Vive la Francophonie !
Je vous remercie. »
Ambassade du Mali à La Havane,
Le 4 avril 2018
info-matin